One Shot : critique qui pète des bras en plan-séquence

Antoine Desrues | 13 mars 2022 - MAJ : 14/03/2022 10:37
Antoine Desrues | 13 mars 2022 - MAJ : 14/03/2022 10:37

Dans le domaine du DTV, il faut bien admettre qu'on perd de plus en plus espoir à l'idée de tomber sur une petite pépite, surtout lorsque Bruce Willis enquille sans complexes les séries Z indéfendables. Pour autant, il y a bien encore quelques irréductibles, bien décidés à avoir des ambitions de cinéma malgré les budgets ridicules qui leur sont alloués. Scott Adkins est de ceux-là, et avec One Shot, l'acteur et artiste martial se met au cœur d'un actioner vénèr en unique plan-séquence.

La Corde (raide)

À partir de l'intérieur d'un hélicoptère, One Shot parvient très habilement à poser son contexte et son concept. Une poignée de Seals, menée par le lieutenant Harris (Scott Adkins), débarque avec une analyste de la CIA sur "l’Île noire", une sorte de Guantánamo ultra-secret. Très vite, des débats houleux autour de l'exfiltration d'un détenu prennent place, tandis que la caméra marque la topographie de son seul décor au fil des déplacements de ses protagonistes.

Bien évidemment, rien ne se passe comme prévu, et une troupe de terroristes pointe le bout de son nez, obligeant nos héros à se cacher et à organiser un siège pour mieux riposter. Au-delà de son postulat on ne peut plus basique, One Shot a surtout pour particularité d'être tourné en un unique (et faux) plan-séquence. Si l'exercice de style a de quoi titiller les cinéphages, difficile de ne pas se montrer un poil méfiant au lancement du métrage, surtout quand revient à l'esprit près d'une décennie de films d'action obsédés par la même prouesse, au point de la vider de son sens.

 

One Shot : photo, Scott Adkins, Ashley Greene"We're some kind of... suicide squad"

 

De Bushwick au morceau de bravoure vain de Tyler Rake, le plan-séquence numérique est devenu un passage obligé qui n'interroge même plus sa raison d'être. Pourtant, en plus de mettre en valeur une technique flamboyante (mais qui se remarque donc), cette démarche doit par essence être portée par un rapport au point de vue, forcément limité à l'espace dans lequel la caméra peut naviguer.

Or, la crainte d'une fumisterie s'estompe bien vite dès les premières minutes de One Shot, justement parce que le film de James Nunn (qui n'est pas le réalisateur des Nardiens de la nalaxie) s'est posé les bonnes questions. Son dispositif n'est pas un artifice creux, mais bien une manière de façonner un récit en temps réel tendu et jouissif.

 

One Shot : photo, Scott AdkinsUn grand film humaniste

 

Le frère Scott

À première vue, le principe est un écrin royal pour les élans chorégraphiques brutaux et plus impressionnants que jamais de notre cher Scott Adkins. Le comédien se donne à chaque seconde dans des affrontements nerveux et jubilatoires. Coups de couteaux dans la trachée, balles dans la tête, mano a mano ultra-bourrins, tout y passe avec une fluidité déconcertante qui prouve bien à quel point l'implication physique de l'acteur est la raison première de la réussite de l'ensemble.

Mais en plus de donner les mains moites sur une heure et trente-cinq minutes bien ramassées, One Shot surprend dans son approche du plan-séquence. On aurait pu s'attendre à ce que le budget réduit du film l'amène à coller aux basques de son héros action-man, mais il n'en est rien. Au travers d'une véritable réflexion sur la dynamique de sa narration, qu'il déploie à la manière d'un ballet étonnamment millimétré, James Nunn se permet de jongler entre divers points de vue, et de jouer avec l'absence de coupe pour amener sa caméra là où on ne veut pas forcément la voir.

 

One Shot : photo, Scott Adkins, Ryan Phillippe"Quoi ? Scott va devoir se faire tous les méchants tout seul ? Ok !"

 

De cette façon, le film a l'opportunité de donner (un peu) de chair à ses antagonistes, et en particulier à son chef de guerre francophone. Certes, ce n'est pas là que One Shot est le plus finaud, tant il enfonce des portes ouvertes sur le terrorisme non-étatique et sur les dérives de la torture dans les prisons américaines. Néanmoins, il trouve un peu de nuance, notamment lorsqu'il choisit de nous mettre face au désarroi d'un jeune soldat, qui accepte de servir de martyr en s'armant d'un gilet explosif.

Pour le reste, cette ambition est l'occasion pour le film de se montrer bien plus ludique qu'on n'aurait osé l'espérer. Non seulement la malice scénographique du long-métrage lui permet de créer des raccords invisibles pour la plupart indétectables, mais James Nunn profite également de son exercice de style pour réellement iconiser sa star.

 

One Shot : photo, Scott AdkinsLe dévouement d'un acteur par l'exemple

 

En s'adaptant par instants au regard des terroristes qui servent de chair à saucisse à Scott Adkins, la mise en scène nous projette dans la même ignorance de sa position. On se met à regarder chaque bord de cadre et chaque angle de mur, dans l'attente de voir l'artiste martial en surgir pour venir défragmenter ses opposants.

Ce jeu de hors-champ habile aide grandement One Shot à construire sur la durée une tension palpable, couplée à l'envie sincère de son réalisateur d'exploiter au maximum les possibilités de son décor. D'une séquence claustro à l'intérieur d'une bouche d'aération à l'explosion de violence virtuose d'un dernier acte qui lâche les chevaux, le film affiche une générosité exaltante. Et même si son final est un peu précipité, difficile de prendre en défaut une proposition aussi intègre et jusqu'au-boutiste, qui nous rappelle à juste titre que les meilleures séries B sont toujours celles qui ont l'ambition d'expérimenter.

One Shot est disponible en DVD depuis le 10 mars 2022. Il est également disponible en VOD et sur MyCanal.

 

One Shot : affiche

Résumé

One Shot pourrait n'être qu'un exercice de style vain, mais son approche maline du plan-séquence en fait une proposition d'action revigorante et généreuse. De la belle ouvrage, qui prouve au passage que Scott Adkins est bien l'action star la plus impliquée et passionnante de ces dernières années.

Autre avis Mathieu Jaborska
Un exercice de style amusant qui, faute d'un recul suffisant sur son sujet, convainc surtout grâce à Scott Adkins, au sommet de son art.
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Lecteurs

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commentaires
Pistolero
30/03/2022 à 22:58

Respect infini pour la vanne james nunn :D
Sinon un peu déçu mais ça me permet de revaloriser « 1917 » qui finalement permet de se rendre compte de sa maîtrise technique (ok pas le même budget) mais qui m’avait pas donné tant d’émotion que ça hormis quelques passage (la reprise de Wayfaring Stranger par ex).
Poire « one shot » effectivement la caméra ne reste pas collée à l’acteur principale et propose d’autres points de vue plutôt « innovants » mais la plupart du temps justement elle ne met pas assez en valeur les échanges entre les protagonistes ou les moments de tension en restant en plans plutôt moyen / large.
Mais généreux dans ces intentions et les implications des différents protagonistes (équipe technique / acteurs).
Et puis voir Philippe Etchebest démonter autre choses que des cuistos dans des restaurants ça n’a pas de prix ;)

Pat Rick
16/03/2022 à 20:25

Déçu pour ma part, rien d'extra dans ce film d'action terne et sans tension.

Kyle Reese
16/03/2022 à 01:11

"if you had one shot or one opportunity / To seize everything you ever wanted in one moment / Would you capture it"

Enimen - Lose yourself

Elle était acile celle là mais cétait le bon moment.

Promesse tenue, c'est tendu du slip pare-balles, un véritable carnage.
L'impression d'être dans un jeu vidéo FPS tellement on est immergé dans l'action.
Scott Adkins est très bon, hâte de le voir dans le prochain Wick. Il mériterai de plus gros budget. En dehors de l'interprétation pas toujours au top du reste du cast le film se tient bien dans son concept de one shot. Un bémol toute fois au sujet de la musique beaucoup trop en retrait et pas à la hauteur, elle aurait pu dramatiser plus l'action. Les limites du budget j'imagine. En tout cas chapeau pour les chorégraphies d'action et de caméra surtout.

Jdbravo
14/03/2022 à 13:06

@galetas
Je pense que Philippe a tout donné dans shooter... Y a plus rien depuis

Jdbravo
14/03/2022 à 13:01

Vu ce week-end avec mon ado, et franchement, on a bien aimé.

Par rapport à nombre de bouses qui ont droit à des sorties cinéma, ça le fait bien

Flash
14/03/2022 à 12:43

Vu ! Pas mal du tout, nerveux, sans temps mort et Adkins, très crédible.

Snake88
14/03/2022 à 06:49

Merci de donner un peu de visibilité à ce cher Scott Adkins. Maintenant un dossier sur ses meilleures bourinades SVP ! Undisputed, Close Range, Ninja, Avengement... y a de quoi faire !

Luigi
13/03/2022 à 22:41

@T.Scott Adkins est "British"!Mais entièrement d'accord avec toi c'est un très bon artiste martial, plutôt bon acteur quand on lui donne l'occasion (Avengement ,une tuerie et pour moi son meilleur film à l'heure actuelle).

Riddick
13/03/2022 à 21:18

Ce film est une bouse
Moi je comprends pas.el. nul nul et nul

galetas
13/03/2022 à 20:06

Ouaip, grosse réalisation pour un téléfilm.
Les raccords entre les différents plans séquence fonctionnent plus ou moins bien mais les performances bien nazes de certains acteurs ('PHILLIPPE aîe!!!) gâchent un peu la fête.

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