Concrete Cowboy : critique du Far West made in Netflix

Salim Belghache | 2 avril 2021 - MAJ : 02/04/2021 18:11
Salim Belghache | 2 avril 2021 - MAJ : 02/04/2021 18:11

Une suite de Django Unchained, avec Idris Elba à la place de Jamie Foxx, avait de quoi nous intriguer. Mais rien à voir en fait, puisque Concrete Cowboy n’est pas un western avec l’acteur de la série Sur écoute comme chef de file. Toutefois c'est une idée que le grand Tarantino pourrait envisager. Si tu passes par-là Quentin… Plus sérieusement, il s’agit dans ce cas d’un petit drame sans prétention distribué par le géant Netflix, et enfin disponible sur la plateforme.

 

Un gentil premier film

Repéré par le N rouge au festival de Toronto en 2020, Concrete Cowboy met en scène un jeune adolescent de 15 ans interprété par Caleb McLaughlin (Stranger Things). Ce personnage a été forcé par sa mère d’aller habiter chez son père à Philadelphie. Au départ malheureux de la situation, le jeune Cole va finalement se trouver une passion pour l’équitation et apprendra les valeurs qui accompagnent cette discipline, malgré la pauvreté et la violence de l’environnement autour.

On commence à connaître les films affiliés Netflix. Mis à part les quelques grosses productions dirigées par d’immenses réalisateurs, comme David Fincher (Mank) ou Martin Scorsese (The Irishman), le contenu Netflix est souvent décevant, voire carrément oubliable. Concrete Cowboy a la particularité d’être placé entre les deux.

Il faut toutefois noter que c’est le premier film de Ricky Staub. Détail important dans l’absolu, puisque le film pâtit de maladresses causées en grande partie par l’inexpérience de son auteur à la réalisation. Très peu d’acteurs, trois-quatre décors, le jeune réalisateur semble miser sur l’efficacité, plutôt que sur les excès d’un jeune premier ambitieux. 

 

photo, Lorraine Toussaint, Caleb McLaughlinTu veux ta maman ?

Un territoire miné 

Le long-métrage a dans son panier, une ligne directrice qui se dégage durant l’intégralité du film. Le thème du territoire que travaille le film et le point qui le rattache au western. Le genre américain par excellence est globalement connu pour avoir mis en scène l’idéal de la conquête de l’ouest. Les enjeux de prise d’un territoire d’un camp à un autre ou de conservation d'un bout d’espace font de ce genre si particulier, un terrain propice aux questionnements sur l’identité. Concrete Cowboy met en exergue dans sa majorité, une communauté qui tente de conserver une écurie. Ce comité mené par le père de Cole (Idris Elba) porte les valeurs des cow-boys.

 

photo, Idris Elba, Method ManMethod Man veut faire une battle 

 

Le récit parallèle de Cole et de son cousin Smush (Jharrel Jerome) rend compte de la même problématique. Plusieurs de leurs rendez-vous se déroulent en effet dans une voiture, un espace clos que les deux personnages vont à leur manière tenter d’élargir. Smush va de son côté jouer le petit gangster de comptoir en grappillant les bouts de "territoire" du chef de gang local. Tout l’enjeu pour lui est d’obtenir le pécule nécessaire pour acheter des propriétés fermières à l’ouest des États-Unis. 

Néanmoins, ce thème central de l’espace ne prend jamais totalement son ampleur par une réalisation précise et ambitieuse. Et c’est là que le bât blesse. Le défaut majeur, et pas des moindres, vient du fait que malgré son sujet noble, la mécanique de la mise en scène est extrêmement prévisible. À quelques exceptions près, que nous allons brièvement exposer à la prochaine partie, le film rate le pli de combiner grandeur thématique et mise en scène inspirante.

 

photo, Caleb McLaughlin, Jharrel JeromePosé dans la street

 

Un enclos à ouvrir

La rencontre de l’autre est centrale dans le dispositif de Staub. L’esprit indépendant, similaire à la dimension politique du localisme, est une idée fondatrice de ce groupe qui se réunit autour d'un feu et crée à partir de cela, un espace d’écoute pour l’individu. Cette thèse du discours entendu par l’autre s’exprime également dans le film par son découpage. Les séquences sont généralement montées avec les mêmes valeurs de plan. Staub joue régulièrement sur la mise en scène des visages dans des cadres serrés (gros plan ou plan poitrine)

C'est à partir de ces moments d'échange que Ricky Staub parvient enfin à exprimer une idée de mise en scène. En effet, le cadre intègre un autre visage dans le dispositif du champ-contrechamp. Ricky Straub appréhende les amorces de manière différente puisqu’à l’inverse de Cole, l’interlocuteur est généralement astucieusement mis en scène. Staub n’hésite pas à s’amuser avec la profondeur de champ. Alternant la courte et la longue focale, l’autre personnage qui accompagne Cole (Smush ou Harp par exemple) est la figure qui porte le plan. Assez étonnant quand on voit la présence exclusive du personnage principal à l'image.

 

photo, Idris Elba, Caleb McLaughlinJe suis avec mon daron maintenant 

 

Des prises de risques tout de même minimales et déjà rencontrées dans un nombre important de longs-métrages. En fin de compte, la mise en scène ne sert qu'à suivre le programme narratif bien trop calibré, sans prises de risques notables. Le récit n'est finalement que la progression d’un adolescent vers la maturité, mis en parallèle avec le cheval qu’il parvient à dresser. 

Et alors que le film s’est établi sur le parti pris de filmer les acteurs en gros plan, le dernier plan est un travelling arrière ascendant qui montre le cercle familial en plan d’ensemble. Le réalisateur ne manque pas de faire figurer tout un membre de la communauté du quartier de telle sorte qu’on n’est pas loin d’avoir l’impression d’être dans un décor de western. Un jeu sur les valeurs de plan bien classique et sans surprise, comme l'ensemble du film.

Concrete Cowboy est disponible sur la plateforme Netflix en France depuis le 2 avril 2021

 

Affiche US

Résumé

Concrete Cowboy souffre malheureusement de son économie de moyen et de son manque d’inspiration au niveau de sa mise en scène. Si le film nous avait proposé un peu plus de mystère et une plus grande patte visuelle, il aurait certainement été sauvé de son statut de petit film sans grande envergure. 

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Lecteurs

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commentaires
Ph
06/04/2021 à 11:31

Un film qui fait le job ! J'ai beaucoup aimé

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