La Grande Aventure LEGO 2 : critique la brique m'a tuer

Geoffrey Crété | 20 février 2019 - MAJ : 09/03/2021 15:58
Geoffrey Crété | 20 février 2019 - MAJ : 09/03/2021 15:58

En 2014, "Everything is awesome" avec La Grande Aventure LEGO de Phil Lord et Chris Miller, qui surprend son monde et encaisse gros (plus de 469 millions pour un budget de 60). Cinq ans après, LEGO Batman : Le film et LEGO Ninjago : Le film sont passés, et tout est moins génial pour les comptables. L'effet de surprise a disparu pour laisser place à l'évidence : ce placement de produit de luxe devenu franchise est une horreur, comme en témoigne La Grande Aventure LEGO 2.

LEGOGOL

Si La Grande Aventure LEGO a été reçu comme un film méta drôle et malin, et pas un affreux placement de produit bête et sournois, c'est en grande partie grâce au talent de Phil Lord et Chris Miller. Le duo y a imposé un sens du décalage, du second degré et de l'absurde vu dans 21 Jump Street. C'était une symphonie amusante de la pop culture, d'autant plus séduisante qu'elle avait lieu dans le cadre d'un pur produit marketing. Un numéro d'équilibriste en somme.

C'était de toute évidence un coup unique, que le studio s'est sans surprise empressé de multiplier en quatrième vitesse, comme des briques empilées par un môme qui veut construire une tour de plastique vouée à s'écrouler. En 2017, il y a donc eu LEGO Batman : Le film et LEGO Ninjago : Le film, qui ont confirmé le vide de l'entreprise, réduite à surfer sur la popularité de marques, et ainsi s'aligner sur l'usine à jeux vidéo estampillés Lego.

La Grande Aventure LEGO 2 confirme tristement cette pente descendante avec une deuxième aventure bête au possible, croisement mutant entre un téléfilm familial de seconde zone et l'âme d'un DTV type Barbie dans l'espace. C'est laid, c'est hystérique, c'est creux, c'est interminable, et ce n'est jamais drôle. C'est même corrosif puisque ce produit a été conçu pour les plus jeunes.

 

photo Quand tu vois que le public s'en contrefiche

 

APOCALYPSEBEURK 

Cinq ans après La Grande Aventure LEGO, l'invasion des indestructibles et mignons Duplo a transformé le monde du plastique made in China. Comme Mad Max : Fury Road est passé par là, Emmet et Lucy vivent près d'une ville en ruines, dans un désert post-apocalyptique renommé Apocalypseburg. Inutile de se pencher sur cet aspect de l'univers qui sera évacué en un quart d'heure, puisqu'un machin envoyé par la reine Watevra Wa'Nabi bidule débarque, et embarque Batman et plusieurs personnages.

Ce sera le début d'une quête pour Emmet le bon gars débile et étiquetté héros, qui l'emmènera vers un lieu où ses amis sont littéralement brainwashés à coup de mauvaise musique qui s'imprime de force sur votre système cérébral, comme une douce forme de torture machiavélique. Avec en plus l'idée que les méchants ne sont pas méchants, mais usent seulement de méthode douteuse pour être aimés et acclamés sans résistance, il y a un discours particulièrement étrange et ambigü, qui devient terrifiant appliqué à la politique d'une giga-entreprise qui s'adresse au grand public.

 

photoEt le débile devint héros (même si sa copine est intelligente-combattante-héroïque)

 

Ici, toute parade de troisième degré et niveau méta semble traitée en pilotage automatique, comme si le public était censé avoir déposé les armes pour boire les paroles et les images sans même les goûter ou les questionner.

Il y a Batman, Superman, Wonder Woman et Green Lantern, et même Bruce Willis dans son propre rôle. Il y a tout un tas de diversions placées sur le chemin, pour occuper l'esprit du spectateur de 2019, et masquer la publicité géante et vide à l'écran. Mais il en faudra bien plus pour camoufler le ratage de l'entreprise.

 

photo Batman de plus en plus limité

 

MONSTRES ET CIE

La Grande Aventure LEGO 2 se transforme alors en théâtre du vide, aussi grotesque que mortifère. Recyclage poussif et paresseux du premier, le film est une épreuve pour les neurones et les yeux, et prend des airs de mauvais trip ultra coloré, qui lance à la face du spectateur un arc-en-ciel de couleurs et lumières et effets pour surtout ne jamais perdre son attention. Paix aux âmes des enfants qui seront confrontés à l'expérience.

D'autant que le film, d'une durée affolante vu la teneur (1h48), se révèle aussi interminable que fade. Difficile de trouver un gag, une réplique, une scène, un personnage pour excuser la lourdeur du voyage. Ce ne sont pas quelques raptors ou sketchs basés sur un machin mignon mais warrior qui vont y changer quoi que ce soit.

 

photo S'il pouvait ouvrir une porte, il seraient en train de se barrer

 

Et lorsque ce Lego 2 passe du côté réel de son récit, avec son histoire de frère et soeur grondés par leur mère (pauvre Maya Rudolph, décidément présente un peu partout sans raison), c'est encore pire. Le scénario ne s'amuse même pas avec les quelques ficelles prévisibles, ou les liens bizarroïdes entre réel et jouets.

Il y a alors l'impression d'avoir sous les yeux une abominable publicité sur la sacro-sainte famille, digne d'une parodie de Kinder surprise ou l'ami Ricoré. Jouer avec des morceaux de plastique pour les vendre au public, c'est bien, mais les partager avec sa petite soeur qui aime les poupées roses, c'est encore mieux. L'union fait le foutage de gueule.

Inutile d'enfoncer beaucoup plus cette grande aventure du marketing numéro 2, assemblée par Mike Mitchell, déjà derrière Shrek 4, il était une fin et Alvin et les Chipmunks 3. C'est une horreur faite film, et la meilleure incarnation des grands problèmes d'une industrie du faux spectacle, plus occupée à vendre un produit qu'à élever le public pour en faire autre chose qu'un consommateur proche du bétail. Et peu importe son âge, le spectateur vaut mieux que ça.

 

Affiche française

Résumé

C'est bête, c'est laid, et même potentiellement dangereux vu son emballage pop-cool : La Grande Aventure LEGO 2 n'est qu'une façade pour entretenir l'image d'une fabrique de plastique, et un mauvais recyclage sans une once d'imagination ou réflexion. 

Autre avis Christophe Foltzer
Complètement con et opportuniste, là où le premier film savait encore raconter une histoire, celui-ci n'en prend même plus la peine. Une longue pub qui mélange les franchises qui n'a pour seul objectif que de pousser les gamins à piquer la CB des parents. Pathétique.
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Lecteurs

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commentaires
Dag
23/06/2022 à 05:15

Comment vous y allez.. Serieux vous abusez je trouve, le film est clairement pas si moche. Je veux dire, ok il arrive pas du tout au niveau du premier, mais il est quand même cool. Et puis il suit la continuité du 1. En lisant cette critique, on dirait que vous êtes juste passé à côté du thème même du film. L'enfant qui voulait juste s'amuser et laisser aller son imaginaire a grandit et rêve maintenant de devenir adulte. Il se fait une image de dureté et d'insensibilité à la mad max. Sauf qu'il doit réaliser qu'en faisant ça il va juste s'auto détruire. Ce film c'est une invitation, certes peut-être pas assez fine, mais une invitation à se laisser aller et arreter de se persuader qu'on doit rentrer dans des cases ou des codes. Tout comme le premier d'ailleurs, et c'est pour ça que ça reste une bonne suite narrativement.
Après on peut parler de plein d'autres choses comme la qualité de l'animation, du doublage, la BO qui est effroyable par moment mais a quelques bonne surprises..
Bref, tout ça pour dire que je trouve votre critique beaucoup trop sévère..

LEGOGOL
19/06/2022 à 12:30

En vrai il était pas si nul

Simon Riaux
13/12/2021 à 18:42

@Vraiment ?

On ne voit pas bien le rapport.

Sinon, elle vous a coûté combien l'entrée sur le site ?

Domo
20/02/2019 à 21:48

Je confirme, j'avais adoré le premier, j'ai vu le 2 en avant-première et je suis tombé de haut. C'est un film "bruyant", écrit à la va-vite.

Ducky
20/02/2019 à 19:02

Black panther est naze pour vous ... chacun sa sensibilité...

Geoffrey Crété - Rédaction
20/02/2019 à 18:49

@ Zanta

Black Panther est un exemple amusant qui, parmi plein d'autres, montre les gouffres entre la presse US et française. On ne compte plus les films encensés ou détruits (comme le récent Bienvenue à Marwen) de manière quasi unanime, sans demi-mesure.

Tout ça pour dire que ce n'est pas nouveau que la critique puisse être (très) divisée, surtout des deux côtés de l'Atlantique. D'autant qu'on nous est régulièrement tombés dessus pour avoir "osé" défendre ou descendre des films contre ce qui serait l'opinion commune de la presse.

On s'en fiche un peu puisque dans tous les cas, c'est toujours honnête, et englobé dans notre discours lui aussi sincère : allez tous en salles vous faire votre propre avis, car le nôtre n'est pas parole d'évangile.

Zanta
20/02/2019 à 18:44

Oui, alors Black Panther, soyons clairs : le film est vraiment naze, j'en conviens.
Aux US - et donc sur Rotten -, c'est bien le symbole et le discours qu'il porte qui ont conduit à ce sacre - et cette nomination totalement imméritée à l'Oscar.
Mais là, on est dans un autre registre : l'humour méta délirant. Oui, le réal a l'air d'un tâcheron, mais Lord et Miller étaient quand même au scénar... On pouvait espérer mieux.
Et puis Rotten, ça reste un baromètre. Très imparfait, mais bien là. Comme Allociné.

Geoffrey Crété - Rédaction
20/02/2019 à 18:39

@Zanta

Et Black Panther est à 98% sur RT. Donc bon.

Mais comme d'hab', on vous dira à tous d'aller vous faire votre propre avis en salles !

Zanta
20/02/2019 à 18:26

Wow.
Le film s'offre un 85 sur Rotten, surpris donc de cet avis dénué de point positif.

Geoffrey Crété - Rédaction
20/02/2019 à 11:29

@Bravo

Vilaine coquille, merci

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