Y, le Dernier Homme : que vaut la série post-apo Disney+ adaptée du comics culte ?

Arnold Petit | 22 septembre 2021 - MAJ : 22/09/2021 14:20
Arnold Petit | 22 septembre 2021 - MAJ : 22/09/2021 14:20

Après un développement sans fin, une pandémie et encore plus de retard, Y, le Dernier Homme voit enfin le jour. La série télé adaptée des excellents comics de Brian K. Vaughan et Pia Guerra débute sur Disney+ le 22 septembre, mais est-ce que ça valait vraiment la peine de l'attendre aussi longtemps ? Verdict après trois épisodes.

Attention, légers spoilers !

 

photoEst-ce que t'as vu comme je suis... renversant ?

 

MIEUX VAUT TARD QUE JAMAIS

Publié de 2002 à 2008 sur le label Vertigo de DC Comics, Y, le dernier homme imagine un monde où "tous les hommes sont morts" comme le déclare une officière de police à la fin de la première page, un pistolet sur la tempe. Dans ce "no man's land", Brian K. Vaughan développait alors une histoire intelligente, brillamment illustrée par Pia Guerra, entre survivalisme, féminisme et politique, explorant de nombreux thèmes comme l'héritage du patriarcat ou la politique internationale dans un monde post-apocalyptique.

Le comics, récompensé par plusieurs Eisner Awards (meilleur scénariste en 2005, meilleure équipe artistique et meilleure série en 2008), a même été décrit par Stephen King comme "le meilleur roman graphique qu'il n'ait jamais lu". Pas étonnant donc que plusieurs studios, créateurs et scénaristes aient tenté de le porter à l'écran toutes ces années.

Le projet de film lancé en 2007 a finalement muté en série télé sur FX en 2015 avant de rester en gestation pendant un long moment. Alors qu'un pilote est tourné en 2018 avec Barry Keoghan, Imogen Poots et Lashana Lynch dans les rôles principaux, tout s'arrête. Les showrunners Aida Croal (Luke Cage, Jessica Jones) et Michael Green (American Gods, Heroes) partent après des différends créatifs, puis la Fox est rachetée par Disney et Eliza Clark (Animal Kingdom) récupère la série. Sauf qu'à cause du retard accumulé, Barry Keoghan, Imogen Poots et Lashana Lynch ne sont plus disponibles.

 

photoMood des producteurs

 

Retour à zéro. Ben Schnetzer, Olivia Thirlby et Ashley Romans sont donc appelés pour prendre leurs places, puis scandale et départ de Timoty Hutton après une plainte pour viol, remplacé à son tour par Paul Gross. La pandémie a évidemment un peu plus retardé le tournage, et finalement, après toutes ces péripéties et une promotion timide, Y, le Dernier Homme arrive. Quand presque plus personne ne l'attend.

D'autant que, depuis, un autre comics appelé The Walking Dead, né presque à la même période, a lui aussi été adapté à la télévision et est devenu un phénomène parmi toutes les séries post-apocalyptiques qui sont apparues comme Revolution, The 100, The Last Man on Earth, The Strain, Fear The Walking Dead ou plus récemment The Stand, rassasiant les amateurs du genre quasiment jusqu'à l'excès, voire l'épuisement. Et c'est peut-être le problème majeur de Y, le Dernier Homme : en plus d'arriver après les autres, elle leur ressemble beaucoup trop.

 

photoAh ouais, même pas de bonjour, on attaque direct

 

28 JOURS PLUS TARD À LA MAISON BLANCHE

Contrairement à la bande-dessinée qui démarrait sur l'infection et lançait immédiatement le lecteur dans le récit, la série choisit de démarrer un peu plus tôt, quelques heures avant la catastrophe. Un moyen efficace de présenter consciencieusement chacun des personnages et de définir leur rôle dans l'apocalypse à venir, mais qui ne méritait probablement pas d'y consacrer un épisode entier. Ce n'est qu'après plusieurs longues scènes convenues que tous les porteurs du chromosome Y meurent subitement et que la terreur se répand aussi rapidement que les cadavres de maris, de frères et de fils s'amoncellent dans les rues de la ville.

Seul rescapé de ce terrible fléau dont personne ne sait rien, Yorick (Ben Schnetzer), chômeur immature qui se rêve maître de l'évasion, se lance désespérément à la recherche de Beth (Juliana Canfield), sa copine qu'il venait de demander en mariage, accompagné de son singe, un capucin mâle nommé Esperluette, plus vrai que nature grâce aux effets spéciaux

Sa mère, Jennifer Brown (Diana Lane), une représentante démocrate au Congrès, se retrouve propulsée à la tête de la nation après la mort du président (comme c'est pratique) et fait la rencontre de la redoutable Agent 355 (Ashley Romans), infiltrée pour d'obscures raisons dans les Services Secrets. De son côté, la soeur de Yorick, Hero, ancienne toxicomane et ambulancière, lutte pour sa survie aux côtés de son meilleur ami, Sam, un homme transgenre.

 

photoC'est pas pour jouer dans The Walking Dead ici ?

 

Assez fidèlement, Eliza Clark reprend le scénario de Brian K. Vaughan dans les grandes lignes et entreprend même d'améliorer son matériau d'origine, en procédant à quelques modifications. Néanmoins, si certaines permettent effectivement de moderniser l'histoire et d'épaissir certains personnages (notamment ceux créés pour la série), d'autres ne servent qu'à renforcer l'ambiance pesante ou à étirer des passages plus qu'il n'en faut.

Quelques répliques humoristiques se glissent dans les dialogues et la personnalité de gentil loser de Yorick le différencie des autres héros du genre, qui cherchent absolument à sauver le monde, mais la légèreté et l'espièglerie qui se dégageaient des planches de Pia Guerra ont totalement disparu au profit d'une atmosphère macabre, inhérente au genre.

Et si les corps abandonnés, les inscriptions gribouillées à la hâte par les survivants et les murs défrichés traduisent bien l'horreur et le désespoir de la fin du monde, les décors, la réalisation et l'écriture sont malheureusement trop génériques pour surprendre ou bouleverser. Et en voulant faire mieux, Eliza Clark en oublie l'essentiel.

 

photoHum... c'est sûrement la gentille

 

Alors que le comics se concentrait essentiellement sur Yorick et son road-trip à travers les États-Unis avec l'Agent 355, le jeune homme se retrouve presque relégué au rang de personnage secondaire et la série jongle maladroitement entre tous les autres.

Eliza Clark développe même une sorte de drame politique entre la présidente Brown et Kimberly Campbell Cunningham (Amber Tamblyn), la fille conservatrice du président décédé, une parodie d'Ivanka Trump persuadée que le féminisme est un danger pour les hommes et les garçons, et qui réclame un rôle dans le gouvernement désormais exclusivement féminin. 

Mais au lieu d'exploiter cette confrontation idéologique entre libéralisme et conservatisme, cette intrigue passablement ennuyeuse entre Scandal et House of Cards enchaîne les couloirs de dialogues dans ceux de la Maison-Blanche pour insister sur la gravité de la situation. Dommage puisqu'elle pourrait plutôt s'intéresser aux personnages, à l'instar de Nora, l'attachée de presse de l'ancien président, gratuitement malmenée au cours des trois épisodes (et pourtant incarnée par une Marin Ireland toujours aussi brillante).

 

photoQu'est-ce que que je vous ai fait ?

 

THE LAST CIS MAN ON EARTH

Ce n'est que lorsque la caméra retourne à l'extérieur que la série prend de l'ampleur et devient passionnante, autant pour ses scènes intimistes que pour les thèmes qu'elle aborde avec un regard contemporain. Comme dans le comics, les avions qui s'écrasent, les centrales nucléaires à l'arrêt et la chute de la civilisation illustrent clairement la place prépondérante qu'occupaient les hommes cisgenres au sein de la société avant la catastrophe.

Brian K. Vaughan avait discrètement abordé le sujet des personnes transgenres dans le comics à travers l'apparition de plusieurs hommes trans après l'épidémie et avec Yorick, qui se faisait passer pour un homme trans afin de passer inaperçu aux yeux des autres. En créant le personnage de Sam comme homme trans et meilleur ami de Hero et en choisissant d'inclure les personnages transgenres dans son scénario, Eliza Clark peut ainsi explorer pleinement la question de la transidentité dans un contexte post-apocalyptique

Il est encore trop tôt pour savoir comment la série compte traiter le sujet de l'identité de genre, mais l'inclusion d'un personnage comme Sam exprime déjà un progrès en termes de représentativité et une volonté de dresser un portrait de notre monde à travers une dystopie réaliste, ancrée dans son époque.

 

photoTiens, tu peux prendre ma carte Franprix

 

Y, le Dernier Homme s'appuie également sur son excellent casting, en particulier Ashley Romans, fascinante en 355 (et méchamment badass). Ben Schnetzer incarne Yorick dans toute sa nonchalance et son désarroi, Olivia Thirlby apporte de la crédibilité à Hero malgré une intrigue inutilement alourdie et Diane Lane est parfaite (comme d'habitude).

Eliza Clark a bien pris le temps de poser le contexte avec ses très nombreux personnages, mais la série donne l'impression de ne véritablement commencer qu'à la fin du troisième épisode, après ce qui ressemble à une longue et fastidieuse introduction. Y, le Dernier Homme possède un potentiel certain qu'elle se refuse d'exploiter pour le moment, préférant montrer qu'elle est aussi intéressante que n'importe quelle autre série post-apocalyptique. Le reste de la saison devra le prouver.

Les trois premiers épisodes de Y : le Dernier Homme sont disponibles sur Disney+, avec un épisode diffusé chaque semaine.

 

affiche

Tout savoir sur Y, le Dernier Homme

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commentaires
mohamed
31/10/2021 à 00:41

ca aurait pu être super, mais c'est nul à chier.

Etonné
18/10/2021 à 10:23

Très barbant, très simpliste, trop ouvertement politique, j'ai peine à croire que la BD soit culte, ou alors l'adaptation est vraiment foireuse...

neuneu
23/09/2021 à 11:35

Regardé les 3 premiers épisodes et franchement ça casse pas trois pattes à un canard. J'ai failli arrêter au premier tellement l'exposition des persos est chiante à mourir. C'est vraiment trop convenu et déjà vu, archi vu. Pas sûr de continuer, même après le cliffhanger du dernier. Bof, bof.

Sanker
23/09/2021 à 07:43

L adaptation est à chier, mais le pire c'est le personnage de Yorik, je veux dire rasez sa putain de barbe putain et arrete de te mettre dans des situation de merde à chaque fois, c'est pas possible d etre aussi con niveau écriture, dans les comics il était déjà assez insupportable mais la ils ont réussi à faire pire


23/09/2021 à 00:21

@A Coffin Ça ne m'étonne guère, encore un truc progressiste made in Disney...

A Coffin
22/09/2021 à 18:22

J'adore cette série.