Minx : critique super-phallique sur OCS

Porno à gogo

À Los Angeles, dans les années 70, alors que les étals des kiosquiers sont envahis par les magazines pornographiques et que le patriarcat est enraciné dans la société, Joyce, une journaliste ambitieuse, veut lancer un magazine bien différent, une revue féministe. Après des années de travail et une pelletée de refus, la revue sur l'émancipation des femmes va finalement voir le jour grâce à Doug, le seigneur du porno. Pour écrire sur ces sujets révolutionnaires, et "faire passer la pilule", Joyce accepte donc de dissimuler ses idées sous une couverture sexy pensée pour plaire à toutes les femmes. Le magazine “The matriarchy awakens” s'appellera finalement "Minx" et des hommes y poseront nus.

Des films et des séries sur l'industrie du porno, il en existe déjà plusieurs, mais Minx parle d’une pornographie différente, une pornographie destinée aux femmes où ce sont les hommes qui font tomber le haut... et aussi le bas. Ainsi, la série renverse les codes et les hommes deviennent à leur tour des objets de désir, utilisés pour leur physique, réduit à leur sexe et l’effet qu’ils peuvent produire sur le sexe opposé.

Toujours sortir couvert

Minx nous embarque donc au cœur d'une industrie florissante, au sein des "Éditions Fourre-tout" où personne ne s'étonne de voir passer une femme nue dans le bureau, où les équipes réfléchissent à la meilleure façon d'attirer le regard masculin et où les tétons sont maquillés pour mieux ressortir sur le papier.

Cette époque féconde de la presse écrite est une toile de fond pour aborder l’éveil féministe de cette époque et le début d’une prise de conscience collective sur l’émancipation des femmes. Tout ça dans une ambiance des années 70 aussi électrique qu'esthétique, qui réjouira d'ailleurs les fans de mode.

Le duo qui va révolutionner le porno

The Matriarchy Awakens

Le porno vu à travers le regard de personnages féminins, c’est déjà un sujet en soi, mais Minx nous parle du porno pensé par des femmes, pour des femmes, tout ça sous le regard de la showrunneuse Ellen Rapoport, et d'une majorité de réalisatrices et de scénaristes. En plus du personnage principal, une féministe revendiquée et journaliste éduquée, d'autres femmes bien différentes apportent leur expertise. Bambi, la mannequin qui pose nue, et Shelly, la mère au foyer, sont des personnages tout aussi importants et tout aussi féministes.

Joyce veut écrire sur le féminisme, le patriarcat, l’écart salarial, le harcèlement sexuel, des sujets avant-gardistes pour l'époque et donc difficiles à mettre en avant dans un magazine, mais aussi, et surtout, des sujets qui résonnent avec l’actualité.

Le scandale Minx

Ainsi, Minx soulève des questions sur le féminisme et le patriarcat pertinentes dans le contexte de la série, mais aussi dans notre contexte de spectateurs. Le porno peut-il être féministe ? Est-il féministe de photographier des hommes nus comme on photographie les femmes et de les réduire à leur corps ? Et de recruter des hommes sur leur physique et l’apparence de leur sexe ? Des questionnements qui font évidemment écho à notre époque et aux problématiques soulevées notamment par la banalisation des réseaux sociaux et des contenus érotiques et pornographiques.

Tous ces questionnements s'appliquent aussi à la série en elle-même, à l'intérêt de sa production. Est-il féministe de filmer des sexes masculins en gros plans ? Sans jamais être moralisatrice, Minx s'interroge sur sa propre entreprise en proposant plusieurs points de vue et plusieurs réponses.

Femmes de leur temps

Plus c'est court...

En plus de son propos, Minx séduit grâce à sa forme, de la mise en scène et la construction même des épisodes. Avec ses épisodes courts, la série arrive à trouver le rythme parfait. Tout en suivant la production du magazine, de sa conception à sa réception en passant par son impression et sa distribution, chaque épisode soulève un problème. Un acteur de la production du magazine qui lâche le projet, la mairie qui s'oppose, une manifestation anti-Minx, toutes ces embûches sont souvent réglées à la fin de chaque épisode. Ainsi, la série ne se perd pas dans des divagations inutiles et n'oublie jamais le cœur de son histoire.

Minx a trouvé la parfaite balance entre son intrigue principale et ses sous-intrigues, notamment dédiées aux personnages secondaires, et ce n'est pas une chose très courante. La série accorde à tous les personnages leur moment de gloire. En plus du duo principal formé par le roi du porno et la féministe affirmée, une association déjà savoureuse, tout le casting est absolument remarquable.

Un casting en or

Le binôme formé par la mère au foyer et la mannequin décomplexée est aussi intéressant pour ce qu'il raconte de l'époque que pour la performance des deux actrices, Lennon Parham et Jessica Lowe. C'est en opposant des personnages issus de différents milieux et aux choix de vie diamétralement opposés que la série arrive à développer autant, et avec pertinence, son sujet.

Pour couronner le tout, l'absence de rapprochement amoureux entre les deux personnages principaux vient encore une fois prouver l'intelligence des scénaristes de Minx. C’est drôle, rythmé, osé et tout se tient si bien en une saison que Minx aurait pu être une mini-série. On espère donc que la deuxième saison ne viendra pas noircir le tableau et qu'elle se révèlera aussi jouissive que la première.

Minx est disponible en intégralité sur OCS depuis le 18 avril 2023 en France