Parallèles : critique du Stranger Things à la française de Disney+

Chloé Chahnamian | 25 mars 2022 - MAJ : 28/03/2022 12:05
Chloé Chahnamian | 25 mars 2022 - MAJ : 28/03/2022 12:05

Disney+, en pleine conquête du marché français, s'est lancé un défi : réaliser une série de genre pour adolescents, et ça donne Parallèles. Créée par Quoc Dang Tran, scénariste adepte des séries télévisées (Le Bureau des légendesDix pour centMarianne), la série compte quelques têtes d'affiche comme Naidra Ayadi (Polisse), Guillaume Labbé (Plan Cœur) et Gil Alma (Dix pour cent). Des ados, des voyages interdimensionnels, des retours vers le futur, le programme est bien chargé. Mais qu'est ce que ça vaut ? Attention mini-spoilers !

De retour vers le futur

Parallèles est une série ambitieuse sur le papier, déjà parce que les séries de genre sont rares en France, et parce que ses thèmes, même s'ils sont tendances, sont associés à toute une tradition du cinéma de science-fiction. C'est l'histoire de quatre amis, Sam, son frère Victor, Romane et Bilal, qui, pour fêter l'anniversaire de ce dernier, se rendent dans un bunker aménagé par leurs soins. Sauf qu'au moment du baiser tant attendu entre Sam et Romane, une catastrophe se produit. Du côté de Romane, Sam a disparu, et de son côté à lui, Romane a disparu. Ils se retrouvent tous les deux dans deux dimensions différentes avec à leurs côtés l'un des deux autres amis.

Un groupe de jeunes qui voyage dans le temps et se retrouve dans des dimensions différentes, on peut dire que Disney nous sert là du réchauffé. Pour sa deuxième série originale française, la plateforme a décidé de miser sur ce qui marche sans prendre plus de risques qu'il n'en fallait, même s'il faut admettre que lancer une série de genre est déjà un pari en France. Et évidemment, Disney vise sa cible en plein cœur, puisque la série parle d'ados et s'adresse... aux ados (tout en cherchant à conserver son statut d'oeuvre familiale évidemment, on est sur Disney après tout).

 

Parallèles : Photo Thomas Chomel, Maxime Bergeron, Victoria Eber, Timoté RigaultMais à qui appartient ce bunker ?

 

Parallèles reprend donc beaucoup de codes du genre (adolescents, réacteur nucléaire) et se focalise surtout sur la référence adolescente fantastique/SF de ces dernières années : Stranger Things. Comme dans la série à succès du concurrent Netflix, notre groupe d'adolescents est constitué d'une seule fille face à plusieurs garçons, la maman d'un des disparus va tomber sous le charme de l'enquêteur et surtout, la séquence du passage vers l'autre dimension est très ressemblante. Quand l'anomalie a lieu, les quatre jeunes sont dans une pièce décorée de guirlandes lumineuses, un élément de décoration associé depuis à Stranger Things.

L'idée est donc amusante aux premiers abords, mais clairement un peu trop facile pour la série. Non seulement cette référence n'apporte rien visuellement, mais elle semble surtout servir de prétexte pour appâter les spectateurs qui trouveraient dans la bande-annonce une ressemblance avec la série américaine. Heureusement, la série des frères Duffer n'est pas la seule référence utilisée par Parallèles.

  

Parallèles : Photo Guillaume Labbé, Naidra AyadiEt l'enquêteur barbu tombe sous le charme de la maman en détresse...

 

"C'EST BIEN POUR DU CINÉMA FRANÇAIS"

On y retrouve, logiquement, une pointe de Retour vers le futur, d'ailleurs cité par le personnage de la mère scientifique : "Vous avez vu Retour vers le futur ? Bon bah je vous spoil, c'est méga dangereux, ok ?". Et puis il y a le joli clin d'oeil à The Leftovers puisque, dans la série française, les disparus d'un monde sont les restants d'un autre monde et vice-versa et que les personnages doivent apprendre à vivre sans réponses. Certes, la série se déroule seulement sur quelques jours, un temps bien trop restreint pour creuser les répercussions des différentes disparitions, mais si on peut regretter la brièveté du propos, l'idée est là.

Et au niveau de la mise en scène Parallèles tente plutôt bien de leur faire honneur. Soigné et maitrisé, l'aspect visuel est très largement à la hauteur et on sent que Disney n'a pas trop lésiné sur le budget. En effet, même si la série est esthétiquement simple, aucun plan n'est bâclé. Par exemple, l'idée formelle de retourner la caméra quand on change de dimension permet de comprendre simplement, mais efficacement le changement de perspective. Et les bonnes idées se poursuivent du côté de la direction artistique, la série ayant choisi de faire jouer d'autres acteurs pour les versions plus âgées des adolescents et donc de nous épargner un vieillissement au maquillage ou pire, en version numérique.

 

Parallèles : Photo Thomas Chomel, Naidra Ayadi, Omar Mebrouk, Jade Pedri, Jules Houplain"Bon, c'est le bordel"

 

Visuellement, la série est donc plus que plaisante et elle commence d'ailleurs de manière très convaincante du côté scénaristique également. Le pilote de Parallèles remplit sa mission en posant des bases solides pour la suite. Les quatre personnages principaux sont décrits et montrés dans leur environnement, l'un a une maman cool, un autre a des parents stricts... des caractéristiques assez classiques en somme, mais nécessaires à la compréhension de la suite. Le fait que le point de bascule ait lieu à la fin du premier épisode est une bonne chose, surtout pour une série de seulement six épisodes.

Le format du cliffhanger à chaque fin d'épisode tout au long de la saison est un peu classique, mais ne dessert pas la série, voire, au contraire, la rend assez palpitante. Sauf que le rythme très soutenu ne laisse aucune place aux temps calmes et on le regrette assez vite. Malgré ce manque de pauses, on arrive tout de même à creuser la surface des personnages pour la plupart bien écrits et à ressentir de l'émotion, mais celle-ci est bien trop vite laissée pour compte au profit d'un nouvel élément d'action. Pourtant, on parle ici d'enfants disparus, de culpabilité et de la peur de la mort, des thèmes qui, par essence, prêtent à l'émotion et tristement, la série semble vouloir nous empêcher de nous émouvoir trop longtemps. 

 

Parallèles : Photo Thomas Chomel, Victoria Eber, Omar MebroukQuand ton meilleur pote et ta meuf ont pris 10 ans et que toi tu n’as pas changé

  

LOST IN TIME 

C'est là que Parallèles coince puisque son gros problème se trouve en fait dans son écriture. Six épisodes pour parler d'autant de choses, c'est beaucoup trop peu. Quand, à la fin du troisième épisode, les adolescents arrivent à se retrouver, il n'en reste que trois pour que les plus vieux arrivent à redevenir jeunes, pour que le jeune qui a mal tourné se rende compte de sa bêtise, pour stimuler la mémoire de celui qui détient la clé de l'histoire... Le scénario, palpitant, car complexe, se retrouve au final submergé, car on ne lui laisse pas assez de temps

On comprend alors que la fin sera frustrante, car au fil des épisodes, des intrigues sont laissées de côté et oubliées. Ainsi, on recense de nombreux trous scénaristiques tout au long de la série, et le spectateur n'obtiendra jamais de réponses sur plusieurs pistes lancées : quid de cet enfant disparu dans des conditions similaires en début de série, dont personne ne se souciera plus ? Pourquoi et comment deux des adolescents se sont retrouvés avec des pouvoirs ?

 

Parallèles : Photo Thomas Chomel, Victoria Eber, Timoté RigaultPas de sourire forcé du tout

 

Au final, Parallèles laisse un sentiment de déjà vu. À vouloir trop en faire, la série se perd dans ses intrigues et nous perd aussi au passage. Même si un voyage dans le temps ne doit pas forcément inclure un sauvetage de planète, leur voyage à eux n'aura servi... à rien. On ne sait d'ailleurs pas non plus ce qui a provoqué ce passage à travers les dimensions, malgré un beau schéma érigé par la mère scientifique. Et quand, à la fin, on nous laisse croire qu'ils ont tout oublié, une idée intéressante, car audacieuse, un effet madeleine de Proust fait revenir tous leurs souvenirs et tease d'une manière un peu grossière une deuxième saison. Dommage.

Parallèles est disponible en intégralité sur Disney+ depuis le 23 mars 2022

 

Parallèles : affiche

Résumé

Si la série s'engouffre dans un scénario trop compliqué et laisse beaucoup de questions en suspend, Parallèles reste un ovni dans le panorama français : une teen série de science-fiction. Malgré tout, le suspense est plutôt au rendez-vous et les bonnes prestations des acteurs ne sont pas négligeables.

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Lecteurs

(1.9)

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commentaires
Joko
23/02/2024 à 15:50

Ni fait, ni à faire. Dialogues, jeu d'acteur, musique désespérants de médiocrité. Si vous entendez des ados parler comme ça entre eux, faites-moi signe :) La scène d'anniversaire du premier épisode est lunaire. Dans un genre différent (dystopie), je conseille la série belgo-néerlandaise Arcadia. Ne serait-ce que pour mesurer le gouffre qu'il peut y avoir entre une série bien écrite et le néant...

Oliviou
04/04/2022 à 22:49

C'est atroce, ce machin. J'ai tenu péniblement deux épisodes, et dans le deuxième il ne se passe à peu près... rien. Comme dans la première moitié du premier épisode, d'ailleurs.
On dirait "Hélène et les garçons découvrent la science fiction". La plupart des comédiens sont soit mauvais soit mal dirigés (je ne voudrais vexer personne), à tel point que quand Naidra Ayadi et / ou Guillaume Labbé sont a l'écran, on sent comme un soulagement : enfin des acteurs qui jouent bien, enfin des vrais personnages !
Les dialogues sont vraiment écrits par des enfants, l'ambiance est inexistante, les caractérisations des personnages sont grossières, chaque plan "intéressant" est simplement une copie d'un plan qu'on a déjà vu chez Amblin...
Ce n'est pas écrit pour les ados, mais pour les pré-ados, et encore, ceux qui ne sont pas trop exigeants.

Benasi
26/03/2022 à 19:47

Comme Dark mais en moins bien. Je vais cependant continuer car c'est un peu plus léger
.

Paflechien59
26/03/2022 à 11:22

Cette affiche me fait étrangement pensé à celle d'un Harry Potter (pas vu la série et pas envie)


26/03/2022 à 00:19

Ok, certains personnages sont assez caricaturaux mais le rythme est soutenu et on s'ennuie pas.
Par contre, ça lorgne plutôt sur Dark, pas Stranger Things.

Noxonweb
25/03/2022 à 22:30

3 étoiles à ce "truc" ?

C'est d'un niveau à définir, ni bon, ni mauvais, juste "rien".

Sans déconner, c'est quoi le projet à la base ? Y'a une scène post-générique ou Navarro, Julie Lescaut et Mimie Mathy se font un poker ?

Série TF1/M6 --> mêmes cadrages, même photo, mêmes découpages, mêmes intrigues secondaires: houlalaaaaa le paternel qui est dur, la mère célibataire qui se fait déglinguer par un abruti joueur de poker, le flic naze à la Besson qui veut déboiter le caisson de l'autre mère célibataire.

C'est du "rien" alors qu'il y a une matière en or et un énorme "big up" pour les acteurs/actrices jeunes adultes, Maxime Bergeron & Victoria Eber en tête.

Passez votre chemin sur cette étron.

Tesla Kusturica
25/03/2022 à 19:29

"beaucoup trop peu" ?

Mad
25/03/2022 à 13:46

Pas pu passer le premier épisode. Je fais pourtant partie des défenseurs des productions de genre françaises et je ne comprends jamais vraiment la légende urbaine qui dit que la France est incapable de ça. C'est faux. En revanche pour Parallèles j'ai trouvé le premier épisode extrêmement mal joué, par des acteurs enfants mauvais et des écritures de personnages totalement clichés, à partir du moment où j'ai entendu les musiques superficielles de radio qui accompagnaient des scènes, le repaire irréaliste des jeunes super bien meublé et la relation de l'enfant génie avec ses deux parents riches et horribles avec, j'ai su que j'étais face à une sorte de roman pour adolescents écrit par une ménagère regrettant ses jeunes années. Tout est vu et revu et l'écriture est fainéante et lisse. On est loin d'un OVNI(s) ou d'un Zone Blanche et l'excuse du public familial n'excuse en rien la faiblesse d'écriture et d'acting. C'est infâme. Une coquille vide.

Tom34
25/03/2022 à 11:56

Une bonne surprise cette serie.

Et ça n'a absolument rien à voir avec Stranger Things.

Mister devil jc
25/03/2022 à 11:31

Ça a l'air sympa comme serie vu votre critique, ca me donne envie de m'y mettre,en plus, comme vous l'avez dit dans votre article, c'est une série de genre française, chose qui est extrêmement rare,et rien que cela, ca suffit à piquer ma curiosité

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