Undone : la série Amazon Prime qui va vous retourner le cerveau

Christophe Foltzer | 21 septembre 2019 - MAJ : 09/03/2021 15:58
Christophe Foltzer | 21 septembre 2019 - MAJ : 09/03/2021 15:58

Avec la profusion de nouvelles séries toutes les semaines, il devient diffcile de faire un choix et clairement impossible de tout voir. Or, il arrive parfois qu'une oeuvre nous fasse de l'oeil sans qu'on ne sache trop pourquoi. Et, généralement, dans ces cas-là, il faut savoir suivre son instinct. C'est comme ça qu'Undone, nouvelle série Amazon Prime portée par Rosa Salazar et Bob Odenkirk.

SCHIZO FREINE

On ne peut pas dire que la promotion d'Undone ait été ultra-prévente ou grandiloquente. Au contraire, mis à part un ou deux trailers bien alléchants, la nouvelle série des créateurs de BoJack Horseman l'a joué plutôt discrète jusqu'à sa publication le 13 septembre dernier sur la plateforme Amazon Prime. Manque de confiance du network ou stratagème pour conserver l'effet de surprise ? On espère qu'il s'agit de la seconde option tant, à sa vision, Undone est un véritable petit choc.

 

photo UndoneAlma, une femme perturbée

 

Déjà, sur le strict plan visuel, la série adopte un parti-pris plutôt audacieux, en optant pour l'animation en rotoscoping, à l'image de A Scanner Darkly de Richard Linklater en son temps, mais de façon beaucoup plus aboutie évidemment. Et d'ailleurs, la filiation avec ce film n'est pas anodine tant on a l'impression d'évoluer dans l'univers de Philip K. Dick. Science-fiction, drame humain et paranoïa, Undone compile les grands thèmes de l'écrivain tout en parvenant facilement à se forger sa propre identité, à trouver son propre tempo.

Tout au long des huit épisodes de la série, nous suivons donc les aventures hallucinées d'Alma, jeune trentenaire instable qui a subi un terrible accident de voiture. Lors de son rétablissement, elle commence à expérimenter des phénomènes étranges, tout autant qu'à voir son père, mort dans des circonstances mystérieuses vingt ans plus tôt, qui lui demande de remonter le temps pour le sauver. À partir de ce moment, Alma va devoir s'entrainer à dériver tout en veillant à ne pas perdre pied avec la réalité, dans une quête dont le fondement même n'est pas avéré.

 

photo UndoneUn père qui ne devrait pas être là

 

DEUX MOI

On le voit, Undone évolue en terrain connu pour qui a déjà lu Ubik de Philip K. Dick par exemple. Un protagoniste principal, en état de quasi semi-vie, perdu entre fantasme et réalité et qui a bien du mal à faire la part des choses. Pourtant, résumer la série à ce seul gimmick serait incroyablement réducteur puisque Undone vise un tout autre projet.

Il est bien question de traumatisme, de résilience voire de transgénérationnel dans cette série. D'ailleurs, elle met un point d'honneur à enraciner ses personnages dans des liens profonds avec leurs ancêtres perdus qui, à leur manière, influeraient toujours sur notre quotidien, même si on ne s'en souvient pas.

 

photo UndoneOui, c'est assez perché

 

De ce fait, la série aborde des thèmes passionnants, riches et complexes qu'elle parvient à rendre simples et cohérents au prix de certains raccourcis scénaristiques malheureusement, imposés par son format de 8 épisodes de 23 minutes.

Ainsi, la dernière partie de l'histoire risque d'en décevoir quelques-uns par son approche un peu plus scolaire et démonstrative que le reste de son traitement de l'histoire, admirable de maitrise, de complexité et abordant sans détour des thèmes un peu brumeux pour les esprits les plus cartésiens. Avec sa fin ouverte et certains enjeux encore en suspend, Undone se rattrape in extremis en nous rappelant que rien n'est jamais aussi simple et conventionnel que ce que l'on en dit.

C'est d'ailleurs sur ce terrain que la série trouve son plus gros point fort. Dans cette facilité à mettre à mal nos certitudes cartésiennes tout en ne nous obligeant jamais à adopter un seul point de vue sur les événements. C'est en cela que l'approche quantique fonctionne, dans le fait que l'on peut comprendre la série un peu comme on le souhaite, au gré des sensibilités de chacun. Voyage mystique pour certains, étude de la schizophrénie pour d'autres, Undone n'impose jamais une réponse à son spectateur même si la théorie de la maladie mentale et héréditaire semble prendre le pas sur la fin. Encore que...

 

photo UndoneEt ce n’est rien de le dire...

 

RÉALITÉ PARTICULAIRE

Sur le plan technique, Undone impressionne tout autant qu'il perturbe à certains moments. Le choix du rotoscoping nous amène dans cet état de réalité modifiée, si familière et pourtant terriblement étrange, accentuant les expressions et les émotions de chacun des comédiens, donnant à l'ensemble un côté léché tout autant qu'abrupt et grossier à certains moments.

On peut saluer par contre les délires visuels, moins fréquents qu'escomptés au départ, les transitions ingénieuses et impressionnantes qui justifient totalement le recours à l'animation tant elles auraient été impossibles à réaliser en prises de vue réelles. Mais ce choix a aussi un prix puisque la mise en scène en fait les frais.

 

photo UndoneLe changement, c'est maintenant ?

 

Dynamique et puissante dans les moments les plus perchés, elle se fait posée et académique dans les phases de dialogue. N'osant pas sortir de valeurs de plans scolaires et menaçant parfois la série d'une certaine artificialité formelle. C'est bien simple, dans ses instants les plus faibles, Undone nous donne l'impression de voir un vieux jeu vidéo en Full Motion Video à la The 7th Guest avec ses personnages animés sur fond vert et qui interprètent une scène de manière figée pour ne pas dépasser des marques au sol.

Si cela est principalement présent dans la seconde partie de la série, il n'en résulte cependant rien de rédhibitoire ou de dramatique sur l'ensemble. Juste une petite gêne de temps à autre.

Saluons aussi la performance des comédiens, Rosa Salazar et Bob Odenkirk en tête, parfaits d'ambiguïté dans leurs rôles de fille et de père spectral. Mis à part les enfants, toute la distribution est à la hauteur et un grand élan de sympathie et d'empathie se crée envers eux, preuve que le pari est, au final, plus que gagné.

 

photo UndoneGarder les pieds sur terre, coûte que coûte

 

DANS QUEL ÉTAT J'ÈRE

Il y a quelque chose d'éminemment troublant et fascinant qui se produit à la vision d'Undone. De par ses thématiques rarement traitées sur un écran de télévision, son traitement atypique et audacieux, quoique perfectible. C'est surtout dans son aventure humaine que la série touche le plus. Car, en confrontant la conscience modifiée d'Alma et son besoin d'intégration dans le quotidien, Undone arrive à un entre-deux particulièrement dérangeant et hypnotique.

Ces zones de gris de la conscience humaine qui nous font nous dire que le monde ne se limite pas qu'à notre perception du Réel et que d'autres dimensions intérieures existent. Tout en mettant cette approche en porte-à-faux avec les contingences matérielles (et matérialistes) de l'existence. À quel moment sommes-nous considérés comme malades par notre entourage ? À quel moment perd-on pied ? Est-ce seulement la vérité ? Autant de questions que la série traite sans jamais donner un avis définitif, comme pour nous dire que le questionnement est personnel et que le voyage est loin d'être terminé.

 

photo UndonePrêts pour un grand voyage ?

 

Résumé

Malgré de nombreux défauts, Undone trouble et fascine par la puissance de son propos, la radicalité de son parti-pris artistique et l'implication totale de ses comédiens. On aimerait en voir plus tant le format est réducteur. En tout cas, avec cette série, Amazon Prime vient de marquer de gros points dans la course qui l'oppose à Netflix.

Newsletter Ecranlarge
Recevez chaque jour les news, critiques et dossiers essentiels d'Écran Large.

Lecteurs

(0.5)

Votre note ?

commentaires
picass sensei
26/11/2019 à 10:25

Hate de voir la saison 2

Gilk
29/09/2019 à 18:09

Un OVNI. Magnifique de bout en bout. Tout m'a sédiut dans cette série . Son originalité, les personnages, les graphismes la musique.

Slaine
22/09/2019 à 06:33

Critique intéressante. ..en ce qui me concerne l après épisode 5 redevient classique et assez poussif..d ou la sensation d une première saison qui n'a pas poussé le concept aussi loin que prévu.
Assez d'accord sur la partie technique...un réel plus dans les scènes oniriques, mais aussi plus classique voire faiblard dans le quotidien des personnages
Pas forcément un petit bijou d animation mais une série originale et qui mérite le coup d oeil.
J attends encore la grosse claque d'Amazon pour ma part.

Ninja
21/09/2019 à 19:20

Excellente série ! Ca faisait longtemps que je n'avais pas vu une aussi bonne série fantastique !

Cacouac
21/09/2019 à 16:11

Toujours cette incapacité à être mesuré....
Peut-être que Netflix a plus de séries nulles à son catalogue pour la seule raison qu'ils produisent beaucoup plus.
Il faut peut-être arrêter de ne regarder que le pire !

Pour avoir les deux abonnements, Amazon a également son lot de productions honteuses. En plus d'avoir un site et des applications totalement à la ramasse.

Sergio
21/09/2019 à 14:34

Superbe série !
Ça m’a rappelé Michel Gondry ou Terry Gilliam.
En plus, l’histoire est fini au bout des 8 épisodes.

Cyrias
21/09/2019 à 13:42

L'heure est grave pour Netflix qui enchaîne les productions d'une nullité affligeante (The I-Land, Another Life,...) alors que Amazon sort des séries de qualité (The Boys, Carnival Row et Undone).
La quantité pour Netflix, la qualité pour Amazon

Pray for amazon.
21/09/2019 à 13:36

Je trouve aussi que Amazon a fait un gros bond en terme de qualité,niveau séries.
(Tout n'est pas parfait...mais il y a aussi plus de prises de risques,de mon point de vue)

Même le catalogue/choix me semble plus agréable,au final.

Pas mécontent d'avoir arrêté mon abonnement Netflix pour privilégier Amazon.


(Petit PS hors sujet pour ecranlarge. Personne,chez vous,regarde "Mr. Mercedes"? Je trouverai ça chouette de faire un petit dossier sur cette série. Un peu d'éclairage dessus ne ferait pas de mal tant la série est de qualité (et passée complètement inaperçu)

Ratara
21/09/2019 à 13:08

Peut on aujourd'hui affirmer que les séries Amazon sont largement de meilleur qualité que celle de Netflix qui est un nid de nullité bas de gamme ? Netflix le choix de la quantité sur la qualité

Pseudo
21/09/2019 à 13:01

Pas du tout intéressé

Plus
votre commentaire