Oppenheimer : Christopher Nolan répond aux critiques et pourquoi il n'a pas montré Hiroshima

Elise Moreau | 24 octobre 2023 - MAJ : 24/10/2023 12:34
Elise Moreau | 24 octobre 2023 - MAJ : 24/10/2023 12:34

Christopher Nolan a répondu aux critiques et expliqué pourquoi on ne voit pas le point de vue des Japonais dans Oppenheimer

Oppenheimer, dernier film en date de Christopher Nolan, a superbement performé au box-office, grâce au phénomène Barbenheimer. Il a rapporté 950 millions de dollars au box-office mondial et a su convaincre de nombreux spectateurs. Malgré tout, quelques critiques se font persistantes, notamment une en particulier : beaucoup reprochent au film de ne pas présenter le point de vue des Japonais, suite aux bombes lâchées sur Hiroshima et Nagasaki. Même le réalisateur Spike Lee a dit avoir du mal avec la fin d'Oppenheimer, précisément pour cette raison. 

Christopher Nolan a récemment passé un entretien d'une heure avec Kai Bird, le biographe ayant écrit le livre American Prometheus dont s'inspire le film de Christopher Nolan, dans le cadre du Leon Levy Center for Biography. Et forcément, il a répondu aux critiques au sujet de l'absence visuelle de l'impact des bombes d'Hiroshima et Nagasaki dans son biopic.

 

 

Une fin explosive

En effet, dans Oppenheimer, les deux attaques nucléaires des États-Unis sur le Japon sont reléguées en hors-champ pour mieux se concentrer sur les réactions du personnage d'Oppenheimer et des scientifiques américains. Ainsi, on ne voit jamais le point de vue des Japonais dans son film. Un choix que le réalisateur a donc expliqué :

"Si l'on se place du point de vue du scénario et que l'on s'inspire du livre dans une certaine mesure – parce que vous et [Martin J. Sherman] aviez déjà beaucoup écrit sur Hiroshima et Nagasaki en-dehors de la biographie d'Oppenheimer – et de ce qu'il a vécu et comment, une fois Trinity terminé, il s'est retrouvé d'une certaine façon, dans la même situation que le reste de l'Amérique. [...]

Il [Oppenheimer] a entendu parler du bombardement d'Hiroshima à la radio au moment où le président Truman l'a annoncé. C'est l'une des choses les plus remarquables que j'ai lues dans le livre et c'est l'un des éléments clés qui m'a incité à vouloir raconter l'histoire de la manière la plus subjective possible. Je voulais faire l'expérience des prises de conscience qui le traversent et faire en sorte que le public ressente la même chose, et je pense que c'est en grande partie de cette façon que le public a réagi.

 

Oppenheimer : photo, Cillian MurphyLes Ricains sont contents... mais quid du point de vue des Nippons ?

 

En tant que cinéaste, vous faites certains choix, et vous devez les faire avec le plus de force et de fermeté possible, et rendre vos intentions aussi claires que possible. Mais une fois qu'un film sort dans le monde, c'est au public d'en faire ce qu'il veut et d'en tirer l'expérience qu'il souhaite. [...] La vérité est que tout ce qui a trait au tournage et au montage, et tous les choix éditoriaux que vous faites au niveau technique concernent autant ce que vous ne montrez pas que ce que vous montrez."

Nolan a alors fait une comparaison avec les films d'horreur, qui fonctionnent mieux lorsque la source de peur est simplement suggérée selon lui. Et effectivement, que l'on soit d'accord avec Nolan ou non, la décision de rester concentré sur la psychologie du personnage éponyme rend Oppenheimer diablement efficace. L'horreur subie par les Japonais paraît particulièrement violente, puisque le film nous force à l'imaginer sans nous la montrer (ou alors très brièvement avec les visions du scientifique).

Oppenheimer confirme en tout cas plus que jamais l'importance de la suggestion dans l'art du cinéma. Et franchement, avec ça en tête, on serait curieux de voir ce que donnerait un film d'horreur avec Christopher Nolan aux commandes.

Tout savoir sur Oppenheimer

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commentaires
J0ne
09/01/2024 à 11:02

Je fais partie de ceux qui critiquent Nolan sur ce coup. Pas parce que je voulais qu'on montre le Japon, mais parce que je n'ai pas ressenti vraiment par son prisme l'horreur de la situation. On le voit incrédule, gênée des félicitations par la suite, mais voilà, c'est tout. Bon sang c'est la pire arme créé, les répercussions (évidemment au Japon mais aussi dans l'histoire et la politique) ont été énormes, et pour moi le film est passé à côté, on ne ressent rien de très fort par les plans réalisés, ce qui fait perdre à l'intérêt de ce film d'après moi.

Klent081
31/10/2023 à 17:18

C'est justement ce qui fait que cette partie nous touche ! Ne pas tomber dans la facilité de montrer les explosions là-bas et découvrir la nouvelle de la même façon qu'à l'époque : par la radio, par les journaux et rester dans ce flou et les réactions des gens.

Jul
29/10/2023 à 11:59

On en vient à devoir se justifier de la manière dont on a construit son film maintenant face à des pseudos critiques qui s'abritent derrière une seule remarque d'un réalisateur (polémique). L'art du cinéma face à la démagogie populiste du café du commerce.

Ianception
25/10/2023 à 17:37

Triste époque de devoir lire des pseudos a la c## et des copié collés a la c## d'un flooder qui n'a PEUT-ÊTRE lui-même rien compris au film

Rorov94m
25/10/2023 à 11:19

En 1992, le journal du cinéma période Isabelle Giordano; il demande à être interviewé que par des des journalistes noirs. Giordano a servie la soupe avec le sourire.

Rorov94m
25/10/2023 à 11:16

Spike Lee, réalisateur raciste, mysogine et antisémite...
Donneur de leçon "humaniste" malgré ses accointances avec la nation de l'islam, blm et autre fratrie bêta/kappa afro centriste...
Pour ce qui est du cinéma: sa version de MALCOM X est plus que litigieuse historiquement parlant ont est au niveau de véracité digne de BOHEMIAN RAPSODY, c'est dire... Exit la rencontre entre le leader afro- américain et le Big Boss du KKK dans un dîner pour préparer un exode vers l'Afrique.
Sans oublier son navet MIRACLE A SANTA ANNA qui font passer les soldats noirs de ce récit pour des héros alors qu'ils ont pillés et violés à tout de bras...
Je préfère l'honnêteté intellectuelle et la démarche artistique de Nolan.

pierrevinception
25/10/2023 à 10:51

Triste époque décidément… ceux qui se plaignent de ça n'ont rien compris de plus au film.

Hunter Arrow
25/10/2023 à 09:40

En 2023, des gens, qui plus est journalistes, découvrent la notion de point de vue.

Oui, quand on réalise, on écrit, on peint, on photographie, on fixe un point de vue. Oppenheimer a ce mérite de la cohérence de son parti pris (comme Dunkerque d'ailleurs). Il s'attache à celui de ses protagonistes et le conserve jusqu'à la fin. Filmer Hiroshima et Nagasaki aurait sorti le film de sa cohérence narrative.

sylvinception
24/10/2023 à 19:10

Triste époque décidément... de plus ceux qui se plaignent à propos de ça n'ont, de plus, rien compris au film

Hasgarn
24/10/2023 à 15:55

Je peste souvent contre Nolan et sa capacité surhumaine à complexifier les trucs simple.
Mais enfin, il faut reconnaître quand il laisse tomber cette manie et quand il est frontal avec son sujet. Il a rarement autant fait dans le sensitif.
C'est hyper cohérent de ne pas montrer ce qu'il s'est passé au Japon :
1 - ça évite le pathos
2 - le point de vue est celui de Oppenheimer
3 - son explication est hyper juste.

S'il avait montré les bombes et leurs effets, Nolan aurait versé dans le voyeurisme. Et je commence à croire que les détracteurs de ce manque en sont.

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