Disney dénonce la chronologie des médias et annule la sortie cinéma de Strange World en France

Axelle Vacher | 8 juin 2022 - MAJ : 08/06/2022 15:40
Axelle Vacher | 8 juin 2022 - MAJ : 08/06/2022 15:40

Dans un élan contestataire à l'encontre de la nouvelle chronologie des médias française, Disney a annoncé que Strange World ne sortira finalement pas au cinéma en France

Alors qu’une récente étude démontrait que, oui, n’en déplaise à certains qui affirmaient le contraire, les plateformes de streaming sont bel et bien en train de vampiriser les salles obscures, il semblerait que l'exploitation française ne soit décidément pas au bout de ses peines. De leur côté toutefois, les diverses plateformes fleurissantes sur le marché de la SVoD (dont Disney+) profitent allègrement d’un essor fulgurant, et séduisent un peu plus de consommateurs français chaque jour.

Un bouleversement conséquent du paysage audiovisuel que la chronologie des médias, fameux mécanisme organisant la diffusion de films selon plusieurs fenêtres à l’issue de leur exploitation en salles, fut bien obligé de prendre en compte afin de ne pas plonger tête la première dans les affres d’un archaïsme absolu.

 

Strange World : photoEn route pour... Disney+

 

Depuis la réforme de la chronologie des médias début 2022, les diverses fenêtres de diffusion sur différents supports se sont rapprochées, et ont permis ainsi le passage d’un film à la SVoD 15 à 17 mois seulement (contre 36 mois auparavant) après sa sortie en salles... sous couvert toutefois de s’engager à le retirer cinq mois plus tard afin de laisser aux chaînes de télévision gratuite l’exclusivité qui leur est garantie pendant 14 mois au bout de 22 mois. 

Un système dont les studios Disney ne semblent nullement amateurs, lesquels arguaient déjà en février dernier dans un communiqué à Deadline que ces nouveaux délais officiaient « à l’encontre de l’intérêt du consommateur, et n’établissaient, en aucun cas, un cadre équitable et proportionné entre les différents acteurs du paysage audiovisuel français ».

 

Strange World : photoDisney, perplexe face au système audiovisuel français

 

Une réforme jugée donc « frustrante » par Disney qui déplore ne pas avoir été suffisamment pris en compte en dépit, selon le studio, d’un investissement accru dans la création de contenu original français et de leur soutien à l’exploitation par le prisme des sorties en salles de leurs divers métrages. 

En conséquence, le studio à grandes oreilles a donc décidé de s’épargner davantage de désagréments en privant tout bonnement les cinémas français de son prochain film d’animation original. Tel que l’a communiqué l’un des porte-parole du studio à Deadline, le très anticipé Strange World (titré Avalonia, l'étrange voyage en français) sera donc uniquement accessible aux résidents de l’Hexagone via la plateforme Disney+ : 

 

Strange World : photo"Écoute la France, on aime ton cinéma, mais on veut plus de sous, okay ?"

 

« Strange World sera disponible à tous les abonnés de Disney+ en France, et prévaudra sur une sortie en salles. Si nous soutenons l’exploitation des salles françaises, ce que nous avons fait depuis plusieurs décennies déjà, cette nouvelle et encombrante chronologie des médias va à l’encontre du consommateur, et ignore comment les modes de consommation ont évolué, ce qui nous confronte à un risque accru de piratage. Nous continuerons de prendre des décisions au cas par cas pour chaque film en fonction des particularités de chaque marché. »

Un véritable coup dur pour les salles françaises, que justifie toutefois Hélène Etzi, la présidente de Disney France. Dans une déclaration faite aux Echos, cette dernière a ainsi appuyé la décision des studios : « C’est la conséquence de la chronologie des médias telle que pratiquée en France, que nous jugeons inéquitable, contraignante, et inadaptée aux attentes de nos audiences ».

S'il est amplement possible de reprocher à la chronologie des médias ses délais toujours trop longs à l'ère de l'immédiateté permanente, il y a toutefois fort à craindre que cet inquiétant coup de théâtre perdure dans le temps. Il pourrait d'ailleurs entraîner un sacré bouleversement pour les salles françaises et bien des métrages à venir. Buzz l'éclair sera donc peut-être le dernier film d'animation estampillé Disney (et Pixar) à sortir au cinéma en France, le 22 juin prochain, avant un long moment. Affaire à suivre...

Tout savoir sur Avalonia, l'étrange voyage

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commentaires
Laurent SFN
11/06/2022 à 16:57

J'ai cru comprendre que si Disney mettait plus de pognon pour la création européenne, ça pourrait s'arranger...

Mais le problème de fond est tout autre. La chronologie des médias, si elle a été instaurée pour de bonnes raisons, est devenue totalement caduque à l'heure de l'immédiateté, mais surtout semble à présent d'avantage taillée pour donner une grosse part de gâteau à Canal et aux chaînes linéaires que sauver la création. Tant que Disney veut juste marquer le coup pour un métrage qui s'annonçait mineur, ça passera, mais si ça se généralise à des gros block busters je ne suis pas certain que le cinéma "subventionné" sauvera les cinoches de la banqueroute.

Après tout cela reste dommage. Après un an et demie/deux ans de pandémie, cela reste très agréable de mater un film dans une grande salle avec du public. Quand au prix des places, faut voir d'avantage ça à présent comme une sortie (comme si tu allais à un concert ou au théâtre...) qu'un acte de la vie quotidienne.

Canadou
11/06/2022 à 13:25

Au delà du débat sur le prix du billet, qui a l'air de vous passionner, c'est la fenêtre d'exploitation accordé à Canal plus qui est remise en cause non ?

Sachant qu'on est nombreux ici à taper facilement sur le cinéma français, pour des bonnes/mauvaises raisons, pourquoi ne pas mettre cette problématique en avant ? Le cinéma français peut il survivre et prospérer sans canal + ? Quid de la politique de Boloré ? ou Pourquoi les réal qui font des flop critique et publique sont toujours financé ?

Sinon, exemple de prix du billet chez moi :

Mon village 4000 hab : 4.80 € mais jusqu’à 3 semaines d'attente pour un film

la grande ville 15000 hab : 6 € (8€ les AVP) 1 semaine d'attente après les date de sorti en moyenne

Les préfectures

40 000 hab : 7.50 € pour un cinéville

300 000 hab : 10.50 € pour un cineville aussi

après les Gaumonts et autre oui il se font plaisir mais FRANCHEMENT les villes ou ils ont le monopole sont rare voire inexistante donc j'ai du mal à croire les commentaire qui dise "nia nia c'est chère mais heu !!

Apres Paris OK mais vous vivez la bas de votre plein gré et les places était déjà a 15 boules la bas quand j'était môme donc bon...

Ankytos
11/06/2022 à 10:07

Certains commentaires laissent perplexes. S'intéresser au cinéma sans comprendre que la politique culturelle française a soutenu la création pour conserver un cinéma riche (oui, riche, même s'il connaît ses faiblesses) alors que tant d'autres pays n'ont pas réussi, c'est étrange. Les règles "contraignantes et archaïques " ont une utilité. Mais comme toujours certains on la position "c'est la tendance, Disney et géants du secteur sont plus forts, donc capitulons et laissons les faire ce qu'ils veulent et faire disparaître toute diversité créative". Et dire merci en plus ?

GTB
10/06/2022 à 18:15

@Thaiko> Pas mal d'âneries dans un message pourtant plutôt court. Le cinéma français assez pauvre? Ah bon? On a pourtant l'un des cinéma les plus riches (entendre diversifié) au monde (et reconnu dans le monde, il n'y a que les français qui dénigrent le cinéma fr). Le truc c'est que lorsqu'on veut parler du cinéma français, il est préférable de le regarder et le connaître. Or, beaucoup s'expriment sur la base des affiches qu'ils voient des comédies populaires, comme si c'était représentatif d'un cinéma français dont ils ignorent une grosse partie. Affiches qui m'amènent au second point...

"pour que les films français marchent il faut faire de bons films c'est tout...." On doit admettre ici une naïveté assez jolie. Malheureusement c'est pas du tout comme ça que ça marche. Jetez un œil au box-office et faites le constat. Des croutes qui cartonne, il y en a toute les semaines. D'excellents films qui se vautrent, il y en a toutes les semaines (et bien plus nombreux).

Thaiko
10/06/2022 à 16:55

La Chronologique des médias en France ce n'est pas pour les cinéma mais pour faire marcher les productions française... Le problème ? C'est que le cinéma Français est pauvre ce n'est que du "Copinage", Disney fait bien de dépoussiérer tout ça, pour que les films français marche il faut faire de bons films c'est tout....

Vinsseb
10/06/2022 à 13:11

Y a des gens qui regardent encore les pubs, pardon les films coupés tous les quart d'heures à la télé ? Normal que le producteur qui fait son film râle de devoir le retirer au bout de 5 mois de sa plate forme

Carlo
09/06/2022 à 23:01

On a pas tous les mêmes cinéma, par chez moi (13), pas de petites salles grand public, seulement le choix entre CGR et Pathé, c'est cher 10€ hors options ICE, ça fait 50€ en famille hors friandises et surtout les gens ne sont pas respectueux.
Alors on est passé à la VOD.

Laurent SFN
09/06/2022 à 21:08

@Eddie Felson. Je suis d'accord avec toi : délai de six mois entre sortie cinoche et svod. Et surtout qu'on arrête de privilégier les chaînes de TV. Demander aux plate formes de retirer leurs PROPRES productions pour qu'elles puissent passer le dimanche soir sur TF1 est absurde.

Eddie Felson
09/06/2022 à 20:37

@Laurentsfn
Et donc pour toi, sans chronologie des médias, si tous les films sortaient en simultané en salles et en svod ça ne tueraient pas l’exploitation en salles?!?!?
Je suis pour une fenêtre d’exploitation exclusive en salles plus courte, genre 4/5 mois, mais pas d’exclusivité synonyme d’arrêt de mort pour nos écrans larges!
Evitons de passer d’un extrème à l’autre et permettons à chacun d’exister.

Eddie Felson
09/06/2022 à 20:09

5,70€ la place en Multplex! Quel bol!… et avec un public respectueux!

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