George Clooney (Jeux de dupes)
Jeux de dupes a beau être le titre de son dernier film, George Clooney, lui, joue franc jeu. Après avoir évoqué sa nouvelle comédie romantique dans lequel il partage la vedette avec Renée Zellweger, l'acteur-réalisateur, démocrate convaincu, a profité de sa venue à Paris pour évoquer les causes qu'il défend activement.
Pourquoi
avez-vous choisi la comédie romantique pour votre nouveau film ?
Après Syriana et Good night and Good luck, on ne me
proposait que des scénarios très sérieux, avec des sujets politiques graves,
mais je ne voulais pas forcément être catalogué comme réalisateur engagé ou
réalisateur de film à thèse. J'ai donc sorti Jeux de dupes du placard et je lui ai redonné un coup de jeune ! Steven Soderbergh me l'avait envoyé en 1998 à l'époque où il
envisageait de réaliser le film lui-même. Mais, dans le script, Lexi ne bossait
pas, le jeune footballeur n'était pas un héros de guerre et mon personnage
était beaucoup plus jeune... Et puis, il n'y avait pas vraiment d'intrigue.
La forte présence du football américain risque de
déconcerter les amateurs de comédie romantique...
D'ordinaire, je n'aime pas et je ne veux pas faire de comédies
romantiques parce que je sais comment elles vont finir ou ce qui va se passer.
La seule façon de rendre le genre intéressant, c'est de le placer dans un
univers atypique comme le football américain. D'ailleurs pour moi ce n'est pas
un film sur le football américain mais sur des mecs qui se tapent dessus pour
savoir qui aura la fille !
Vous jouiez au
football enfant ?
Oui sans arrêt mais nous n'avions pas d'équipe. Je jouais au
baseball et au basket à l'école en revanche. Pour le rôle, j'étais à peu près
dans de bonnes conditions physiques car je joue encore au basket deux à trois
fois par semaine. Mais de toute façon, il n'y a pas de bonne façon de
s'entraîner à mon âge ! Vous pouvez avoir suivi le meilleur entraînement
du monde, ça ne change rien : quand vous vous prenez des coups, vous avez
du mal à vous en remettre et vous êtes bien sonné !
Le film se passe
dans les années 20. Vous semblez nostalgique de cette époque ?
J'adore
les « screwball comedies », les films de Preston Sturges et Howard
Hawks, et j'ai essayé de donner le même esprit au film, notamment dans la
relation qui se noue entre Renée et moi à l'écran. J'aimais aussi beaucoup la
mentalité sportive de l'époque. On vibrait dans les stades et on s'activait en
coulisses. Les matches étaient sponsorisés par des entrepreneurs locaux, ce qui
créait pas mal de conflits au niveau local. Tout n'était pas aussi figé
qu'aujourd'hui et même si je ne l'ai pas connue, j'ai la nostalgie de cette
époque où l'argent et les puissants ne dictaient pas encore leur loi.
Vous vous investissez dans de nombreuses causes. Vous
menez notamment campagne pour le Darfour et vous vous engagez aux côtés de
Barack Obama. Envisageriez-vous une carrière politique ?
Absolument pas ! J'ai grandi dans un milieu très
politique : mon père qui était journaliste à la télé a été candidat au
Congrès il y a quelques années, mon grand-père et ma mère étaient maires, et
quelques-uns de mes amis font de la politique... Mais tous les rendez-vous
« politiques » que je prends n'ont qu'un seul but : aider le
Darfour, et non me construire une carrière politique. Je m'intéresse beaucoup
aux problèmes actuels mais je ne suis pas aussi compétent pour les gérer que
mon ami Bernard Kouchner par exemple. J'admire beaucoup le travail qu'il a fait
pour le Darfour.
Vous êtes justement allé au Darfour pour filmer un
documentaire avec votre père Comment avez-vous vécu cette expérience ?
Quand vous avez passé du temps là-bas et que vous partez, tout le
monde vous dit : « Ne nous oublie pas ». Beaucoup d'occidentaux
vont au Darfour et font des promesses qu'ils ne tiennent pas. Lors de mon
dernier voyage, au moment de mon départ, une petite fille s'est approchée de
moi, m'a tiré par la manche et m'a demandé quand je reviendrai. Quand je lui ai
dit « bientôt », elle m'a répondu : « Vous dites toujours
ça ». Au Darfour, ils voient défiler des humanitaires ou des occidentaux
tout le temps mais beaucoup ne viennent que pour se donner bonne conscience.
Or, ce genre de causes doit être soutenu par de forts engagements personnels si
l'on veut que le peuple survive. Il ne faut pas oublier que la barbarie existe encore,
non loin de nos frontières, et qu'il faut la combattre à long terme.
Que pensez-vous
des prochains Jeux Olympiques à Pékin ?
Je suis allé en Chine il y a un an et demi avec deux athlètes
olympiques. J'en ai profité pour demander aux autorités chinoises d'arrêter de
vendre au Soudan les armes qui tuent les populations du Darfour.... Ils m'avaient
répondu qu'ils règleraient ça à leur manière, ce qui en d'autres termes voulait
dire qu'ils ne feraient rien. Mais aujourd'hui avec le Tibet et les massacres
qui se déroulent au quotidien, le problème prend de l'ampleur. Les médias
relaient l'information et la
Chine ne peut plus nier aussi facilement la situation. Quant
aux JO, je suis pour le boycott des deux cérémonies par les représentants des
gouvernements mais je suis contre le boycott par les athlètes. Ils sont là pour
la beauté du sport et il faut respecter cela.
Vous êtes parfois critiqué
pour vos prises de position aux Etats-Unis...
Je
suis un adulte et je ne suis pas idiot. Je sais ce que je fais. Quand je me
suis publiquement opposé à la guerre en Irak, certains m'ont qualifié de
traître. Mais j'assume pleinement. Je me bats pour ce que je crois être juste.