Adrien Brody (Hollywoodland)

Flavien Bellevue | 2 janvier 2007
Flavien Bellevue | 2 janvier 2007

Adrien Brody campe dans Hollywoodland un détective privé des années 50 qui enquête sur le meurtre de l'acteur George Reeves, célèbre en son temps pour avoir interprété Superman sur petit écran. Venu seul à Paris défendre le film, l'acteur oscarisé du Pianiste revient sur son expérience dans Hollywoodland, sa vision du cinéma et son industrie ainsi que ses choix d'acteurs lors d'une brève conférence de presse tenue dans un palace parisien.

 

Le fait que le film soit basé sur une histoire vraie a-t-il suscité chez vous une plus grande curiosité qu'à l'accoutumée ?
Non, pas forcément. Le scénario m'a avant tout interpellé par ses dialogues qui sont superbes. Il est vrai que l'histoire et cette réalité sont fascinantes mais j'ai été plus attiré par le personnage du détective privé et le Hollywood des années 50.

 

Quand on joue un détective privé des années 50, y a-t-il des références cinématographiques qui vous viennent aussitôt à l'esprit ?
Quand on joue ce genre de personnages à cette époque, on sait que l'image du privé était très forte. J'ai essayé approcher mon personnage, Louis Simo, de façon différente et surtout de ne pas le jouer comme les détectives de l'époque étaient interprétés au cinéma. Par exemple dans le film, il y a un moment où Simo est très affecté par la façon dont sont représentés les détectives privés au cinéma. Sans arrêt, Simo essaye d'être tel qu'il s'imagine que les personnages de détectives de cinéma sont. Il passe son temps à imiter ce style de vie parce que sa véritable vie est fort différente de celles de détectives célèbres joués par Humphrey Bogart par exemple. Le genre de détectives sombres, charismatiques mais dont on connaît très peu de choses au niveau personnel. Dans ce film, j'ai donc essayé de montrer que ce personnage était différent et j'ai surtout joué avec l'image du privé.

 

 

En parlant de références, est-ce qu'à vos yeux, Hollywoodland est plutôt marqué par les années 70 dans la manière désabusée de montrer un privé tel qu'on le voyait dans un film des années 70 ?
Oui, l'influence des films des années 70 est bien présente. C'est un choix du réalisateur, Allen Coulter, et moi même car nous voulions montrer cette transition qu'a connue l'Amérique à travers sa culture. Il y a une différence énorme entre le style de vie de Georges Reeves et celui de Louis Simo : le détective est beaucoup plus moderne même s'il représente d'avantage un homme des années 60-70 alors que l'histoire se passe à la fin des années 50. Visuellement, la vie de ces deux personnages est filmée différemment. Il y a une vision très marquée de montrer le changement de cette époque. Je crois que la vie de ces années là était tel que nous le montre ce réalisateur mais le style de vie montré par Hollywood à cette époque était très différent. J'aime le cinéma des années 70 pour ses héros qui étaient beaucoup plus sombres, plus vrais. Les acteurs avaient un jeu beaucoup plus réaliste.

 

Est-ce que le « Hollywood des secrets » de ces années-là fait toujours rêver ou est-ce qu'aujourd'hui les acteurs ne sont que des hommes d'affaires qui gèrent leur carrière ?
Je ne pense pas qu'Hollywoodland parle uniquement des acteurs ; il illustre le Hollywood de cette époque mais je pense qu'au fond c'est le même qu'aujourd'hui. Le thème principal du film est que les apparences sont parfois trompeuses. Je fais parti de cette industrie et j'ai pu voir ces deux aspects. D'un côté la vie d'un acteur qui se bat pour avoir un rôle et d'un autre côté, celle d'un acteur connu. Ce qui est le plus important c'est qu'à aucun moment, on voit l'acteur tel qu'il est, c'est toujours la perception des autres qui dominent aujourd'hui, c'est la nature même de ce business. La grande différence entre le Hollywood de l'époque et celui d'aujourd'hui, c'est qu'à l'époque, les studios exerçaient un véritable contrôle sur les acteurs. Sur leur vie, leur comportement, sur les médias auxquels ils autorisaient telle ou telle chose.... De nos jours le pouvoir des studios s'exerce aussi mais différemment. Un des thèmes du film est la nature de ce pouvoir.

 

 

Puisqu'il est question du poids des studios des années 50, vu que c'est un film Miramax, que pensez vous de gens comme Harvey Weinstein qui est un des derniers producteurs a avoir essayé d'instaurer un contrôle à Hollywood comme dans les années 50 ?
Il est vrai que Harvey Weinstein a un style tout à fait unique. Je pense que c'est très différent des studios des années 50 car Harvey maîtrise incroyablement bien l'art de la persuasion, ce n'était pas cela qu'on utilisait dans les années 50 mais plutôt la force. À l'époque, il n'y avait qu'un ou deux studios pour lesquels on pouvait travailler mais aujourd'hui c'est devenu tellement vaste qu'on ne peut plus comparer notre époque à celle des années 50.

 

Cette histoire raconte celle d'un acteur prisonnier d'un rôle à tel point qu'il n'est plus crédible dans un autre. Sans vouloir comparer le Superman de la série et Le pianiste, est-ce que lorsqu'on est un acteur oscarisé, on a n'a pas la peur d'être prisonnier d'un personnage à succès ?
Bien avant d'être oscarisé, j'étais toujours conscient du problème de l'acteur prisonnier d'un rôle. C'est toujours le dilemme d'un acteur soit parce qu'il est bon et qu'on lui donne toujours le même rôle, soit parce que le film est un tel succès planétaire qu'on l'identifie qu'à ce personnage. Après Le pianiste, certains pensaient que j'étais un acteur polonais. Une fois, mon père voyageait en avion et il regardait une pub du film dans un magazine. Son voisin lui dit que c'est un film génial avec un acteur polonais, mon père lui répond que je ne suis pas polonais mais son voisin insiste pour savoir comment il sait ça, ce à quoi mon père lui répond pudiquement qu'il suit avec attention les nouvelles d'Hollywood... (Rires) En ce qui me concerne, j'ai choisi délibérément d'être très versatile et de choisir des rôles chaque fois très divers. Ce n'est pas vraiment par peur d'être prisonnier du rôle mais plutôt par peur de m'ennuyer, pour garder un intérêt à ce que je fais. J'ai toujours abordé des rôles très différents et je veux continuer dans ce sens là. Le problème de George Reeves est que face au succès de Superman, il n'a pas pu faire d'autres rôles pour lesquels il aurait été fait.

 

 

Qu'avez vous ressenti lorsque le Superman de votre génération Christopher Reeve est mort ?
Bien sûr, j'ai pensé à lui mais quand c'est arrivé comme une ironie tragique. Tout dépend, comme je l'ai dit tout à l'heure, de notre perception des choses. Christopher Reeve était un acteur qui faisait ce qu'il aimait plus que tout au monde. Cette association immédiate qu'on faisait de lui à Superman, a résonné beaucoup plus en chacun de nous dû au succès du film. Il y a une coïncidence étrange et funeste que les deux Reeves ont interprété ce rôle et ont connu une fin tragique.

 

Conférence de presse suivie et retranscrite par Flavien Bellevue.

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