Christopher Smith (Creep)

Didier Verdurand | 21 avril 2005
Didier Verdurand | 21 avril 2005

Une jeune femme se perd dans le métro londonien et y trouve un monstre. Sur le papier, Creep pouvait faire peur mais pas forcément comme l'entendait son scénariste-réalisateur Christopher Smith. Au final, il nous livre une série B nerveuse qui laisse un très bon souvenir et rien que pour cette raison, se démarque de la majorité des productions du même genre, aussi vite oubliées que consommées. Cela valait bien le coup de poser quelques questions à un nouveau Mr. Smith !

Avez-vous visité différents métros pour faire votre choix, ou celui de Londres correspondait immédiatement au scénario parce qu'il est naturel dans cette ville de s'y endormir ivre mort ?
Il a toujours été dans mes intentions de poser cette histoire à Londres, sans pour autant penser à cette raison, mais votre remarque est très juste : personne ne sera choqué de voir une jeune fille bourrée s'endormir là-bas, cela arrive tous les soirs ! Plus sérieusement, j'ai choisi le métro londonien parce qu'il est très profond, à peu près l'équivalent d'un immeuble de vingt étages sous terre. Aussi parce qu'il est très vieux, sa construction datant du 19è siècle. Il en résulte une ambiance gothique au milieu de ces milliers de passages secrets, pièces et quais déserts, laissés tels quels depuis leur abandon. Pour moi, ce décor était idéal pour un film d'horreur.


Le budget est de 5 millions de dollars. Etait-ce suffisant pour mettre en image ce que vous aviez imaginé durant l'écriture ?
En effet le budget est assez bas. Pendant que j'écrivais le scénario, j'imaginais que j'avais un budget illimité parce que les compromis viennent plus tard, c'est ainsi que je travaille. Libre de toute restriction. Heureusement, il se trouve que rien ne semblait irréalisable avec le budget que nous avons finalement pu obtenir. L'argent supplémentaire m'aurait juste permis de gagner du temps supplémentaire, et là, j'avoue que je n'aurais pas craché dessus si j'avais pu disposer de semaines supplémentaires pour filmer. Mais je n'ai pas à me plaindre, tout s'est très bien passé.

Aviez-vous déjà en tête Franka Potente, très convaincante par ailleurs, ou deviez-vous engager une actrice allemande en raison de la coproduction avec l'Allemagne ?
Franka est la première comédienne à qui j'ai pensé. La coproduction est arrivée ensuite parce que je l'avais castée, donc elle s'est avérée être un bon choix à plusieurs niveaux ! Je ne voulais pas une britannique, je ne voulais pas faire en sorte que l'histoire paraisse réservée aux anglais mais qu'elle soit plus ouverte à d'autres nationalités. Des millions de gens viennent vivre à Londres et l'une de leurs premières émotions se traduit par le malaise qu'on peut ressentir dans le métro. De plus je voulais une actrice qui pouvait paraître assez coriace pour traverser toutes les épreuves que vit le personnage, et je trouve Franka parfaite, elle possède un mélange de dureté et de féminité qui convient parfaitement.


Avez-vous eu des problèmes avec la censure ?
Nous n'avons eu aucun problème bien qu'il y ait eu en Angleterre un avertissement en plus de l'interdiction au moins de 18 ans, spécifiant que le film « contient de fortes scènes à violence sanglante » ! J'en étais fier jusqu'à ce que je m'aperçoive que Irréversible en avait un autre, disant de « ne pas regarder si vous êtes fragile ». Je l'aurais préféré. Je ne sais pas quelle est l'interdiction en France, probablement aux moins de 16 ans, parce que vous êtes beaucoup moins coincés que nous.

Je suppose que, comme la plupart des petits films d'horreur qui ont du succès, Creep pourrait bien avoir une suite. Seriez-vous partant ?
Sans hésiter parce que le souterrain londonien regorge de secrets qu'il serait passionnant de découvrir. D'autant plus que cela nous donnerait l'occasion de rencontrer les frères et les sœurs de la créature… Je commence mon prochain film, Severance, le 8 juin et ce sera une comédie horrifique. Il sera plus gore, plus effrayant mais le tout sera saupoudré d'une bonne dose de rires. Le tournage aura lieu en Roumanie et tout ce que je peux vous dire pour le moment, c'est qu'il n'y aura pas de vampires.


Quel est le dernier film d'horreur que vous avez aimé ?
Il est français, il s'agit de Haute tension ! J'aime la simplicité de la première moitié. Un homme s'introduit dans votre maison et kidnappe votre amie. Mes films d'horreur préférés reposent sur des prémisses aussi simples. Je pense que les gens qui l'ont vu ont critiqué le twist final parce qu'il n'était pas nécessaire, ils étaient déjà à fond dans le film, et c'est tout à l'honneur de son réalisateur.

Il semble qu'avec Creep, Shaun of the dead et 28 jours plus tard, le cinéma d'horreur anglais se porte plutôt bien ! Il n'y a donc pas que les productions de Working Title qui plaisent !
Il y a en effet pas mal de réalisateurs qui veulent faire le nouveau Full Monty ou un autre Quatre mariages et un enterrement mais d'un autre côté, qui ne rêve pas d'un tel triomphe ? J'aimerais bien pouvoir écrire une comédie romantique à succès mais malheureusement mes pensées sont trop tordues et il se passerait rapidement quelque chose de dément. En tout cas, les réalisateurs que j'ai rencontrés durant l'année qui vient de s'écouler ne veulent pas aborder ce genre, ils ont des idées plus variées et originales. Les mentalités évoluent dans le bon sens. Qui aurait imaginé que le UK Film Council (l'équivalent anglais du CNC) donnerait son aval à un film comme Creep qui comporte une scène de torture de cinq minutes ? Dans quelques années, quand les gens penseront au cinéma anglais, des films d'horreur complètement tordus leur viendront tout de suite à l'esprit. Espérons-le !

Propos recueillis par Didier Verdurand.
Autoportrait ci-dessous de Christopher Smith.

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