Tango & Cash : oubliez Citizen Kane, c'est ça le cinéma, avec Stallone et Kurt Russell

Christophe Foltzer | 19 février 2023 - MAJ : 20/02/2023 11:18
Christophe Foltzer | 19 février 2023 - MAJ : 20/02/2023 11:18

On ne reparle jamais assez de Tango & Cash, avec Kurt Russell et Sylvester Stallone.

Pour certaines personnes de bon goût, voir Stallone et Kurt Russell au générique des Gardiens de la galaxie 2 a donné le sourire. Ils ne partagent aucune scène, mais le simple fait de les voir réunis dans un générique de fin a rappelé le bon souvenir de Tango & Cash, petit classique du début des années 90.

Modèle du buddy movie, Tango & Cash est né dans la douleur, a souvent été oublié et mésestimé. Et donc, on a toujours de bonnes raisons d'en reparler, pour dire à quel point c'est fantastique.

 

Tango & Cash : photo, Kurt Russell, Sylvester StalloneL'homme, édition 90s

 

RAMBO vs snake

Ray Tango et Gabriel Cash sont les deux meilleurs flics de Los Angeles et se battent avec acharnement pour dépasser l'autre. Tout les oppose : l'un boursicote et se fringue en costume Versace dans les beaux quartiers tandis que l'autre est plus à la cool, avec son jean et ses pizzas. Pourtant, ils énervent tous les deux au même point Yves Perret, qui veut se débarrasser d'eux avant un important arrivage.

Pas question de les éliminer cependant, cela en ferait des martyrs, il vaut mieux les discréditer. Lancés sur la même affaire, ils se font piéger et mettre en prison chez les droits communs. Obligés de s'allier pour survivre, ils vont devoir s'évader et retrouver les auteurs du traquenard pour redorer leur blason et être innocentés.

 

Photo Tango & CashVolte-Face

 

Les années 80, c'est l'âge d'or du buddy-movie façon Joel Silver, avec entre autres 48 heures, Le Flic de Beverly Hills, L'Arme fatale évidemment et aussi des teams un peu plus bizarres comme le légendaire Turner & Hooch. Autant dire que réunir devant la même caméra l'une des plus grosses stars d'action d'Hollywood et l'un des acteurs les plus sympathiques était une idée de génie. Une idée qui a fait saliver les producteurs Jon Peters et Peter Gruber qui ont réussi à réunir 55 millions de dollars pour se payer le packaging de leurs rêves.

Glorieux représentant des années 80, de yuppies et autres golden boys gavés par la pensée Reagan, Tango & Cash aborde donc son public avec un second degré jouissif qui contrebalance avec la faiblesse de ses grosses scènes d'action. C'est un véritable bonheur de voir Rambo et Snake Plissken se chercher des poux comme des gamins juste pour savoir "cékikidomine". Cela dit, en coulisses, le tableau n'est pas aussi rose.

 

Photo Tango & CashPluie d'enfer

 

"TU CONNAIS CAPITAINE COUILLE-MOLLE ?"

En effet, à l'époque, Sylvester Stallone a comme qui dirait quelques petits problèmes d'égo et se prend pas mal pour le roi du monde. Une image de soi qui aura des répercussions multiples sur le tournage, dans le positif comme le négatif. Le positif, c'est que son narcissisme est à ce point avancé qu'il se permet d'envoyer quelques crottes de nez aux collègues.

Entre la vanne sur Arnold Schwarzenegger qui ouvre ce paragraphe, et une petite pique adressée à son ex-femme Brigitte Nielsen, le comédien est sûr de son statut. Si la relation entre Tango et Cash tourne essentiellement au concours de celui qui a la plus grosse durant 1h40, et elle le fait très bien, Stallone a aussi eu une incidence bien moins lumineuse sur la fabrication.

 

Photo Teri HatcherDesperate avant Housewives

 

Très investi dans le tournage, à défaut d'être l'un des producteurs, Stallone s'accorde avec la vision de Konchalovsky qui souhaite donner une tournure très sombre au film, se mettant ainsi en porte-à-faux avec ses producteurs qui comptent davantage sur un film d'action explosif et léger à la limite de la parodie plutôt que sur un gros polar hard-boiled à la Piège de cristal. Leurs héros sont invincibles, les méchants sont en carton, il y a même des gadgets pourris (genre, le chien mécanique ou la manipulation des bandes audios, sans parler du véhicule à la fin) et Tango & Cash se définit comme un concentré de tout ce que la décennie a connu de plus grand en matière de suspension d'incrédulité.

Le réalisateur n'y survivra pas puisqu'il sera viré au bout de trois mois, remplacé au pied levé par Albert Magnoli (Purple Rain), qui ne sera pas crédité. Mais Stallone sera directement responsable du renvoi d'un autre membre de l'équipe, le directeur de la photographie Barry Sonnenfeld, car il se trouvait mal éclairé. Ca donne un idée de l'ambiance.

 

Photo Kurt Russell, Sylvester StalloneLa beauté

 

"T'AS FAIT BOUM-BOUM AVEC MA SOEUR ?" 

Dans leur volonté de livrer un produit calibré satisfaisant tous les publics, les producteurs vont également mettre le holà sur la violence du film, demandant ainsi au monteur Stuart Baird de reprendre intégralement le film pour éviter une classification handicapante. Résultat, les fusillades perdent en lisibilité et l'accent est encore plus mis sur l'aspect comique de l'histoire.

Cependant, malgré toutes ces péripéties et complications, et le retard du début de la production qui a conduit Patrick Swayze à partir sur le tournage de Road House, se faisant remplacer par Kurt Russell, Tango & Cash a connu un joli succès à sa sortie. Pas un gros carton certes, mais il a remboursé largement sa mise de départ en amassant pas moins de 65 millions de dollars au box-office. Pas suffisant cependant pour mettre en route une suite qui semblait logique.

 

Tango & Cash : photo, Teri Hatcher, Kurt RussellOui

 

Tango & Cash est un monument du film d'action humoristique des années 80. Encore plus quand on le revoit aujourd'hui. L'insouciance de ses personnages, son intrigue en mousse, l'alchimie entre les comédiens et ses héros beaufs mais heureux de l'être, tout nous rappelle avec bonheur une Amérique déjà bien "great". Et c'est aussi un véritable défilé de seconds rôles emblématiques comme les regrettés Brion James (le légendaire Requin) et Robert Z'Dar, Michael J. Pollard dans son rôle habituel d'original, Jack Palance en grand méchant (juste après Batman) et surtout la découverte de Teri Hatcher dans un premier rôle inoubliable au cinéma.

Bref, Tango & Cash c'est bon, c'est con et c'est culte, on le regarde tous les trimestres avec le même bonheur, on lui dédie des soirées pizzas-bières avec les potes et, pour une fois, c'est un film que l'on regardera exclusivement en version française. Parfaite de bout en bout, elle fait partie de cette période bénie de la fin des années 80 - début 90 où les doublages et la traduction en français augmentaient encore le potentiel du film. Qu'il s'agisse des expressions, des tons de voix ou encore de l'énergie des comédiens, on frôle la perfection, au même titre que Retour vers le futur et Demolition Man.

 

Tango & Cash : photo, Teri Hatcher, Sylvester Stallone, Kurt RussellExplosion de cool

 

Oubliez Citizen Kane et 2001 pendant 1h40. Tango & Cash parvient à faire ce qu'aucun film d'action actuel n'arrive à atteindre aujourd'hui (bisous Agents presque secrets) et nous rappelle qu'à l'époque on savait faire de vrais films bourrins, stupides et jouissifs, en flattant notre côté beauf tout en ne nous prenant pas pour des abrutis. On en pleurerait presque tellement c'est bon.

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commentaires
Miss M
20/02/2023 à 12:03

"Bref, Tango & Cash c'est bon, c'est con et c'est culte, on le regarde tous les trimestres avec le même bonheur, on lui dédie des soirées pizzas-bières avec les potes et, pour une fois, c'est un film que l'on regardera exclusivement en version française."
Vous avez tout dit ... <3

Ça aurait pu être bien
20/02/2023 à 10:18

mais au final c'est juste un film concon légèrement sympathique. Si c'est devenu culte c'est uniquement parce que sont réunnis à l'écran Stallone et Russel. Sinon c'est même pas au niveau d'un Lethal Weapon 3 qui n'est pourtant pas le meilleur.

Bipbip
20/02/2023 à 09:55

Tellement bon! Je crois que , gamin, je n'ai jamais autant ri dans un cinéma.
C'est un style qui s'est perdu

Kojak
20/02/2023 à 09:44

Dans le genre, un de mes films culte revu plusieurs fois oui oui avec pack de bières fraîches, chips et potes, je connais encore certains dialogues par cœur (notamment celui où Brion James se retrouve ligoté avec une grenade dans la bouche, hilarant). Régressif, assumé, de l'excellent film pop corn qui ne se prend pas au sérieux (certains cinéastes français auteurisant devraient en prendre de la graine)

L'autre
20/02/2023 à 09:24

Merci pour cet article qui est une véritable déclaration d'amour à un style de cinoche qui se voit moins et qui est moins bien aujourd'hui ! J'ai moi même un souvenir ému pour avoir vu ce génialissime Tango et Cash au cinoche dans la même soirée que Full Contact ! Que du bonheur....

alulu
19/02/2023 à 21:30

Comme dit plus bas, le dernier tiers gâche tout.

JR
19/02/2023 à 20:27

Oui, mille fois oui !
Un film ou (mon) idole masculine n'a pas peur de se travestir, qui ouvre les vannes.
Merci !

Dicraig
18/09/2019 à 22:40

Une question sans réponse : ce film est-il le dernier vestige d'un script des eighties, tout comme l'a été le "Volte face" de John Woo, destiné à rassembler Sly et Schwarzy sur la même affiche ? Il y a eu cette rumeur du polar ou les deux musclors devaient mener une enquête déguisés en femme ... et comme Kurt Russel s'extirpe du club travesti, forcément, je me la pose encore. Si quelqu'un a la réponse, trente ans après, je suis preneur

Pat
17/09/2019 à 20:45

Revu avec grand plaisir ce film récemment.

sylvinception
03/05/2017 à 15:18

Quel dommage que la dernière partie du film soit complètement foirée - Konchalovsky s'étant barré avant la fin du tournage - ça gâche un peu le plaisir quand même...

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