Charlize Theron : La victoire d’une blonde

Sylvie Rama | 10 mars 2006
Sylvie Rama | 10 mars 2006

Cette blondeur ensoleillée et ce regard pétillant myosotis ne sont pas ceux d'une fraîche Suédoise mais d'une ardente Sud-Africaine. Au rayon des icônes glamour qui le valent bien et des beautiful people des unes glacées, cette radieuse créature reflète l'exquise diversité. La numéro 3 des belles qui font rêver les mâles (derrière Alba et Longoria) compte désormais parmi les forts potentiels qui se révèlent.

Charlize et ses drôles de drames

« Le Stardust présente (roulements de tambour)… Nomi Malone. » Entendre le speaker du film l'annoncer au public en sculpturale meneuse de revue, elle en a rêvé. Mais elle ne l'a pas fait. Paul Verhoeven a finalement préféré le magnétisme charnel d'Elizabeth Berkley au charme angélique de Charlize Theron pour incarner sa showgirl. Elle n'ira pas au bal, mais elle a du bol : l'ex-danseuse de ballet qui auditionne pour le cabaret est tout de même observée. Car sur le plateau des auditions veille un œil, rincé peut-être, assoiffé de jeunes talents sûrement. Habitué des blondes sirènes, l'homme l'aborde cash et Charlize reconnaît le héros de Splash. Pour la comédie That thing you do, en 1996, Tom Hanks engage donc Charlize Theron, fraîchement repérée chez son confrère désormais occupé à promouvoir (avec peine) ses starlettes à paillettes. La grande blonde venue d'ailleurs commence à se faire un nom et congédie son célèbre agent qui, deux ans auparavant, l'avait remarquée (le premier !).

C'est en 1994, dans une banque new-yorkaise où elle a des mots avec le guichetier. L'agent artistique de Rene Russo et de John Hurt, qui attend dans la file, assiste à la scène. Fasciné par le bagout et le physique de cette cliente mécontente, il la poursuit hors de l'agence et lui suggère de tenter le ciné. Caractère de lionne, gueule d'ange et sexy en diable, il la voit bien en belle des champs (de caméra). Mais la campagnarde tout juste débarquée à New York hésite durant des mois avant d'accepter une apparition non créditée au générique des Démons du maïs 3, et de se présenter au casting de Deux jours à Los Angeles de John Herzfeld. Entre temps, son futur ex-agent l'envoie à une audition : ils cherchent une fille, une danseuse pour Verhoeven….

Parce que la Theron est une danseuse. Une vraie. Née en 1975 à Benoni en Afrique du Sud, d'un père français et d'une mère allemande, la fillette est gaga du tutu et fait ses premières pointes à 6 ans. Le petit rat danse dans les ballets de Johannesburg. À 16 ans, elle remporte un concours de beauté local qui lui ouvre les portes du mannequinat. Miss Theron s'envole pour l'Italie et sillonne l'Europe, de Milan à Paris. Au cours de l'hiver 1993, espérant s'ouvrir à d'autres portants de la mode, elle prend un aller simple pour New York, où elle débarque « comme une plouc qui se perd dans les rues ». Dégoûtée du métier, « lors d'une même journée, on m'avait trouvée trop grande, trop grosse et pas assez poitrinée », le top abandonne les chaussures à talons pour remettre ses chaussons.

Rapidement engagée par le Joffrey Ballet de New York, elle virevolte à nouveau dans Casse-Noisette et dans Le Lac des cygnes, avant qu'une blessure au genou ne la prive définitivement d'une carrière à la Pietragalla. Plutôt désespérée, presque à la rue, il lui reste un dernier chèque pour subsister. Ah la la ! Pas de veine, le guichetier refuse de l'encaisser….

La bomba Africa

Que de rebondissements pour l'ex-danseuse devenue modèle, redevenue danseuse puis devenue actrice. Elle-même en rit volontiers : « Quand je regarde le passé, parfois ça me fait quand même marrer ! » Après les déboires, les bobos, la banque, l'agent et le coup de pouce de Tom, Charlize Theron décide d'y aller à fond et bosse sans fin ses cours de comédie. Elle apprend à (bien) jouer, et ses efforts commencent à payer. En 1997, l'épouse d'enfer de Keanu Reeves dans L'Associé du diable, c'est elle. Le top model du Celebrity de Woody Allen, c'est elle aussi. La belle qui aime la bête dans ce pseudo remake grand public de King Kong (Mon ami Joe), c'est encore elle. Dès lors, elle poursuit son chemin dans le circuit hollywoodien.

Mais pour l'instant, aucune de ses compositions ne nous émeut vraiment. Même pas sa très juste interprétation de femme d'astronaute (Johnny Depp) dans l'inutile Intrusion. C'est oublier que Charlize est pleine de surprises. En 1999, sa partition bien jouée dans L'Œuvre de Dieu, la part du diable, réalisé par Lasse Hallström, lui vaut une nomination aux Golden Globes. Médiatisée, mieux cotée, la « bomba Africa » saisit les rôles que l'industrie du cinéma lui offre à la chaîne en 2000 : avec Ben Affleck pour partenaire dans Piège fatal de John Frankenheimer ; en brune aux côtés de Mark Wahlberg et Joaquin Phoenix dans The Yards, salué par la critique. Elle partage ensuite l'affiche de La Légende de Bagger Vance de Robert Redford avec Will Smith et Matt Damon. Infatigable, elle donne la réplique à Robert de Niro et Cuba Gooding Jr. dans Les Chemins de la dignité, s'offrant même le luxe de refuser Pearl Harbor, qu'elle laisse à Kate Beckinsale, pour rejoindre à nouveau Keanu Reeves dans le romantique Sweet november.

Bilan de l'an 2000 : quelques bugs avec certains rôles mal choisis, mais une carrière qui bouge. Chose unique, Woody Allen l'embauche une seconde fois en 2001 pour Le Sortilège du scorpion de jade. Pour la convaincre, il la flatte. Le réalisateur lui affirme que s'il avait tourné le film dans les années quarante, il aurait choisi Lauren Bacall pour le rôle de la vamp Laura. Dans cette comédie hilarante, Charlize Theron retrouve même sa vieille copine de casting, Elizabeth Berkley. Décidément, que de retrouvailles, puisque John Herzfeld lui aussi la réemploie pour 15 minutes. Après le pas bon Mauvais piège, devinez qui retrouve Charlize : Mark Wahlberg, pour un distrayant Braquage à l'italienne en 2002. (Retrouvez notre interview à propos de ce film en cliquant sur ce lien.)

Créature devenue monstre du ciné

Bon. Trêve de plaisanteries, il est temps de faire preuve d'un peu de sérieux. 2003. Alors que tout le monde attend la Theron dans une prochaine mission d'ultimo bimbo, de fiancée du héros ou d'adorable potiche, la théorie est brutalement renversée. Dans Monster, elle est méconnaissable, tant physiquement que dans son jeu qui prend à la gorge. Corpulente, visage bouffi, cheveu terne, œil épouvanté, elle est Aileen Wuornos, lesbienne mal dans sa peau devenue serial killer par amour, exécutée en 2002. Spectaculaire et poignante, sa seule prestation subjugue et impressionne enfin presse et public. Son engagement très entier dans ce film à petit budget dont elle est la coproductrice signe le début d'une transformation professionnelle et personnelle. L'actrice se redécouvre : « La victoire de Monster a suffi à me prouver qu'on doit d'abord s'investir à fond dans une histoire forte, le reste vient ensuite ». C'est donc pour récompenser ce tout nouvel envol que le Golden Globe, l'Ours d'argent et l'oscar de la meilleure actrice lui sont décernés.

Après le croustillant Moi, Peter Sellers, elle tourne une bluette palotte, Nous étions libres, avec Stuard Townsend et Penélope Cruz, qu'elle surpasse tous deux largement dans ce ménage à trois. En 2005, elle refuse d'être la nouvelle James Bond girl de Casino Royale. Cette année (2006), ça semble mal commencer. Elle est à l'affiche d'Aeon Flux : scénario aussi mince que la liane (quelle ligne !), projet casse-cou (qu'elle s'est d'ailleurs blessé) et projectile dangereux (navet). On ose se demander si l'on n'a pas assisté à un succès éphémère avec Monster. Fort heureusement, l'année n'est pas terminée, et l'artiste des coups de théâtre force le coup de chapeau lorsqu'elle choisit les bons registres. Tête d'affiche du drame social L'Affaire Josey Aimes, visage charbonneux et triste mine, elle incarne une mère courage et femme martyre qui décide de se battre contre l'injustice.

Plus mature, féministe engagée, rodée aux rôles de passionarias, elle s'intéresse plus que jamais au fonctionnement de la nature humaine et aux projets bénéfiques pour sa personnalité : « Ce qui compte, c'est que le projet me comble en tant qu'artiste et en tant qu'être humain ». Souhaite-t-elle pour autant casser son image trop glamour ? Vraisemblablement. Charlize et l'art de la coquetterie, ce n'est pas son truc : « Dans la vie de tous les jours, je ne suis pas du tout tapis rouge ! » Sa plastique de naïade, son franc-parler et son humour malicieux, autant que son travail acharné (elle prépare assidûment ses rôles) l'imposent pleinement parmi les reines hollywoodiennes.

Très attendue dans The Ice at the bottom of the world, adapté du roman éponyme de Mark Richard et produit par l'actrice elle-même, elle y sera mère célibataire héroïnomane. Ça plane pour elle… Et ce n'est pas une surprise (parce qu'elle le vaut bien).

 

 

Tout savoir sur L'Affaire Josey Aimes

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