Simone : avant Avatar et Midjourney, le film qui annonçait le futur du cinéma

Geoffrey Fouillet | 18 avril 2023
Geoffrey Fouillet | 18 avril 2023

Imaginez un monde où Meryl Streep serait battue aux Oscars par Simone, la star 100% digitale du film éponyme signé Andrew Niccol, avec Al Pacino.

N'ayons pas peur des mots, depuis le début des années 2000, le cinéma et les nouvelles technologies entretiennent une relation de plus en plus passionnée et passionnante. Même si les effets prosthétiques ou mécaniques gardent nos faveurs, on ne peut décemment pas fermer les yeux devant les réussites techniques offertes par l'outil numérique. L'un des procédés les plus novateurs en la matière, la performance capture, a permis d'enfanter certains des personnages les plus mémorables de ces vingt dernières années (Gollum, Davy Jones, et tant d'autres).

Après nous avoir gratifiés d'un doublé gagnant avec Bienvenue à Gattaca, qu'il a réalisé, et The Truman Show qu'il a scénarisé, Andrew Niccol anticipait avec Simone cet attrait grandissant d'Hollywood pour les images de synthèse, et alimentait déjà le débat sur leur usage controversé. En dépit de ses maigres recettes au box-office (19 millions de dollars récoltés pour un budget de 10 millions), cette dystopie portée par Al Pacino (dans un de ses derniers grands rôles avant son retour en triomphe grâce à The Irishman) est un incontournable trop méconnu au rayon des films joliment prophétiques.

 

Simone : photoEt au septième jour, Simone fut !

 

LA BELLE VIRTUELLE

On a souvent lu ou entendu à quel point les plus grands cinéastes se mesuraient à leur capacité à obtenir le meilleur de leurs comédiens, qu'importent leurs méthodes despotiques. Shelley Duvall en a fait la douloureuse expérience en acceptant de se plier aux exigences de Stanley Kubrick sur le tournage de Shining, et ce n'est qu'un exemple parmi d'autres. Cette conception de l'artiste démiurge a encore de beaux jours devant elle hélas, et ce n'est pas un hasard si Niccol s'en est inspiré pour créer le personnage de Viktor Taransky (Pacino, délicieusement en roue libre), sorte d'Ed Wood des temps modernes.

Entre le départ de son actrice vedette (Winona Ryder, dans un second rôle savoureux) et sa rupture de contrat avec les studios, Viktor ne vit pas franchement sa meilleure vie. Heureusement pour lui, un génie de l'informatique lui lègue sa dernière invention avant de mourir, et il s'agit ni plus ni moins d'un logiciel capable de modéliser la comédienne idéale (entendez par là, docile et corvéable à merci). Il la baptise alors Simone, en référence au nom du précieux programme : "Simulation One". Mais comment faire croire au monde entier qu'elle est réelle ? Oui, être ou ne pas être, telle est la question.

 

Simone : photo, Winona Ryder, Al PacinoQui fait la loi ici ? C'est Winona !

 

"Je suis toujours en quête de l'humain dans la technologie (…) Je n'aime pas ce qui est noir ou blanc. La vie n'est pas ainsi. Vous devez juste composer avec beaucoup de gris", racontait Niccol à l'occasion d'une interview donnée au site SPLICEDwire lors de la sortie du film en 2002. En confrontant réel et virtuel, le réalisateur pose la question de la manipulation des images, et du souci de se dissimuler derrière elles. Au fond, Viktor est Simone, et c'est ce jeu de dédoublement permanent entre l'artiste et sa muse qui captive instantanément. Tous deux parlent d'une même voix et affichent les mêmes émotions.

La suite est réservée aux abonnés. Déjà abonné ?

Accèder à tous les
contenus en illimité

Sauvez Soutenez une rédaction indépendante
(et sympa)

Profiter d'un confort
de navigation amélioré

Newsletter Ecranlarge
Recevez chaque jour les news, critiques et dossiers essentiels d'Écran Large.
Vous aimerez aussi
commentaires
Chompchomp
19/04/2023 à 16:00

J'ai essayé ce film, malgré un casting et un pitch très intéressant je l'ai trouvé très soporifique et je n'ai malheureusement pas réussi à aller jusqu'au bout.
J'avais envie de l'aimer ce film pourtant !


18/04/2023 à 22:36

Drôle de debut carrière que celle de Nicoll... Il commence avec l'histoire d'un mec qui décide de tromper tout le monde (Gattaca), puis écrit l'histoire d'un mec que tout le monde trompe (scénario de Truman show) puis enchaine avec l'histoire d'un mec qui trompe tout le monde (Simone)..

alulu
18/04/2023 à 22:20

Niccol se pose les bonnes questions sur le monde qui l'entoure et peut donc anticiper de façon assez juste. Al Pacino est impeccable dans le rôle du réal "c'était mieux avant" qui se trouve en quelque sorte libéré par la technologie. Un bon film et puis voir Pacino dégonfler les pneus d'une caravane, de trier des bonbons tout ça pour essayer de satisfaire les désirs d'une starlette, c'est à la fois comique et pathétique.

Kyle Reese
18/04/2023 à 19:50

J'aime beaucoup Niccol, Gattaca fait parti de mon top SF, mais j'ai eu une sorte de rejet pour celui-ci je ne sais plus trop pourquoi. La tonalité du film, je sais pas. Maintenant que vous en parlé et avec ce qui nous arrive avec les AI en effet le film peut être vu comme visionnaire. Niccol est toujours intéressant, même son trop froid Anon a d'excellent moment. Bon sinon effectivement ... Pacino quoi.

Taf
18/04/2023 à 19:31

Superbe film avec une super histoire, et tellement en avance sur son temps !
Le top, comme avec le fabuleux : bienvenue à gataca !

Ray Peterson
18/04/2023 à 19:09

Pas le meilleur de Niccol mais une très bonne prestation de Pacino et de la très classe Catherine Keener. Mais en même temps à cette période Niccol c'était vraiment quelque chose ("Lord of War" incoming!) après pour ma part ça se gâte même si je reconnais certaines qualités à "In Time" et "Good Kill".

cmoileena
18/04/2023 à 17:45

J'ai beaucoup aimé ce film. D'ailleurs j'aimerai bien le revoir....