Harry, un ami qui vous veut du bien : le thriller français qui vous veut du mal

Geoffrey Fouillet | 21 juin 2022 - MAJ : 21/06/2022 14:45
Geoffrey Fouillet | 21 juin 2022 - MAJ : 21/06/2022 14:45

Choc, mais jamais provoc', Harry, un ami qui vous veut du bien régale là où ça fait mal. Un thriller made in France comme on n'en fait presque plus.

Le temps n'a visiblement pas d'emprise sur Harry, un ami qui vous veut du bien. Vingt-deux ans au compteur et le film n'a rien perdu de son irrésistible noirceur. Son réalisateur, Dominik Moll, a depuis mené sa barque avec talent, le plus souvent avec son désormais fidèle coscénariste, Gilles Marchand. On leur doit notamment une autre grande réussite, Seules les bêtes, et leur dernière collaboration en date, La nuit du 12 (en salle le 13 juillet 2022), s'annonce là encore sous les meilleurs auspices.

Mais revenons à ce cher Harry. Après une présentation en compétition officielle au Festival de Cannes en 2000, les spectateurs français le découvrent au cinéma dans la foulée, en plein été, et lui veulent, à leur tour, le plus grand bien. Son carton au box-office hexagonal peut en témoigner, avec un cumul avoisinant les 2 millions d'entrées, sans compter le beau succès d'estime reçu outre-Atlantique. Et voilà qu'en 2001, le film remporte quatre Césars, dont ceux de la meilleure réalisation et du meilleur acteur pour Sergi López.

Un triomphe total qui impulse un vrai regain d'intérêt pour un cinéma de genre français à la fois populaire et singulier. D'où la fameuse vague horrifique des "French Frayeurs" qui déferle sur la production française des années plus tard, mais échoue à rassembler le public en raison d'une violence gore ouvertement assumée. Avec Harry, un ami qui vous veut du bien, le malaise se fait plus insidieux et ne prive jamais le spectateur de la possibilité d'en rire.

 

Harry, un ami qui vous veut du bien : photo, Sergi LópezUn visage aussi insondable que celui de La Joconde

 

LIFE-INVASION

Pour Michel (Laurent Lucas) et Claire (Mathilde Seigner), parents de trois petites filles, la vie est un long fleuve intranquille. Alors qu'ils retournent dans leur maison de campagne pour les vacances d'été, ils croisent sur leur route un ancien camarade de classe de Michel, le bien nommé Harry (Sergi López donc, stupéfiant d'ambiguïté), accompagné de sa fiancée Prune. Rencontre fortuite ou manigance déguisée ? Ce qui est sûr, c'est que la proie, Michel, a mordu à l'hameçon du "pêcheur", Harry.

L'analogie n'est pas choisie par hasard dans la mesure où Dominik Moll s'est toujours dit passionné de documentaires animaliers. Et sa démarche en tant que réalisateur est à l'avenant, plus proche de celle du documentariste que de l'esthète. Ce qui ne l'empêche évidemment pas d'employer la grammaire du cinéma à son avantage. S'il reprend les codes du suspense hitchcockien, l'intrigue évoquant lointainement L'Inconnu du Nord-Express, il laisse à ses personnages la place d'évoluer en toute liberté devant sa caméra, et les comédiens, criants de naturel, le lui rendent bien.

 

Harry, un ami qui vous veut du bien : photo, Laurent Lucas, Mathilde SeignerMieux vaut faire le guet, Harry pourrait débarquer

 

La scène des retrouvailles entre Michel et Harry dans les toilettes publiques d'une station-service est tout à fait éloquente à ce niveau-là. Les deux hommes s'appréhendent mutuellement, le premier embarrassé de ne pas reconnaître le second, et pour le cinéaste comme le spectateur, il s'agit alors de traquer le moindre tressaillement un tant soit peu signifiant sur les "visages-paysages" des acteurs. Bien sûr, ce regard attentiste de la caméra n'est jamais aussi fort que lorsqu'il se porte sur Harry, personnage à la fois profondément aimable et détestable.

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commentaires
elbignol
21/06/2022 à 17:31

Ca m'avait bien calmé quand j'étais jeune,
Vous m'avez donné envie d'y revenir.

Sk.
21/06/2022 à 16:50

Ah je l'ai vu pour la première fois récemment.
Je me suis dit que c'était un ovni dans le cinéma français. Il aurait cartonné aujourd'hui.