Critique : L'Absence

Maryne Baillon | 22 janvier 2014
Maryne Baillon | 22 janvier 2014

Il est si rare que le cinéma africain soit distribué en France que L'absence de Mama Keïta est en ce sens une œuvre tout à fait réjouissante à découvrir. Plus encore lorsque l'histoire qui en découle soulève un problème socio-culturel qui nous est peu familier. Ainsi, l'absence dont il est question dans le film est celle des élites du tiers-monde qui partent poursuivre leurs études en occident. Pour diverses raisons, rares sont ceux qui reviennent vivre dans leur pays natal ce qui sur le long terme s'avère être une décision néfaste pour les jeunes nations africaines. D'une part parce qu'elle les prive du savoir et de la contribution des plus brillants de leurs enfants, mais pire encore, en partant ils se rendent complices sans le vouloir d'un régime dictatorial qui entend entretenir la population dans l'inculture.

Ce thème passionnant est abordé par le réalisateur à travers le personnage d'Adama, enfant prodige d'une famille sénégalaise partit poursuivre ses études en France. Il aura fallu une lettre, qui lui apprend la nouvelle de la mort imminente de sa grand-mère, pour le ramener au pays après quinze années d'absence. Naturellement, ses proches se réjouissent de son retour, mais son attitude nonchalante et distante envers ceux qui ont bercé son enfance nous encourage vite à penser que lui non plus, ne tiendra pas sa promesse. Adama n'a nulle intention de revenir s'installer au pays.

Finalement, le problème de L'absence ne se pose pas sur l'histoire, mais plutôt sur la manière dont celle-ci est traitée. Un tel sujet méritait d'être exposé avec plus de rigueur et de sensibilité quand le film prend la tournure d'un polar urbain sans grande envergure où s'enchaîne les rebondissements et les actions malmenées. Pourtant, de bonnes idées il y en a comme la métaphore qui se cache derrière le personnage d'Aïcha, sœur d'Adama. Cette jeune prostituée, sourde, muette et persécutée par son proxénète représente à elle seule une Afrique qui souffre en silence sous l'emprise de la dictature. La poésie qui se dégage du personnage est d'ailleurs le point fort du long-métrage. Dommage alors que tout le film ne soit pas aussi inspiré, mais, au contraire, trop largement dominé par une mise en scène qui enchaîne les maladresses. En première ligne, le montage déstructuré et le jeu des acteurs jamais très convainquant se posent comme des parasites qui empêchent la réflexion sur l'immigration et l'exil de se déployer intelligemment, de même qu'elle nous tiens à l'écart émotionnellement des événements dramatiques qui suivent l'intrigue. Loin d'être entièrement condamnable, on regrettera le traitement un peu anarchique du récit qui rend le film trop vite oubliable.

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