Inside Llewyn Davis : critique folk

Sandy Gillet | 21 mai 2013 - MAJ : 09/03/2021 15:58
Sandy Gillet | 21 mai 2013 - MAJ : 09/03/2021 15:58

L'une des forces du cinéma des frères Coen est leur propension à toujours donner l'impression de nous resservir les mêmes films alors qu'évidemment il n'en est rien. Inside Llewyn Davis, fils illégitime de Barton Fink et A serious man, ne semble ainsi pas faire mentir cette croyance cinéphile. Llewin Davis est un chanteur Folk qui tente d'émerger sur la scène musicale newyorkaise du début des années 60. Le film suit une semaine de sa vie de bohème / galère entre Greenwich Village et Chicago où sa « survie » ne tient qu'à la solidarité d'inconnus et d'amis. Que l'on ne s'y trompe pas, et même si ce pitch semble dire le contraire, on est très loin de l'œuvre dépressive et très proche de la fiction immersive et jouissive. La « faute » comme toujours à une mise en scène élégante sinon empreinte du génie de l'invisible et à une écriture qui donne la part belle aux dialogues aux cordeaux et à l'humour noir chevillé au corps.

 

photo, Oscar Isaac

 

Le terrain est donc connu, familier même et pourtant toujours aussi surprenant et aux chemins de traverse toujours aussi généreux. Sous des dehors de film « pastille », les frères Coen se permettent en effet de mettre en lumière tout un pan de la culture « beatnik » qui s'est matérialisé entre autre par le revival de musique folk d'abord sombre des années 50 puis florissante du début des années 60 avec l'émergence d'un artiste comme Bob Dylan. L'occasion pour eux de mettre en lumière l'acteur Oscar Isaac encore peu connu du grand public mais dont la figure est déjà familière. Il campe un Llewis Davis, personnage de fiction qui évoque à certains égards Dave Van Ronk, amoureux et respectueux de l'authentique musique folk ayant contracté une sorte de vœu de pauvreté inconscient.

Les frères Coen en font un personnage un peu paumé mais aussi très lucide sur sa condition et sur le bestiaire qui l'entoure propre à donner du corps aux mélodies emplies de spleen qu'il interprète sur la scène d'un café miteux. C'est d'ailleurs lors des quelques passages musicaux que le film acquiert définitivement sa touche Coen. De celle qui scelle Inside Llewyn Davis vers quelque chose d'indicible mais que l'on ressent de tous ses os.

 

photo, Carey Mulligan

 

Film organique qui fait indéniablement corps avec le public pour peu que l'on se laisse embarquer, Inside Llewyn Davis a aussi pour lui la réussite de l'éveil des sens et de la redécouverte incessante du cinéma des Coen. Impressions rares qui s'accompagnent ici d'une impression de félicité « lynchienne » que l'on peut traduire par un voyage vers un ailleurs que l'on croit de prime abord identifié mais qui déraille au détour d'un plan ou d'une réplique. De quoi maintenir sans cesse en alerte. Point de confort et le graal d'une vision touchante et borderline. Un grand prix cannois serait loin d'être injustifié.

 

Affiche française

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