The Dictator : critique de BHL
Après trois aventures toujours plus ambitieuses dans les registre de la blague qui colle et de la vanne qui tâche, la lassitude était sur le point de nous gagner, jusqu'à ce que Sacha Baron Cohen déboule avec The Dictator sur un sujet des plus provocateurs, parfaitement en phase avec l'actualité.
UN BEAU RAT
Ali G, Borat et Brüno collaient aux remous d'un monde post-moderne, dont les figures et valeurs se dissolvent tels des cachets d'aspirine dans un cocktail médicamenteux, et provoquait un rire difficilement répressible, fruit autant de la fascination et de la sidération que nous éprouvions à découvrir ce vrai-faux fou furieux jouer avec tous les symboles possibles, mettre à bas chaque idole croisant son chemin.
Avec The Dictator, l'artiste protéiforme a choisi de changer sensiblement de modus operandi, et on en serait presque déçu, tant son humour paraissait trouver là une forme de maturité coïncidant parfaitement avec ses happenings de cinéma guérilla.
En effet, dans la forme, ce The Dictator n'a plus grand chose à voir avec les délires passés de son auteur, dont on sent que les collaborations avec Tim Burton ou Martin Scorsese l'ont affecté, et sans doute sensibilisé à une narration plus conventionnelle, mais aussi plus ample et apte à transmettre l'émotion. Fini les faux reportages, les caméras cachées ou embarquées, et par conséquent l'ambiguité sur le statut de l'objet filmique que l'on visionne, un peu effaré. Réalisé, découpé et monté comme n'importe quelle comédie made in USA, l'histoire échappe au trouble qui nous assaillait lorsque Borat s'en prenait à un vieux couple juif, ou lorsque Brüno se livrait à une improbable séance d'air sex devant un medium pris à son propre jeu. En l'état, c'est donc de sa charge subversive que le projet se voit amputé.
Un constat d'autant plus regrettable que le film s'avère plutôt riche, et ses personnages secondaires savoureux, particulièrement bien servis par un rythme qui ne ménage jamais le spectateur, et enchaîne les gags avec le rythme soutenu d'une centrifugeuse iranienne. Des dessous de bras d'Anna Faris en passant par un fisting de femme enceinte du meilleur goût, sans oublier une série de plaisanterie à connotation religieuse ou culturelle dont on s'étonne encore qu'elles aient pu parvenir jusqu'à nous, Sacha Baron Cohen ne s'est pas calmé, et s'est fait un devoir de relire l'actualité récente à l'aune de son projet fou. L'artiste nous fait ainsi rire à coup de sketch scatos, de réflexions scandaleuses, de détournements de valeurs en pagaille, et n'épargne personne, aucun groupe social, et renvoie toutes les vicissitudes contemporaines dos à dos.
Ben Kingsley et Sacha Baron Cohen
SACHA BARON (PAS) CHAPLIN
On rit donc beaucoup et souvent, mais on se désole que ce rythme échevelé, ces provocations glorieuses et cette audace jamais entravée d'aucune forme de politiquement correct s'expriment alors que notre joyeux luron a renoncé à sa recette de faux reportage scandaleux. Reste une satisfaction intense et jouissive, celle de voir le film débarquer sur nos écran alors que s'entassent les pensums bon teints, petits parfaits de bienpensance et prêt-à-penser en tout genre traitant du sujet qu'éreinte en creux Sacha Baron Cohen, à savoir le printemps arabe.
Lecteurs
(3.5)15/10/2018 à 09:43
BHL, ce "philosophe" milliardaire et pourtant à 2 balles. Je n'ai jamais compris pourquoi ce tartuffe de la pensée était caressé dans le sens du poil par la plupart des médias depuis tant d'années malgré toutes les bêtises, erreurs et approximations qu'il commet souvent. Disons, que ce personnage caricatural aime briller à l'écran.
14/10/2018 à 20:44
Propagande déguisée en humour pour mieux faire passer la propagande... l'humour est ici le vernis qui permet de désamorcer les éventuels soupçons de propagande.