Critique : Le Dernier vol

Thomas Messias | 15 décembre 2009
Thomas Messias | 15 décembre 2009

Avant toute chose, il faut saluer l'envie de Karim Dridi d'aller explorer de nouvelles contrées, des bas-fonds de Pigalle aux bars de Cuba. Dernière étape en date : le Sahara Français des années 30, pour une histoire d'aviateur disparu, que sa maîtresse tente de retrouver par tous les moyens. Le dernier vol a des allures de grand classique, mêlant affiche glamour, film d'aventure et romance exacerbée. Allures, c'est justement le mot : le film de Dridi est caractérisé par une envie permanente de bien faire, qui ne se traduit malheureusement que par une succession d'images belles mais plates.


Tellement conscient de jouer la suite de sa carrière avec l'oeuvre la plus ambitieuse de sa filmographie - budget conséquent, actrice à Oscar... -, Dridi reste à la surface des choses, donnant une apparence de papier glacé à ce qui aurait dû n'être qu'un tourbillon de sable, de tristesse et de mort. Étonnant de la part du réalisateur de Bye bye. Alors bien sûr, la composition des plans est souvent de qualité, la musique interprétée par le trio Joubran et Chkrrr fait très couleur locale, mais tout ça ne fait ni une mise en scène ni une ambiance. Le film n'inspire qu'une indifférence polie, et finit même par devenir assez risible : marchant dans le désert pendant des jours pour tenter de retrouver l'aviateur Lancaster, disparu à quelques encablures, les deux personnages principaux manquent d'eau et de forces, sentant quasiment leur fin arriver... mais restant toujours aussi bien maquillés, coiffés, glamour. Ce qui passerait dans une pub Lancôme est ici bien moins acceptable : le caractère tragique d'une telle aventure est irrémédiablement gâché par ce total irréalisme.


Il y a aussi chez Dridi cette volonté, louable au demeurant, de prôner l'union entre les ethnies et l'amour entre les hommes. Son traitement est bien trop angélique pour convaincre, aussi subversif qu'une chanson d'Yves Duteil. Il n'est pas agréable d'accabler ainsi le réalisateur, loin d'être le moins doué de sa génération ; simplement, il se révèle globalement inapte à traiter des thèmes de fond et des histoires de grandes envergures. On peut difficilement reprocher à ce cinéaste des quartiers pauvres d'être allé voir plus loin que le bout de ses chaussures, mais c'est un constat d'échec qui s'offre à lui. Et malgré la retenue certaine du duo Cotillard/Canet - plus attendu pour leur statut d'icônes people que pour leurs prestations - et la belle présence de Guillaume Marquet, Le dernier vol se révèle être un film immédiatement oubliable car jamais transcendant.

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