8½ (Huit et demi) : Critique

Julien Foussereau | 16 octobre 2009
Julien Foussereau | 16 octobre 2009

Saluer la grandeur de  et sa contribution éternelle en quelques lignes s'apparente au chemin de croix emprunté par Guido, le cinéaste / double fellinien : une sorte de paralysie face à l'ampleur de la tâche. D'autres avant le Maestro avaient apporté un regard sur l'univers impitoyable du cinéma, les affres de la création, ne serait-ce que Wilder avec Boulevard du Crépuscule ou encore Minnelli et ses Ensorcelés. Mais Federico Fellini explose ici tous les schémas préalablement établis en livrant une œuvre fondatrice, d'une complexité et d'une intelligence folles, où la mise en abyme débouche sur le « méta cinéma ». 8 ½ ou le film en train de se faire (et de se défaire)

 

 

8 ½ n'a en rien perdu de son pouvoir de fascination et demeure encore aujourd'hui ce monstre égocentrique et psychanalytique à la mise en scène virtuose. Entrée charnière dans sa filmo, 8 ½  est le film de la mue pour Fellini, celui où il délaisse sa peau de néoréaliste disciple de Rossellini pour mieux revêtir son costume de peintre démiurge. Entre ces points d'entrée et de sortie, 2h18 d'introspection denses, d'amour infini des femmes, de mises à nu conjugales, de souvenirs, de culpabilités judéo-chrétiennes liées à l'enfance...

En découle une succession de tableaux puissants par leur hyperbolisme dans lesquels un artiste en pleine crise de la quarantaine se refuse à délaisser l'enfant qu'il a été, un enfant grandissant au milieu des femmes, qu'elles soient angéliques ou diablesses. Quitte à faire claquer le fouet dans une séquence mythique. Ce penchant pour la caricature, qui n'aura de cesse de s'accentuer par la suite, met surtout en évidence le besoin d'être aimé par les multiples facettes de la Femme, de la terriblement charnelle Carla à Luisa la cérébrale (double à peine voilé de l'épouse de Fellini, l'actrice Giulieta Masina) en passant par la Saraghina, la gironde provocante.

 

 

Bien que 8 ½ soit considéré comme son film le plus personnel, Fellini n'a pas manqué de rappeler ultérieurement qu'il était un grand menteur, sous-entendant qu'il a inventé beaucoup de ses souvenirs. Peu importe, au fond, car, à l'image du final magnifique placé sous le signe du cirque et des cuivres impériaux de Nino Rota, il nous dit qu'au cinéma, l'imagination sans limite du spectacle compte plus que le souci de véracité. On ne peut qu'embrasser cette moralité du Maestro et entrer encore et encore dans la farandole du 8 de Moebius, bras dessus, bras dessous avec Marcello le Magnifique, Anouk, Claudia, Sandra et les héritiers Terry et Woody. Forza Fellini !

 

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