Critique : L'Ami américain
Le personnage principal, un homme malade et sans consistance à la vie banale, va voir son existence chamboulée par un cowboy amateur d'art et un français mafieux dont les liens et relations ne seront jamais clairement définis avant de sombrer dans un véritable cauchemar où crimes et morts se cumulent. Très marqué par la peinture dans sa thématique, le film l'est également dans sa forme. D'une part par la photographie où bruns et rouges se fondent jusqu'à tendre par moment vers l'abstraction, d'autre part par sa lenteur et sa nervosité qui contribuent à créer une oppression accentuée par des univers clos et sur-cadrés, d'où se dégagent à chaque fois une atmosphère singulière où tous nos repères semblent faussés.
Mais à travers ce film sombre Wenders cherche surtout à la photographie, au cinéma et à son histoire. Par de petites touches subtiles le réalisateur allemand insère des éléments techniques et des références fortes à une époque fondatrice de l'art du film et à ses mutations. Depuis le métier du protagoniste qui est cadreur, artisan fabriquant des cadres, aux jouets optiques de son fils : une lanterne magique et un zootrope, en passant par les objets échangés entre Hopper et Ganz dans son magasin. Et surtout avec les figures tutélaires présente au générique où, en plus de Dennis Hopper, Bruno Ganz et Gérard Blain, se croisent rien moins que Nicholas Ray, Samuel Fuller et Jean Eustache, chacun portant avec lui un bagage cinéphilique important et qu'il est difficile de laisser de côté.
Lecteurs
(0.0)