Synecdoche, New York : Critique

Ilan Ferry | 23 mai 2008
Ilan Ferry | 23 mai 2008

Bienvenue dans la psyché d'un auteur malade : telle est l'étrange et ambitieuse invitation lancée par Charlie Kaufman pour son premier film en tant que réalisateur. 

Dès les premières images, le ton est donné : Synecdoche, New York traitera de la mort et de ce long et tortueux chemin qu'est le processus créatif. Soit deux thèmes majeurs et récurrents des scripts de Kaufman qui prennent ici une dimension encore plus pregnante et prophétique que dans le très réussi Adaptation. Ainsi, après Nicolas Cage, c'est au tour de Philip Seymour Hoffman d'incarner à la perfection le double cinématographique (son pendant scénique dans le film étant lui réservé au trop rare Tom Noonan) du scénariste le plus singulier d'Hollywood dans une vrai/faux biopique aussi mélancolique dans le ton, qu'anarchique dans sa forme.

 

 

Un numéro d'alchimiste à double tranchant où l'univers totalement barré du réalisateur/scénariste rencontre dans un premier temps celui de Woody Allen, autre auteur aux névroses bien marquées, avant de lentement dériver vers une étrange mise en abyme où transparaissent ses angoisses les plus vives. Livré à lui même derrière la caméra, Kaufman en profite donc pour accoucher - dans la douleur serait-on tenté de dire - d'un film somme, sorte de patchwork où fourmillent pêle-mêle une multitude de détails scénaristiques aussi passionnants que terriblement ennuyeux.  

 

 

Toutefois à vouloir brasser trop de choses à la fois, Synecdoche, New York oublie son spectateur, le perdant invariablement dans les méandres d'un esprit torturé aux affects incroyablement complexes. Le gros défaut du film se trouve là, dans sa persistance quasi nihiliste à verser dans un égocentrisme aux ramifications quasi psychiatriques (depuis le temps qu'on vous dit que Kaufman est totalement cinglé !) quitte à nous laisser sur le carreau lors de ses dérives métaphoriques.

Clouer ce premier film au pilori serait dommage tant il traite in fine de thèmes universels et symptomatiques d'un malaise général (la vacuité de l'existence, l'ombre menacante et persistante de la grande faucheuse et bien sûr la complexité des rapports amoureux) avec une poésie inhérente à son auteur et regorge d'idées disparates et totalement folles. Il en résulte un métrage en dents de scie, oscillant entre moments de pur génie et analogies abstraites. Reste à espérer que Synecdoche, New York permettra à Kaufman de tourner la page au lieu de l'enfermer définitvement dans ses fascinantes obsessions.

 

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