Critique : Un baiser s'il vous plaît
Avec Changement d'adresse, Emmanuel Mouret était subitement passé du statut d'auteur franchouillo-agaçant à celui d'auteur en devenir. Son sens du dialogue et du timing fait le sel d'un cinéma théâtral et singulier, qui nécessite un peu de bonne volonté de la part du spectateur mais qui ensuite dévoile ses charmes et ses délices. Un baiser s'il vous plaît, c'est du Mouret pour sucre : les dialogues sont finement taillés et les situations schématiques mais construites de façon on ne peut plus rigoureuse.
Plus ambitieux que par le passé, Mouret construit son
film sur l'histoire de deux couples, le premier (Julie Gayet et Michaël
Cohen) dissertant à propos de la destinée du deuxième (Virginie Ledoyen
et Emmanuel Mouret). Ça donne un film parfois un peu haché, aux
transitions et aboutissements légèrement tirés par les cheveux. Mais
l'essentiel n'est pas là : l'important, c'est que Mouret s'est surpassé
pour nous servir quelques situations pour le moins cocasses. Il y a en
particulier une scène dans Un baiser s'il vous plaît
qui justifie à elle seule tout le film, et dont le visuel est
d'ailleurs utilisé sur l'affiche. Là, Mouret exploite à merveille une
situation burlesque et inconfortable, qui crée inévitablement le rire
et l'envie d'en avoir toujours plus.
On sent malheureusement que
l'auteur a peiné à boucler ses intrigues, comme s'il n'avait pas su de
dépêtrer de cette construction à deux niveaux. D'où une dernière
demi-heure pataude, qui se contente de recycler des recettes
éculées. Heureusement, le casting est presque parfait, et permet
d'arriver jusqu'à la fin sans trop d'ennui. Seule Virginie Ledoyen
semble totalement à côté de ses pompes, ne trouvant jamais le tempo
adéquat dans un rôle certes pas évident. Manquer de timing chez Mouret,
c'est comme manquer de poitrine chez Russ Meyer : c'est légèrement
fâcheux. Une prestation ratée qui nuit légèrement à un film sympathique
mais pas aussi convaincant que prévu.
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