Critique : La Dame du lac

La Dame du lac est célèbre pour l'utilisation prononcée d'une figure de style originale : la caméra subjective ou pour parodier le titre d'une série de livres à succès : « un film dont vous êtes le héros ». Comme l'affiche l'annonce Robert Montgomery et nous allons résoudre une enquête et pas n'importe laquelle puisqu'elle est menée par Philip Marlowe, célèbre détective de Raymond Chandler.

En fait le film est construit de telle sorte que l'histoire est vue à travers les yeux du détective. Et puisque Robert Montgomery est aussi le réalisateur, il se retrouve doublement derrière la caméra : cinéaste et acteur souvent invisible dans une œuvre en flash back. L'intérêt ? Peut-être une tentative d'identification plus forte au personnage et au film comme c'était la règle à Hollywood mais c'est un peu raté.

D'une part seul un robot peut ne pas cligner des yeux pendant plus de dix minutes et d'autre part pour les non-fumeurs voir parfois l'écran embrumé un instant produit un effet de distanciation non négligeable. En outre les autres personnages ont la mauvaise manie de fixer le héros dans les yeux lors de chaque dialogue même lorsqu'ils ne parlent pas, ce qui, en plus d'être assez peu réaliste, procure une sensation assez désagréable.

Malgré tout l'histoire était bonne et l'interprétation vocale du privé est excellente. Le film est doté d'une trame policière efficace, fidèle au roman d'origine avec un détective comme on les aime : froid avec de la répartie et un soupçon de romantisme désabusé, plongé dans un univers noir dont il a peut-être trop conscience. Seul défaut : l'histoire d'amour un peu terne due au monologue servi par Audrey Totter auquel on ne croit pas un instant.

Mais ces effets de mise en abyme perpétuelle et infernale ainsi que les déplacements trop droits et souples agacent et au final desservent la narration contrairement à l'usage qu'a pu faire de la caméra subjective Delmer Daves dans Dark Passage quelques années plus tard.