Critique : Casanova

Ilan Ferry | 10 mai 2006
Ilan Ferry | 10 mai 2006

Resté pour le moment inédit en salles, Casanova fait partie de cette catégorie de films qui provoquent une appréhension quasi instinctive du fait de son réalisateur abonné aux bluettes pétries de bons sentiments et la présence d'un jeune premier dans le rôle titre. Ainsi, le pas hésitant et le regard fuyant, le spectateur cynique rentre (non sans réticences) dans l'univers du célèbre séducteur de Venise et se retrouve devant un résultat final… pas si mauvais que ça ! Si le pari était loin d'être gagné, (la seule perspective de voir Disney s'attaquer au mythe du plus grand des séducteurs suffisant à faire grincer plus d'une dent), force est de reconnaître que le réalisateur Lasse Hallström s'acquitte honnêtement de sa tâche et, à défaut de s'en tirer avec les honneurs, nous offre un spectacle plaisant n'ayant d'autre ambition que celle de divertir. Que ceux qui espéraient voir une biographie sulfureuse du célèbre libertin passent leur chemin car ce Casanova là joue la carte de la pudeur, les nombreux exploits sexuels du séducteur venisien (plus suggérés que montrés) laissant rapidement place à de multiples numéros comiques et autres poursuites endiablés dans les rues d'une Venise de carte postale. Dès le début le ton est donné : Casanova 2005 sera une comédie romantique ou ne sera pas.


En l'état, le film contient toutes les figures imposées du vaudeville dont il suit le schéma narratif à la lettre, et si le réalisateur respecte comme il se doit les règles des jeux de l'amour du hasard, les multiples enjeux sentimentaux sont eux, totalement prévisibles quand ils ne sont pas désamorcés dans la minute. Les couples se forment sans grande surprise au gré des multiples jeux de masques et autres usurpations d'identités, nous renvoyant ainsi à la grande tradition du marivaudage. Un aspect qui est pour beaucoup dans le charme du film donnant lieu à quelques scènes mémorables (dont une variation du célèbre « amant dans le placard » situé ici dans une salle de bal) cependant trop peu nombreuses pour assurer une adhésion totale.


Ainsi, l'intérêt du film ne réside non pas dans le couple formé par un Heath Ledger, plutôt convaincant en chouchou de ses dames, et une Sienna Miller charmante mais fade, mais dans sa galerie de portraits croustillants parmi lesquelles se distinguent Oliver Platt et Jeremy Irons visiblement heureux de faire leur numéro. Si le premier se révèle touchant en aristo complexé, le second cabotine comme il faut afin d'insuffler à son personnage d'Inquisiteur coincé le ridicule nécessaire . Alliés à Omid Djalili qui campe un valet truculent et parfait contrepoint face à un Casanova trop lisse, ils forment une belle brochette de seconds rôles qui, à leur façon, sauvent le film en dynamisant un ensemble décidément trop sage. Ajoutez à cela une reconstitution somptueuse de Venise, un héros charismatique convoitée par un nombre conséquent de jeunes filles toutes plus amoureuses les unes que les autres, saupoudrez le tout avec la promesse d'un amour véritable et de quelques beaux duels à l'épée et vous aurez alors une petite idée du libertinage selon Hollywood.


On pouvait craindre le pire de la part du réalisateur de l'indigeste Chocolat, et si on ne peut décemment pas parler de retour en grâce de la part du cinéaste suédois, reconnaissons que le résultat final s'avère amusant sans jamais être pénible malgré son flot de bons sentiments dégoulinants. Avec tout ce que cela implique de bons comme de mauvais côtés, Casanova selon Lasse Hallström s'apparente à une agréable friandise, aussi inoffensive que superficielle, et qui s'oublie aussitôt le générique de fin terminé.

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