Critique : Angel-A

Ilan Ferry | 22 décembre 2007
Ilan Ferry | 22 décembre 2007

Notre métier réserve parfois bien des surprises. Tourné dans le plus grand secret, Angel-A n'a été montré qu'à un cercle très restreint de journalistes et représente l'un des derniers événements cinématographiques de cette fin d'année à coté duquel Écran Large ne pouvait décemment pas passer. C'est donc tout naturellement que l'auteur de ces lignes s'est porté volontaire pour voir le dernier bébé de Besson dans une salle et à un horaire aléatoire. Mais le hasard faisant bien les choses c'est à la séance présentée par Besson himself (confirmant ainsi sa volonté des plus louables de toucher avant tout les spectateurs), accompagné de Jamel Debbouze et la magnifique Rie Rasmussen, que votre serviteur a assisté.. Finalement, le réalisateur aura bel et bien pris rendez-vous avec la presse… à son insu !

Que dire de ce Angel –A dernier film réalisé par Luc Besson depuis le mitigé Jeanne d'Arc ? Levons tout d'abord le voile sur l'histoire du film jusqu'ici tenu secrète : André (Jamel Debbouze) est au bout du rouleau, ayant emprunté de fortes sommes aux mauvaises personnes il doit impérativement s'acquitter de ses dettes sous peine d'être tué. Sans argent ni papiers il croit trouver un échappatoire en se jetant d'un pont, mais c'est à ce moment fatidique qu'il rencontre Angela (Rie Rasmussen), une superbe jeune femme qui va bouleverser sa vie. En l'état, le neuvième film du papa de Nikita ne semble pas bien original (le cinéma, par définition, se nourrit de ces petites rencontres qui changent la vie). Cependant ce n'est pas tant le canevas scénaristique de la rencontre homme / femme qui prête à controverse mais bel et bien la ressemblance frappante avec Les Ailes du désir de Wim Wenders auquel Besson emprunte beaucoup tant au niveau de l'esthétique (le parcours du personnage principal dans une ville symbolique – Paris – filmée en noir et blanc) que des retournements scénaristiques. Un point qui pourrait gêner nombre de cinéphiles tant ce parti pris artistique ne semble pas fortuit.

Dans le fond comme dans la forme, le film s'apparente en effet davantage à un exercice de style, Besson se permettant même de concrétiser le fantasme de tout étudiant en cinéma un peu trop zélé connaissant sur le bout des doigts son petit Godard et Wenders illustré, en filmant l'errance d'un personnage seul dans Paris la nuit sur fond de rock mélancolique et en noir et blanc s'il vous plait. De fait, bien que visuellement abouti, le film n'en demeure pas moins pétri de petits défauts qui, s'ils n'entâchent pas vraiment la qualité de l'ensemble, risquent d'agacer les spectateurs les plus exigeants. Ainsi, il est difficile de faire l'impasse sur Paris, soi disant vendue comme le troisième personnage du film et pourtant tristement exploitée. Le réalisateur se contentant de filmer la capitale de manière totalement anecdotique, privilégiant une esthétique carte postale par le biais d'images vues mille fois (La tour Eiffel, le Sacré Cœur…) que le noir et blanc n'arrive même pas à sublimer si bien qu'on se demande si Besson s'est vraiment remis de son film de commande pour les J.O. ! Autre point faible Angel-A : la subtilité du réalisateur est semblable à celle d'un troupeau d'éléphants puisque le long-métrage oscille constamment entre film d'auteur où Besson semble sincèrement vouloir revenir à ses premiers amours période Dernier Combat et comédie romantique hollywoodienne qui voit l'amour naissant entre deux éléments antagonistes. Un constat que ne fait que confirmer un dernier quart d'heure raté versant inutilement dans le pathos et l'excès.

Cependant et malgré ses défauts intrinsèques, Angel-A possède un certain nombre de qualités qui viennent renforcer le capital sympathie de l'ensemble. À commencer par des situations souvent drôles et des dialogues qui font mouche. Le film tout entier est porté par son duo d'acteurs : Jamel Debbouze, tout simplement parfait dans ce rôle à contre emploi de loser magnifique, démontre de véritables talents d'acteur alternant aussi bien dans le registre comique doux amer que dramatique. Véritable révélation du film, Ria Rasmussen et son air très Milla Jovovich, irradie chaque plan de sa beauté quasi angélique et affirme une véritable présence à l'écran. Ajoutez à cela une galerie (restreinte) de personnages truculents, quelques beaux moments de poésie visuelle et vous obtenez l'un des films les plus défendables de Luc Besson.

Résumé

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