Critique : Madame Henderson présente

Erwan Desbois | 5 janvier 2006
Erwan Desbois | 5 janvier 2006

Des bons sentiments, des êtres hauts en couleurs, une reconstitution historique mêlant humour et émotion, un soupçon de nudité sensuelle mais sans vulgarité : tous les ingrédients qui rendent une histoire vraie parfaite pour une adaptation au cinéma ou à la télévision sont réunis dans les événements ayant pris place dans les années 1930 et 1940 au Windmill Theatre de Londres. Sa propriétaire d'alors, Madame Henderson, une riche veuve excentrique et coriace en affaires, fit de ce lieu une légende de la scène londonienne en deux temps : tout d'abord en proposant la première revue présentant dans ses numéros des jeunes femmes entièrement nues (mais qui devaient rester immobiles à la demande des censeurs !) ; puis en faisant du Windmill Theatre l'unique théâtre de la ville à rester ouvert au plus fort de la Seconde Guerre Mondiale, pendant les bombardements allemands sur l'Angleterre.

Ce n'est pas un hasard si l'on a parlé plus haut d'adaptation au cinéma ou à la télévision : Madame Henderson présente a tout du téléfilm grand luxe. Splendeur de la recréation du Londres de l'entre-deux-guerres, réalisateur chevronné et touche-à-tout (Stephen Frears – Les liaisons dangereuses, Héros malgré lui , mais aussi High fidelity et dernièrement Dirty pretty things), et surtout casting mêlant grands noms et étoiles naissantes. Au nombre de ces dernières se comptent par exemple Kelly Reilly (révélée dans L'Auberge espagnole) et Will Young, inconnu de ce côté-ci du Channel mais « Nouvelle star » à la sauce anglaise – qui pour le coup est bien meilleure que la sauce à la menthe, tant le talent du garçon pour chanter et pour jouer est éclatant.

C'est le duo Judi Dench (Madame Henderson) – Bob Hoskins (le régisseur du théâtre) qui se charge de chaperonner ces jeunes pousses. Ils se régalent à cabotiner joyeusement dans des rôles au caractère bien trempé, et s'offrent une poignée de disputes savoureuses. Mais celles-ci restent à chaque fois sans suite, comme finalement l'ensemble des péripéties d'un scénario paresseux et qui manque d'énergie. Celui-ci a le tort de s'en tenir à une plate reconstitution des faits au détriment des personnages, dont les caractères et relations restent plus ou moins figés du début à la fin – et dont la réussite n'est que très rarement remise en cause. À tel point que quand le film se risque (enfin) à une sous-intrigue réellement dramatique dans sa dernière partie, la tentative tourne court par manque de conviction et de développement.

En plus de l'abattage des acteurs, c'est le talent de Stephen Frears qui sauve le film de la fadeur qui le guette. La mise en scène simple et chaleureuse qui est sa marque de fabrique fait en effet de nous des intimes de la troupe du Windmill Theatre. En nous faisant partager ses joies, ses peines et ses combats, il fait de ce groupe un personnage à part entière et auquel on s'attache bien plus qu'à chacun de ses membres pris séparément. Ce qui est juste assez pour élever Madame Henderson présente légèrement au-dessus de la mêlée, et en faire un sympathique divertissement.

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