Critique : We don't live here anymore

Pour son deuxième film, John Curran (lire l'interview ici) s'attaque à un sujet guère original, celui de la crise dans le couple et la tentation de l'adultère. Si on est donc en terrain connu avec We don't live here anymore (joli titre aux élans poétiques), la maîtrise et la justesse de ton constantes du cinéaste lui permettent de capter notre attention pendant toute la durée de cette histoire banale, sans que jamais le mot ne prenne ici une quelconque connotation péjorative. Par la grâce d'une mise en scène d'une rare sobriété, Curran apporte à son histoire une telle véracité et sensibilité qu'on assiste à une représentation, plus vraie que nature et troublante à bien des égards, des difficultés de la vie de couple, à mille lieues du thriller sur le même thème d'Alan J. Pakula, Jeux d'adultes.

Si Curran nous plonge très vite dans le vif du sujet en montrant d'emblée que les deux couples ont déjà une vie intime fragilisée (Jack et Edith sont déjà amants lorsque le film débute), il va par la suite prendre son temps pour scruter méticuleusement l'aggravation des blessures sentimentales causées par l'adultère, mais aussi le sentiment de culpabilité, et plus simplement les ravages du temps qui passe. La succession de petites saynètes, celles de la vie de tous les jours, loin d'être un obstacle à l'adhésion du spectateur, permet au contraire d'enraciner le récit dans une universalité propre à toucher toute personne confrontée à ce type de situation (un jour ou l'autre, l'usure du couple est une réalité à laquelle chacun peut être confronté).

Interprété par un quatuor de comédiens époustouflants (Mark Ruffalo, Laura Dern, Peter-Six feet under-Krause et Naomi Watts) capables de retranscrire avec un naturel confondant toutes les palettes d'émotions que leur personnage éprouve (à ce jeu, c'est Laura Dern qui s'avère la plus touchante), We don't live here anymore sonne constamment juste, et ce jusque dans son final amer.