Shotgun Wedding : critique pour le pire et pour le médiocre sur Amazon

La mariée était en flan

Vous avez déjà vécu un de ces apéritifs de mariage qui traînent en longueur, où le buffet tape-à-l’œil a tôt fait d’étaler ses limites et où vous vous retrouvez à grappiller des miettes faute de pouvoir compter sur quoi que ce soit de consistant ? C’est peu ou prou l’expérience qui vous attend devant Shotgun Wedding.

En désespoir de cause, vous tentez de faire connaissance avec les autres invités, mais ceux-ci n’ont rien de très captivant. On est presque surpris d’y croiser Jennifer Lopez en reine de la fête, plus en vue du côté de Netflix ces derniers temps (le documentaire Halftime qui lui est consacré, prochainement The Mother…). Elle y déroule sa partition attendue d’abonnée aux comédies romantiques face à un Josh Duhamel divorcé de son propre charisme.

Et ne comptez pas sur les convives secondaires pour vous épater par leur caractérisation : Lenny Kravitz joue les utilités dépoitraillées quand le reste du casting se débat avec des dialogues affligeants. Et franchement, on a de la peine pour D’Arcy Carden, l’inoubliable Janet de The Good , qui se retrouve ici au mauvais endroit au mauvais moment (et pas seulement dans la diégèse du film).

J’ai une consistance douteuse : J-Lo, Jello ou les deux ?

On attend de vous que vous passiez un moment amusant, mais l’humour est aussi désopilant qu’un toast improvisé par un oncle bourré. Si vous êtes d’extrêmement bonne humeur ou grisé par une overdose de Bellini, vous sourirez peut-être à quelques cocasseries : les stratagèmes « à la Kevin McCallister » à base de laque et de moustiquaire, les otages trop égocentrés pour prendre la mesure du danger… Dommage que la rigueur d’écriture et le tempo comique se soient fait la malle avec la cagnotte.

Conscient qu’il n’a pas grand-chose d’autre à vous offrir, l’organisateur tente bien de squeezer la suite en sautant directement à la lune de miel, avec une longue scène dédiée à J-Lo se trémoussant en culotte en arrière-plan afin d’appâter le spectateur son futur mari. Hélas, celui-ci, trop préoccupé par un ananas récalcitrant pour passer en mode aubergine, refuse de faire bifurquer le programme vers un porno soft des années 80. Il faudra donc boire le calice de chambre jusqu’à la lie.

American pineapple

L’incruste pirate du Lelandais violent

Lorsque les méchants pirates daignent enfin passer à « l’action » en s’incrustant après une demi-heure de bobine (temps ressenti fois 1000), on se prend à espérer que la partie « shotgun » promise va faire décoller la soirée. Las : sabotées par une réalisation affligeante, les péripéties n’excitent jamais le palpitant. À quoi bon faire mine de précipiter les tourtereaux vers la falaise pour leur permettre de se dégager dix kilomètres avant ?

En tentant de s’octroyer une dimension spectaculaire à base de tyrolienne, d’hélicoptère et de vedette lancée à pleine vitesse, le film trahit surtout son immense pauvreté technique et conceptuelle. Desservie par un montage aux fraises, l’action se réduit à une poignée d’anicroches précipitées, capturées dans des paysages philippins aussi profonds qu’une brochure de voyagiste low cost.

Et toi, qu’est-ce que tu regardes ? T’as jamais vu une femme qui se bat ?

Soucieux de contrefaire une once de modernisme pour contrebalancer la ringardise de ses ingrédients, Shotgun Wedding s’efforce de transformer Jennifer Lopez en icône badass, redesignant allègrement sa robe de mariée en tenue de combat. Ce syncrétisme combinant préciosité et pugnacité, exploitée par Sandra Bullock dans le récent Le Secret de la cité perdue, pourrait fonctionner… s’il ne dévitalisait pas sa propre menace à vouloir conserver un pied dans le second degré. Faute de pousser suffisamment les potards de l’absurde, Shotgun Wedding perd sur tous les tableaux.

Quand Beatrix Kiddo refuse que son ex bousille son mariage

Comme dans tout film d’aventure au casting mixte, le couple se soude dans l’épreuve, chacun y trouvant l’opportunité de prouver sa valeur. Hélas, l’alchimie discutable entre les deux principaux interprètes (rappelons que Josh Duhamel est venu suppléer Armie Hammer au pied levé en raison du scandale cannibalo-sexuel touchant l’acteur) trahit l’artificialité du procédé. Obstacles convenus et passages obligés s’enchaînent mollement, entre doutes réciproques, collaboration contrainte lorsque les héros sont attachés ensemble et engueulades permettant à chacun de balancer à l’autre sa vérité.

Si vous cherchez une femme sauvant son couple tout en s’accomplissant dans l’affrontement d’une menace massive qui n’exclut pas le second degré, rattrapez Everything Everywhere All at Once de toute urgence. Et s’il vous importe que la bagarre contre les vilains se déroule sur une île tropicale, il reste toujours Les Indestructibles pour vous faire porter pâle à ce dispensable Shotgun Wedding.

Shotgun Wedding est disponible sur Amazon Prime Video depuis le 27 janvier 2023 en France