La Famille Addams 2 : critique monstrueuse

Déborah Lechner | 12 octobre 2021
Déborah Lechner | 12 octobre 2021

Deux ans après le retour des Addams au cinéma, la famille la plus glauque des États-Unis part en road trip dans La Famille Addams 2: Une Virée d'Enfer, et on aurait vraiment préféré ne pas faire partie du voyage. Attention : légers spoilers !

FAMILLE RECOMPOSÉE

À défaut d'approcher le statut culte de la série des années 60 ou des deux films réalisés par Barry Sonnenfeld dans les années 90, La Famille Addams était une relecture juvénile plutôt sympathique et inattendue de la franchise. Malgré son histoire maligne qui reprenait fidèlement les thématiques de l'oeuvre de Charles Addams - la fausseté des apparences et la monstruosité tapie en chacun -, ce premier long-métrage animé a malheureusement pâti d'une animation trop rigide et d'une direction artistique dépouillée qui limitaient ses ambitions.

 

photoPas de quoi tirer la tronche non plus 

 

Cette épine dans le pied n'a cependant pas empêché le film de créer la surprise au box-office mondial avec plus de 203 millions de dollars pour un budget de seulement 23 millions, permettant à sa suite de gonfler la facture et de bénéficier d'une plastique plus soignée. On ne va pas pousser la comparaison jusqu'aux productions Disney ou Pixar, mais ce second volet a nettement relevé la barre, offrant une animation plus fluide, des textures plus travaillées et des décors moins vides.

Les scènes basées sur de l'action démesurée et des mouvements rapides et amples gagnent donc en effervescence, sans pour autant y gagner un quelconque tempo comique. En dépit des couleurs plus vives qui contrastent efficacement avec l'esthétique gothique des Addams, la formule qui consiste à jouer sur le décalage et le choc culturel est de plus en plus fatiguée.

 

photoMauvaise mixture

 

Le scénario s’interroge sur ce qui fait l’identité et la singularité des Addams, mais joue les généticiens fous avec l'ADN de l'oeuvre. Si le design des personnages est toujours calqué sur les dessins de leur créateur, le film a vampirisé son matériau d'origine et échangé le cynisme et l'acidité de son commentaire social contre un flot continu de singeries et autres pitreries inutilement bruyantes. Le tout saupoudré de quelques observations ou moqueries peu pertinentes sur la société américaine (les selfies, ce mal du siècle).

Pire sacrilège possible, la famille glauque et subversive est donc devenue consensuelle, et plus bête que méchante, phagocytée par le classement tout public obligatoire du film. L'humour noir et macabre de la franchise repose ainsi sur les frêles épaules de Mercredi, dont les répliques tranchantes et l’inexpressivité dédaigneuse sont tout ce qu'il reste de l'esprit addamsien de la licence.

 

photoLe concert de Snoop Dogg cousin Machin dont on se serait bien passé

 

FAMILLE DÉCOMPOSÉE

Plus qu'un essoufflement de l'humour avec des gags génériques et bas du front, le film - qui a par ailleurs été écrit par quatre scénaristes - se prélasse dans sa paresse (preuve ultime : ils ont filé un oeil à La Chose). Cette suite, forcément opportuniste, nous ressert donc le scénario préfabriqué des vacances en famille, pour délivrer un message standard sur les liens familiaux et l'acceptation de soi.

S'en suit une trame décousue qui enchaîne ses saynètes jusqu'au final convenu, et joue au ping-pong avec ses intrigues secondaires : l'avocat qui poursuit la famille, la crise existentielle de Mercredi, les cours de séduction de Pugsley, la mutation de Fétide en céphalopode ou la soirée géante de Grand-mère Addams. Et tout ça est ponctué de (trop) nombreuses reprises ou chansons pop et hip-hop pour tenter (en vain) de dynamiser l'ensemble et de détourner l'attention de l'histoire qui part en lambeaux.

 

photoRien de mieux qu'une ambiance estivale à l'approche d'Halloween... 

 

Autre écueil, La Famille Addams 2 fait ce que beaucoup de productions animées enfantines font pour garder l'attention des adultes : faire des références aléatoires à la culture populaire. Malheureusement, ce n'est pas avec la démarche plus cinéphile de Shrek, où la déferlante d'hommages et autres clins d'oeil faisait partie intégrante de l'univers et devenait même un jeu entre le film et ses spectateurs aguerris. Ici, la plus évidente est probablement celle de Carrie au bal du diable avec son concours de beauté maculé, qui est aussi l'occasion de changer le look intrinsèque des personnages et de jouer un peu plus maladroitement encore avec l'identité des Addams.

Après un premier film qui voulait raconter quelque chose et témoigner son affection pour le matériau d'origine, le second volet secoue donc frénétiquement les cadavres des personnages pour tenter, désespérément, de nous faire sourire. Certes, c'est un film pour les enfants, mais ce n'est aucunement une excuse pour leur servir des divertissements sans âme, sans coeur, et sans envie. Reste à espérer que La Famille Addams 3 ne voit jamais le jour et que la série Wednesday de Netflix produite par Tim Burton ne plante pas le dernier clou dans le cercueil de la franchise.

 

affiche

Résumé

Malgré de gros efforts techniques, La Famille Addams 2 : Une Virée d'Enfer est une suite insipide et opportuniste, qui manque d'inspiration et dénature la franchise avec un scénario hyperactif qui a du mal à cacher la pauvreté de son intrigue et de sa morale.

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Lecteurs

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commentaires
greg67
12/10/2021 à 17:41

Kev adams en doublage en gros sur l'affiche. Si ça c'est vendeur c'est que je vis dans un monde parallèle.

Maharbal
12/10/2021 à 17:18

COMMENT ÇA "KEV ADAMS EST GOMEZ ADDAMS" ????!!!!!! QUI EST L'INCAPABLE, VOIR L'IGNARE, QUI A VALIDÉ LE CASTING VF ???!!!

Uleertel
12/10/2021 à 16:28

ils avaient osé mettre une bande annonce de cette chose avant Dune au cinéma. ça m'a fait penser à deux chose, comment est-il possible de rater son publique cible à ce point et comment réussir à faire une bande annonce à ce point vide de sens?

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