Shaft : critique de pussy

Simon Riaux | 28 juin 2019 - MAJ : 09/03/2021 15:58
Simon Riaux | 28 juin 2019 - MAJ : 09/03/2021 15:58

Franchise moribonde, suite tardive aux faux airs de jeunisme cool, promotion plus que minimale, rachat par Netflix hors-USA… Il n’y avait pas besoin d’être devin pour sentir que Shaft version 2019 ne s’annonçait pas sous les meilleurs auspices. Mais le ratage auquel nous convie Tim Story (Les 4 Fantastiques, Mise à l’épreuve), atteint des proportions parfaitement inattendues.

ALPHA-NUL

Dès son trailer, ce nouvel épisode annonçait la couleur, se focalisant sur le nouveau personnage qu’il introduit et son dilemme central. Shaft Jr. renoue avec son paternel (Samuel L. Jackson) et va devoir lui montrer qu’on peut s’habiller comme un hipster défraîchi tout en demeurant un vrai bonhomme avec une grosse paire de balloches surtout pas épilées. Voilà pour le cœur de l’intrigue, qui se focalise essentiellement sur l’angoisse d’un homme, terrifié à l’idée que son rejeton mange plus de pains que de chattes.

À bien y regarder, l’icône Shaft a toujours incarné sans s’en excuser une forme de virilité extrêmement appuyée et dominatrice, mais pour comprendre en quoi cette suite passe complètement à côté de son héritage, il faut essayer de remettre ce dernier en contexte. Pour bourrin qu’ait été le héros des Nuits Rouges de Harlem, le pape de la Blaxploitation portait dans ses gènes une volonté de représentation, de visibilité sociale, qui s’avérait bien plus ouvert et rassembleur que la caricature qui en est faite ici.

 

photoSamuel L. Jackson en pleine scène d'action

 

Au-delà de la vision poussiéreuse de l’alpha-mâle peu avare de gamètes, ce Shaft 2019 mécomprend également le rapport du personnage à la sexualité. On se souvient ainsi que Shaft fut un des premiers héros de pop culture à considérer des personnages de fiction ouvertement homosexuels comme ses égaux, là où Tim Story fait de l’homosexualité un repoussoir, doublé d’un gag et d’un déshonneur. Et ce n’est pas le vernis de comédie trépanée qui pourra sauver l’entreprise de sa toxicité, tant l’absence de tempo des interminables échanges entre père et fils échoue à alléger le discours politique faisandé de l’ensemble.

 

NAZPLOITATION

Comme nombre d’icônes subversives, Shaft a vieilli et s’est transformé en gros pourceau grassouillet et réac, s’autocaricaturant à l’extrême. Ce triste constat pourrait ne pas anéantir le film, si celui maîtrisait les acquis de ses aînés. Malheureusement, Tim Story est aussi à l’aise avec une caméra à la main qu’un hamster névrotique avec un accélérateur à particule, s’avérant incapable d’iconiser ses personnages, de traduire leur légendaire swag, ou d’emballer une scène d’action correcte.

 

photo, Samuel L. Jackson, Richard Roundtree, Jessie Usher, Alexandra ShippUne famille formidable

 

La dimension frontale et bravache des affrontements dans la saga n’appelait pourtant pas un découpage sophistiqué ni des séquences d’action délirante, tout juste un sens de l’espace et de l’emphase. Mais le réalisateur n’est pas aidé par son casting, le pauvre Samuel L. Jackson traînant atrocement la patte, et ce dès la piteuse intro où il doit composer avec un rajeunissement numérique abominable. Sa vélocité d’opossum arthritique n’est malheureusement pas compensée par le jeu de Jessie T. Usher, manifestement aussi embarrassé que le spectateur par le spectacle qui se liquéfie sous ses yeux.

La tentative de discours politique s'avère peut-être la dimension la plus navrante au sein de ce ratage, alors que Shaft tente de réactualiser la nécessité pour son héros de ne pas collaborer avec les institutions étatiques, racistes par essence. Si le métrage parvient à paresseusement singer le verbe de ses ancêtres, il se révèle incapable de le remettre en perspective avec un monde qui lui sert pourtant son argumentaire sur un plateau. Prompt à dénoncer la vilénie de l'homme blanc, le film est encore trop lâche pour évoquer directement Black Lives Matter, ou le racisme à peine voilé d'un Trump. Artificiel et hypocrite jusqu'au bout.

 

affiche definitive

Résumé

Exercice de sabotage d'une rare efficacité, cette suite de Shaft s'avère incapable de proposer quoi que ce soit de divertissement, recouvrant l'ADN politique de la saga d'une patine réactionnaire absurde.

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Lecteurs

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commentaires
Dutch Schaefer
28/12/2019 à 13:01

Je l'ai trouvé relativement sympa moi ce film!
Ce qui au demeurant reste son but ultime!
Pas un chef d'oeuvre, mais un agréable moment dans des codes bien définis!

charly
12/09/2019 à 20:39

200 pour cent d'accord avec la critique

aucun interet,aucun rythme,a part s'ennuyer je ne vois pas

Ian
24/07/2019 à 23:52

Très bon film ! Aucune seconde d ennui, bon scénario. Je conseil

Troublefetes
18/07/2019 à 16:04

Écrire cela, c'est surtout démontrer qu'on est pas vraiment au courant de ce qu'est black live matters.

( et c'est d'autant plus grave que ne pas savoir ce qu'est shaft..)

Simon Riaux
02/07/2019 à 10:35

@Get

"Démonter le film comme ça c’est n’avoir rien compris ni à Shaft, ni à sa suite."

Ecrire cela, c'est surtout démontrer qu'on n'est pas vraiment au courant de ce qu'est Shaft.

Get
02/07/2019 à 00:12

Lire les critiques écran large c’est au final comme se taper un très mauvais restaurant.

Tu pense que ça va être nourrissant pour au final avoir une phénoménale envie de vomir en fin de table quand tu tente l’effort de tout absorber par respect pour le chef qui n’en mérite au final pas tant.

Démonter le film comme ça c’est n’avoir rien compris ni à Shaft, ni à sa suite. On est pas devant le film du siècle mais certainement pas le navet décrit.

On passe un bon moment, on retrouve le personnage macho à grosses vannes grasses, quelques pépites sonores et référence au premier avec une histoire père/fils qui colle pas mal au personnages.

Faut pas se leurrer, les gens veulent passer un bon moment est non pas décortiquer un film comme un docu/reportage de 2 heures sur les tensions raciales, l’homophobie, la misogynie ou encore le fait que Samuel L Jackson ait été rajeuni numériquement 3 foutus minutes.

Ce serait pas mal d’être simple et efficace un de ses jours non?

corleone
01/07/2019 à 21:59

Tant que les "minorités" continueront à se marcher dessus tel un panier de crabes pour se faire valoir auprès de la norme autoproclamée supérieure, on en sera là.

Enoughisenough
01/07/2019 à 19:43

Mais qu'est-ce que c'est que ce commentaire haineux ? J'ai bien peur que vous ayez pris le film trop au sérieux. Il reste divertissant malgré tout (même si JJ Shaft reste mal écrit, il aurait pu plus porter ses c* et assumer son personnage que d'essayer de devenir un nouveau shaft eco+
Pas un film ne peut sortir maintenant sans passer à travers le peigne finement obséquieux des visées féminazistes. On ne regarde pas Shaft joué par SL Jackson pour une tranche de speech social crédible, plus pour des personnages caricaturés à outrance. C'est ce que j'attendais, c'est ce que j'ai eu. L'auteur de cette "critique" absolument naze, je suis désolé, s'attendait peut-être à 12 years a slave! Et ça veux dire quoi "Critique de pussy?" vous ne comprenez même pas les termes employés dans le film. Vous ne pouvez pas faire une critique de pussy et la réclamer de pussy, ce n'est pas comme ça que ça marche. Votre critique m Riaux est une critique de sjw en manque de sujets à croquer.

Simon Riaux
01/07/2019 à 16:12

@Ou du complexe de ne pas l'etre ...

Bah oui, tous ces chauves avec leurs beaux crânes glabres, quand je dois lutter avec une crinière d'épis, ça me fout la rage.

M
01/07/2019 à 15:57

À l'ère du politiquement correct, des minorités imposée pour diversifier un casting composé de blanc, des lgbtqi, ce film est comme une brise polaire pendant un samedi de canicule.

Pour ma part j'ai vraiment bien rigolé. C'est toujours un plaisir d'entendre Samuel L. Jackson s'exprimer ouvertement. Certes, l'histoire est complètement pétée mais ça se laisse regarder en ayant déconnecter son cerveau au préalable. J'étais vraiment étonné que Netflix sorte ce film alors que c'est les premiers à nous foutre du "progressisme" dans la plus part de leurs œuvres.

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