LA FAMILLE MEYEROWITZ
Daniel (Adam Sandler) et sa fille (Grace Van Patten) discutent dans leur voiture. Ils cherchent une place de parking pour se rendre à leur déjeuner familial. Agacé de ne pas trouver de place suffisamment grande pour son break, Daniel s’énerve des klaxons des autres automobilistes. Bouillonnant, il ne cesse de perdre ses nerfs, enchaînant les insultes contre les chauffeurs impatients pendant que sa fille lui explique qu’elle va devenir végétarienne.
Avec son ouverture, The Meyerowitz Stories se présente comme une comédie familiale agitée, à l’écriture percutante et augure une ambiance conflictuelle jouissive. Sur son ensemble, le film tient parfois sa promesse grâce à quelques dialogues bien ciselés, des situations plutôt amusantes – une poursuite aux ralentis dans les rues de Manhattan, une voiture explosée ou encore une bagarre entre frangins – et un casting débordant d’énergie. Adam Sandler, furieux ou dépressif, a rarement été aussi bon à l’écran, Ben Stiller est brillant et surtout Dustin Hoffman, parfait, dont l’absence au cinéma se fait de plus en plus grande.
Noah Baumbach, Adam Sandler et Dustin Hoffman sur le tournage
I AM CLICHÉ
Pourtant, au fil des minutes, le film acheté par Netflix se révèle être une simple chronique familiale comme on en a déjà vu des milliers au cinéma. Même s’il n’a jamais caché l’influence de Woody Allen sur son travail, Noah Baumbach subit les conséquences de cette admiration à l’écran. Dans The Meyerowitz Stories, il est incapable de s’en détacher, l’ombre du réalisateur de Manhattan plane durant tout le long-métrage sans que jamais le réalisateur n’atteigne le génie de son mentor.
Malgré sa multitude de thématiques riches (amour familial, succès professionnel, reconnaissance personnelle…), Noah Baumbach ne réussit pas à développer profondément ses personnages. En résulte un scénario qui manque cruellement de personnalité, sans réelle réflexion philosophique, trop bavard et plombé par l’accumulation de caricatures et clichés inhérent au genre.
Le duo Sandler-Stiller est un des seuls atouts du film
VANITÉ QUAND TU NOUS TIENS !
Amusant, celui qui décrirait finalement le mieux la dernière œuvre de Noah Baumbach est le centre de gravité du dit film : Harold Meyerowitz, le père aigri et égoïste incarné par Dustin Hoffman. Lors d’une discussion avec son fils Daniel (Adam Sandler) dans les rues de New-York, l’ancien artiste critique son ami/ennemi sculpteur L.J. Shapiro : « Il est populaire mais insignifiant. Ses travaux sont superficiels et sans aucune surprise. Je sais que tu l’aimes bien mais il ressasse des clichés ».
Un petit monologue qui s’accorde presque parfaitement à The Meyerowitz Stories et la carrière du réalisateur américain. Si elles sont plutôt populaires dans le cercle du cinéma indépendant d’outre-Atlantique, la plupart des œuvres de Baumbach sont souvent vaines et superflues, terriblement convenues et sans panache, tout en étant dénué d’une mise en scène audacieuse.
Reste uniquement ce petit côté attachant avec ses protagonistes en perdition personnelle. Malheureusement, ils s’avèrent mal exploités aussi, les personnages les plus touchants et intrigants du film restant relégués au second plan. A l’image d’Eliza (Grace Van Patten), la jeune fille de Daniel, mise en avant trop tardivement (et discrètement) dans le récit, de la femme hippie du patriarche (Emma Thompson) trop rapidement oubliée ou de la soeur sacrifiée, la toujours excellente Elizabeth Marvel. Dommage.