L'épisode culte : X-Files et Tooms, l'inoubliable tueur élastique

Geoffrey Crété | 3 novembre 2016 - MAJ : 09/03/2021 15:58
Geoffrey Crété | 3 novembre 2016 - MAJ : 09/03/2021 15:58

Parce qu'il n'y a pas que le cinéma dans la vie d'un cinéphile, nouveau rendez-vous nostalgique sur Ecran Large : l'épisode culte, qui reviendra sur un morceau de choix d'une série remarquable. 

Dans la très longue liste des créatures rencontrées par Mulder et Scully en 10 saisons, chacun a sa préférence, son petit coup de coeur ou traumatisme d'enfance sur M6. Un dossier y a même été consacré pour que la rédaction partage ses cauchemars.

Mais une chose est certaine : personne n'aura pu oublier Eugene Tooms, le tueur aux bras longs, star de deux épisodes de la première saison diffusée en 1993.

 

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LES YEUX JAUNES DU TOOMS

X-Files a ainsi frappé fort dès son troisième épisode, intitulé Compressions (Squeeze). L'affaire commence avec une paire d'yeux jaunes dans une bouche d'égoût de Baltimore, fixés sur un homme d'affaires qui sera attrapé dans son bureau par une mystérieuse créature passée par la bouche d'aération.

Ces yeux appartiennent à Eugene Tooms, sorte de Mister Fantastic machiavélique qui hiberne pendant plusieurs décennies avant de se repaître de foies humains pour survivre. La bête a l'étrange capacité d'allonger ses membres pour atteindre discrètement ses victimes en passant par des ouvertures réduites. Autant dire que l'image est aussi perturbante qu'efficace, touchant aux peurs les plus intimes de chacun. Le regard doucement fou de Doug Hutchison, formidable dans le rôle de Tooms, et la musique délicieusement stridante, font le reste.

 

Photo Eugene Tooms

 

SANS ALIEN

Après deux premiers épisodes centrés sur des aliens et les conspirations, la Fox demande à voir une autre facette de l'univers, en accord avec Chris Carter qui a toujours envisagé la série de cette manière. La chose est adressée dans un dialogue où, répondant à Scully, Mulder s'exclame : "Non ! Je n'ai trouvé aucune preuve de la présence d'alien".

L'idée de Tooms a germé dans l'esprit dérangé de James Wong et Glen Morgan (producteurs exécutifs et scénaristes de six épisodes de la première saison) dans les bureaux de production, un soir. A la recherche d'une idée, le duo s'est arrêté sur une bouche d'aération dans la pièce : "Et si on travaillait tard ici et qu'un mec venait par là ?".

Egalement inspiré par Jack l'éventreur et le Night Stalker, un tueur en série des annes 80 qui entrait chez ses victimes par la fenêtre de la salle de bain, Wong et Morgan ont trouvé le premier Monster of the Week de la série. Chris Carter amènera l'idée du foie humain, marqué par une visite en France où il a découvert le foie gras. Ils décident aussi de mettre l'accent sur la hiérarchie des héros, et la pression exercée sur Mulder et Scully, afin d'étoffer les personnages.

 

Photo Eugene Tooms

 

DECOMPRESSION

Si Compressions est devenu l'un des épisodes les plus appréciés de X-Files, considéré par beaucoup de fans comme l'un des meilleurs, il a connu une production difficile voire chaotique. Le réalisateur Harry Longstreet (qui ne retravaillera plus sur la série) a ainsi été quasiment remplacé pour boucler le tournage, les scénaristes et producteurs étant insatisfaits des images tournées. Interrogé depuis, James Wong a raconté que le réalisateur ne respectait ni l'équipe créative, ni le scénario, ni même le genre. Morgan a lui aussi affirmé que Longstreet avait été un sérieux problème, au point de ne pas tourner toutes les scènes prévues.

Wong a fini par terminer le travail pour tourner des plans et scènes supplémentaires, afin de peaufiner l'épisode lors de longs reshoots. Malgré le très accueil à la diffusion, le duo de scénaristes restera marqué par l'expérience amère. Déçus de voir que l'épisode aurait pu et dû être mieux, ils expliquent qu'il a été sauvé en post-production, et que la réussite revient principalement à Doug Hutchison, interprète de Tooms.

 

Tooms

 

IL EST DE RETOUR

La frustration de James Wong et Glen Morgan les poussera à écrire Le Retour de Tooms (Tooms), épisode 21 de la première saison. Là encore, l'idée est venue d'une chose anodine : le duo pose les yeux sur un escalator en réparations, et imagine un monstre vivant là. Cherchant une manière d'offrir de bons frissons au public dans la dernière ligne droite de la saison, Chris Charter et les scénaristes ont alors pensé à donner une suite à Tooms, qui avait été un succès côté audiences et fans.

Cette fois, c'est David Nutter qui est choisi. Il a réalisé plusieurs solides épisodes de la saison 1, comme le mémorable Projet Arctique (lui aussi scénarisé par Wong et Morgan), et deviendra par la suite un nom incontournable de la TV - avec même une parenthèse cinéma délicieuse, Comportements troublants en 1998 avec Katie Holmes et James Marsden.

L'intention est claire : offrir à Tooms un épisode à la hauteur, et rattraper quelques erreurs de Compressions. Le Retour de Tooms permet également à la série de rouvrir le dossier conspiration et présenter pour la première fois Skinner, l'un des personnages majeurs de la mythologie.

 

Photo David Duchovny, Tooms

 

La réalité n'est cependant jamais loin puisque l'écriture sera directement influencée par l'épisode Quand vient la nuit (un autre grand moment de la série, avec ces affreuses lucioles), dont le tournage en extérieur a été très compliqué. James Wong et Glen Morgan écrivent donc Le Retour de Tooms avec la consigne officielle de se cantonner aux décors intérieurs. Sans oublier qu'arrivée au 21ème épisode sur les 24 de la saison, l'équipe est épuisée, alors même que le succès grandissant de la série les a placés sous les projecteurs. 

Le Retour de Tooms ne bénéficie plus de l'effet de surprise, mais reste redoutablement efficace. Il offre une conclusion digne à cet antagoniste inoubliable, et se paye notamment un final excellent sous le fameux escalator. Le personnage de Mulder, tiraillé entre sa soif de justice (la scène hallucinante du procès) et sa crainte de la hiérarchie ("Je sais qu'ils veulent fermer les X-Files"), gagne en outre en nuances.

Ainsi Eugene Tooms est entré dans la légende X-Files, notamment parce qu'il est l'un des rares monstres à avoir eu l'honneur d'une suite - en plus d'être mentionné à quelques reprises.

 

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Photo Eugene Tooms

 

 

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commentaires
JImmy
04/11/2016 à 15:58

Traumatisme. Cette musique, ces yeux... c'est X-Files au top de sa forme. La série a eu (pour moi) plus de mauvais que de bon, mais était capable de très bon dans le genre.

Baneath88
04/11/2016 à 14:57

@Totempkof:
Je suis d'accord, la réussite est le fruit d'une collaboration entre des scénaristes audacieux et une direction artistique cohérente.
Comme l'a dit Hitchcock "Meilleur est le méchant, meilleur est le film". Doug Hutchison accomplit à lui-seul une performance absolument remarquable en un minimum d'effort. À mes yeux, il s'agit ni plus ni moins du psychopathe le plus terrifiant de la série, et l'une des créations les plus glaçantes qu'a pu offrir la télévision. Et les idées saugrenues apportées par le duo de scénaristes James Wong/Glen Morgan ne font qu'amplifier le caractère menaçant du personnage.
Il est clair que le duo est à l'origine de nombreux coups d'éclats dans X-Files. J'espère que la 11è saison verra apparaitre de nouveaux monstres de ce calibre.

Totempkof
04/11/2016 à 10:49

@Baneath

Y'a une différence entre dire qu'il est en très grande partie responsable, et dire qu'il l'est quasiment totalement. A la base, si l'épisode est très bon, c'est grâce à Wong et Morgan qui ont eu l'idée du personnage. L'acteur est bon, évidemment, mais il fallait l'imagination des scénaristes en tout premier lieu. C'est quand même pas négligeable (et c'est particulièrement évident quand on regarde que les épisodes signés par le duo, souvent excellents).

Baneath88
04/11/2016 à 00:44

Je pense pouvoir affirmer que Doug Hutchison est en très grande partie responsable de l'immense réussite que fut ce double-épisode. Son visage froid, son regard absolument glaçant, sa façon de se mouvoir. Cette performance tient du génie. Tooms est déjà bien terrifiant sans les effets. Mais avec, c'est sûr qu'avec la musique qui colle parfaitement à l'ambiance bien sinistre, la réalisation maline, et les idées scénaristiques qui font froid dans le dos, c'est encore bien mieux.
Cet acteur, c'est vraiment un gâchis de ne pas l'avoir utilisé plus souvent. Il était juste brillant de cruauté dans La Ligne Verte. Il a vraiment un visage singulier, il aurait tout à fait pu camper d'autres méchants bien horribles. Ce Tooms est une vraie pépite.
Vous avez oublié de signaler que Les Experts y ont rendu un hommage direct. Dans l'épisode 19 de la saison 2, une dépouille était trouvée sur les lieux d'un crime dont tous les accès étaient verrouillés de l'intérieur (tiens). Et le coupable est interprété par Doug Hutchison lui-même. On pourra également remarquer les similitudes dans la musique "stridante"

Totempkof
03/11/2016 à 23:01

@Gaidon

Donc les scénaristes, la musique, la réalisation, les effets spéciaux, c'est 1% ? Eh bien. Intéressant.

Gaidon
03/11/2016 à 22:51

L'interprète de Tooms est responsable à 99% de la réussite de cet épisode ; vraiment flippant

Baneath88
03/11/2016 à 19:47

Merci Écran Large, cette chronique, je l'attendais!