Inside No. 9 : 9 épisodes géniaux de cette série à la Black Mirror dispo sur Arte

La Rédaction | 2 octobre 2020 - MAJ : 09/03/2021 15:58
La Rédaction | 2 octobre 2020 - MAJ : 09/03/2021 15:58

Le petit phénomène britannique, de et avec Steve Pemberton et Reece Shearsmith, arrive (enfin) en France, sur Arte.

Elle excite les esprits depuis 2014 de l'autre côté de la Manche, et elle arrive enfin en France, légèrement en retard : dès le 1er octobre sur Arte (et en replay donc), la série britannique Inside No. 9 débarque.

Inévitablement comparée à Black Mirror, même si c'est plus proche des Contes de la crypte au fond, Inside No. 9 est une anthologie : chaque épisode est une nouvelle partie de plaisir (noir), qui peut être regardée indépendamment et dans n'importe quel ordre. Car oui, la création de Steve Pemberton et Reece Shearsmith (qui jouent également dans chaque épisode) est un concentré d'humour noir, à base de twist et idées tordues.

Petit guide pour s'essayer à Inside No. 9, en visant quelques-uns des épisodes les plus marquants, le tout en évitant un maximum les spoilers pour que chacun puisse ensuite se laisser tenter.

 

photoPuisqu'on te dit gentiment de tenter un épisode ou deux

 

sardines

Sous ses airs un peu légers, un épisode introductif qui fait office d'avertissement. Réalisé par David Kerr, Sardines commence un petit jeu sans conséquence : lors d'une joyeuse fête de famille dans un manoir, une partie de cache-cache amélioré mène tous les convives à peu à peu se retrouver dans une grande armoire. Dans cet espace clos qui rétrécit à mesure que les gens s'y enferment, les langues se délient, les masques tombent, et chacun commence à dire le fond de sa pensée.

Le pitch a beau ressembler à une comédie avec Florence Foresti et Guillaume de Tonquedec, Sardines est un petit jeu de massacre diabolique, qui tient en haleine jusqu'aux ultimes secondes, où tout devient clair dans un effet de sidération terrible. Avant ça, le doute est permis, tandis que les acteurs (notamment Katherine Parkinson, bien connue des gens ayant bon goût avec The IT Crowd) s'en donnent à cœur joie pour s'envoyer de petits missiles.

Et si le twist est une ficelle très familière, le plaisir sadique avec lequel la série déploie celui de Sardines, pour étouffer les rires dans une terreur effroyable, est une note d'intention très claire sur les ambitions de l'anthologie. Inside No. 9 est là pour le rire, la surprise, mais pas que. Préparez-vous.

 

photo, Katherine ParkinsonCe n’est pas l'armoire de Narnia, c'est sûr

 

a quiet night in

Indiscutablement parmi les morceaux les plus mémorables, grâce à un parti pris aussi simple que génial : l'épisode est muet (ou presque). Cette banale histoire de cambriolage, où deux voleurs ridicules pénètrent dans une maison de luxe pour dérober un tableau, se transforme alors en irrésistible sketch digne de Blake Edwards-Peter Sellers. Avec Oona Chaplin dans un des rôles, pour rendre hommage à son arrière grand-père.

Détecteur de mouvement pour la lumière, sonnerie de SMS, chien collant ou géant, lessive surprise, monte-charge problématique, poupée gonflable un peu usée, invité inattendu... c'est un festival de problèmes et contretemps. L'art du tempo et de la narration est vital dans un tel exercice, et le réalisateur David Kerr (Johnny English contre-attaque) s'en sort à merveille. L'utilisation astucieuse du décor pourtant classique offre pas mal de surprises, et quelques amusants jeux avec les surfaces vitrées, tandis que l'écriture très efficace déroule les conflits au sein de la demeure avec une belle économie de moyens.

Impossible de ne pas saluer quelques éclats, comme le chien "rangé" à coup de parapluie, la révélation des toilettes, ou bien sûr la conclusion pleine d'ironie mordante. A Quiet Night In est un petit bijou dans le genre, qui se regarde avec un plaisir immense.

 

photoDumb et Dumber

 

the devil of christmas

Un épisode spécial pour fêter Noël dans le kitsch des guirlandes, le malaise des séries B et le sadisme d'Inside No. 9. The Devil of Christmas commence comme un hommage aux vieux films d'horreur ridicules, avec décors et acteurs en carton : une famille fringuée comme dans une affreuse sitcom vient passer les fêtes de fin d'année dans un chalet des Alpes, et commence à avoir peur que Krampus vienne les chercher. Très vite, quelques signes annoncent que la bête les a choisis comme prochaines victimes, et la mère, enceinte, commence à paniquer.

C'est le point de départ de l'épisode, et impossible d'en dire plus pour ne pas gâcher les surprises. Réalisé par Graeme Harper, bien connu des amateurs de Doctor Who puisqu'il a réalisé des épisodes de la série originelle et moderne, The Devil of Christmas est un plaisir pour les yeux, avec une maîtrise du rétro qui fait plaisir à voir - dans les décors, l'interprétation, la mise en scène, le son.

Et comme les apparences sont bien évidemment trompeuses, cet exercice de style cache un ou deux visages détonants, et particulièrement noirs. Le rire laisse peu à peu place au malaise, à l'inconfort et finalement à un choc aussi drôle que terrible. Un joli tour de force narratif, et certainement un sommet d'Inside No. 9.

 

photoOld school présente

 

The Bill

Les cinéphiles qui ont encore en tête la discussion drôle des bandits de Reservoir Dogs sur le pourboire durant l'ouverture du film de Quentin Tarantino prendront sûrement leur pied devant The Bill. L'épisode est construit autour d'un postulat de départ extrêmement simple : quatre amis sont au restaurant et finissent par s'entredéchirer quand vient le moment de payer l'addition. Une trame qui pourrait très bien faire l'objet d'une pièce de théâtre de boulevard et qui n'est d'ailleurs pas sans rappeler Le Prénom dans sa manière de sonder les amitiés.

Très vite, il y a évidemment la crainte que l'idée de départ tourne un peu en rond et pourtant, The Bill réussit en permanence à relancer la machine du cynisme, des non-dits et des faux-semblants pour offrir un spectacle à la fois drôle et touchant, vicieux et manipulateur. Sans limites, l'écriture ira même jusqu'à complètement plonger ses personnages, au fur et à mesure, en pleine déroute avant de les confronter à un pur cauchemar disproportionné (vu le point de départ), chacun perdant le contrôle de la situation (à moins que ?).

Car oui, comme la plupart des épisodes de la série, The Bill n'échappe pas à un petit twist malsain et jubilatoire qui vient remettre en cause toutes les certitudes des spectateurs et des personnages. Pas sûr que vous retourniez au restaurant avec vos amis de sitôt après ça.

 

photo, Steve Pemberton, Reece ShearsmithIl est temps de payer l'addition

 

THE RIDDLE OF THE Sphinx

Avec son manoir, son unique pièce, son ambiance pluvieuse et sombre, son duo de personnages et leur sublime jeu du chat et de la souris, The Riddle of the Sphinx est un hommage assez évident à l'immense Le Limier de Joseph L. Mankiewicz. Le chef-d'oeuvre du réalisateur (pourtant assez méconnu du grand public) était lui-même tiré d'une pièce de théâtre récompensé d'un Tony Award en 1970, alors quoi de plus naturel de voir un épisode de l'anthologie britannique s'en inspirer.

The Riddle of the Sphinx raconte donc, dans un premier temps, la rencontre entre une étudiante et un professeur d'université lorsque la première pénètre par effraction chez le premier, prétextant adorer les mots croisés qu'il crée pour un célèbre journal. Toutefois, très rapidement, l'épisode dévoile les véritables desseins de l'étudiante et multiplie les rebondissements pour révéler les vrais enjeux de cette rencontre devenue confrontation.

Mieux encore, le récit est construit autour de la découverte des mots dissimulés dans la grille de mots croisés, et l'intrigue se fait un malin plaisir à surtout faire de petits clins d'oeil (extrêmement subtils) aux spectateurs, démontrant qu'il aurait pu lui-même découvrir la conclusion de l'épisode avant son grand twist final. Car oui, comme disait Tchekov chaque détail compte et si un objet apparaît, il aura son utilité. Méfiez-vous donc des apparences.

 

Photo Alexandra Roach, Reece Shearsmith, Steve PembertonToute action ou scène secondaire ajoutée à celle qui fait le sujet principal d’un tableau

 

ZANZIBAR

Ouvrant la saison 4 de la série britannique, Zanzibar semble sur le papier un simple épisode de vaudeville où les portes s'ouvrent, se referment et claquent de manière incessante quand les quiproquos sont légion. Et à dire vrai, c'est ce qui fait évidemment tout le charme, en partie, de cette sublime comédie pleine de rebondissements, de confusions et donc d'amusements. L'épisode jongle d'ailleurs admirablement entre les genres, de la comédie au tragique en passant par la romance et le drame familial, largement aidé par une bande originale dévouée aux variations brusques du récit.

Toutefois, se contenter de pasticher purement et simplement le Vaudeville ne correspondrait pas tellement au duo Shearsmith-Pemberton. De fait, les deux hommes se sont amusés (et surtout cassés la tête) à écrire l'entièreté de l'épisode en pentamètre iambique (soit des vers composés de cinq iambes). Bref, une forme d'écriture largement utilisée dans les poèmes grecs et particulièrement appréciée de Sir William Shakespeare en son temps.

L'écriture de cet épisode est donc un tour de force à elle seule, jouant habilement des mots pour livrer des répliques élégantes, gracieuses et regorgeant de jeux de mots astucieux. Les anglophones y prendront sans doute plus de plaisir que les non-bilingues, mais cela reste un pur délice, que l'on soit un amateur des écrits de l'auteur de Hamlet. Et si la poésie des dialogues ne vous inspire pas, la double prestation de Rory Kinnear, en plus des autres, devrait largement suffire à faire votre bonheur.

 

photoLe Vaudeville à la mode shakespearienne

 

Once Removed

La plupart des épisodes de Inside No. 9 se terminent par un twist devenu quasiment la marque de fabrique de la série, et Once Removed n'échappe évidemment pas à ce quasi-systématisme. Pour autant, les scénaristes ont fait le choix de chambouler sa narration pour lui donner une tout autre valeur. 

Once Removed est en effet construit de manière anti-chronologique, un peu à l'image du Irréversible de Gaspar Noé (dont on vous parlait justement ici) ou du fameux Memento de Christopher Nolan, et remonte le fil de son histoire pour mieux en démêler les actes terribles qui se déroulent devant nos yeux et en faire une farce meurtrière brillante. Avec ce nouvel épisode, la série britannique se fait un malin plaisir à remonter le temps et multiplier les petits détails anodins pour faire se questionner le spectateur en permanence sur l'identité de chacun (et notamment celle du personnage de Reece Shearsmith, encore une fois déroutant).

Savamment construit, l'épisode est d'ailleurs brillamment écrit. La chronologie étant inversée, les actions prennent des sens différents lorsque la véritable cause est révélée plus tard dans l'épisode. De fait, les petites phrases ont souvent des doubles sens et préfigurent avec malice des retournements de situations qui attendent les spectateurs, mais que les personnages ont, eux, déjà vécus. Et puis rien que pour son plan final (ou presque) drôlement jouissif, Once Removed mérite toute votre attention.

 

Photo Emilia Fox, Reece ShearsmithInside No 6

 

DEAD LINE

Grande particularité de cet épisode spécial Halloween : il était diffusé en direct, un procédé spectaculaire déjà utilisé par d'autres séries, comme Urgences en 1998 pour ouvrir la saison 4. Il est primordial d'avoir ça en tête, puisque tout l'exercice malin de Dead Line repose sur ce principe, parfait piège pour le spectateur qui passera une grosse partie de l'épisode à s'interroger sur ce qu'il voit à l'écran (20% de téléspectateurs ont changé de chaîne lors de la diffusion, croyant à de vrais problèmes).

Seul épisode d'Inside No. 9 réalisé par Barbara Wiltshire, Dead Line commence comme un petit conte classique de Halloween, avec un vieux monsieur qui ramène chez lui un téléphone portable retrouvé au cimetière, et reçoit d'étranges appels. Bien sûr, ce n'est que la face émergée de l'iceberg et très vite, l'épisode glisse vers autre chose, dans un délicieux jeu avec le réel et la fiction.

Si le fond de l'histoire restera sûrement un peu trop banal pour tout amateur de genre, Dead Line mérite le coup d'œil pour le reste. Steve Pemberton et Reece Shearsmith ont rarement aussi bien exploité leur fibre de petits malins et sales gosses, que dans ce grand piège tendu au spectateur, qui s'amuse avec intelligence de la nature même d'Inside No. 9. C'est d'autant plus joli que c'est une humble, mais touchante, déclaration d'amour au fantastique, qui replace les créateurs dans la réalité du genre, pour une mise en abime irrésistible.

 

photo

 

MISDIRECTION

Misdirection raconte l'interview d'un magicien mondialement connu avec un jeune étudiant en journalisme fan de magie (incarné d'ailleurs par Fionn Whitehead, le héros de Dunkerque). Sauf qu'évidemment, comme son titre l'indique assez clairement, ce sera évidemment une fausse piste, ou plutôt l'une des nombreuses (après tout, il est question de magie) qui seront au coeur de ce nouvel épisode d'environ 30 minutes.

Sur le papier, et après visionnage, Misdirection pourra paraître classique, voire même trop attendu par ceux qui seront les plus attentifs, et pourtant il est particulièrement inventif. S'inspirant assez magistralement de Usual Suspects sans jamais le copier et se contentant au contraire de lui rendre un petit hommage, il est évidemment question de duperies et d'espiègleries dans cet épisode. Saurez-vous déchiffrer les signes et lire entre les lignes ? Remarquerez-vous les indices ? Comprendrez-vous les véritables motivations et surtout les vrais enjeux ?

Il est souvent question de vengeance dans Inside No 9 et l'on comprend très vite qu'il en sera question ici. Cependant, qu'elle aboutisse ou non, si elle est généralement réjouissante et salvatrice, s'y mange souvent avec beaucoup de sang et d'ironie dans la série, la revanche dissimule cette fois une autre facette où le (moins) cruel, pourrait ne pas être celui qu'on croit. On vous avait prévenu : fausse piste.

 

Photo Reece Shearsmith, Steve PembertonEncore un sacré tour de magie signé Shearsmith et Pemberton

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commentaires
Geoffrey Crété - Rédaction
02/10/2020 à 16:53

@Raptor @Euh

Erreur lors de la publi, oups

Euh
02/10/2020 à 16:43

Je me posais la même question que Raptor :)

Raptor
02/10/2020 à 16:20

Quel rapport avec l'image de L'Orphelinat ?