Teacup ? Ou t’y pas cup ?
Dans un village rural de la Géorgie, une famille bien sous tout rapport (a priori), les Chenoweth, avec le père James (Scott Speedman), charpentier, la mère Maggie (Yvonne Strahovski), vétérinaire, et leurs deux marmots, Arlo, le fils un peu lunaire, et Meryl, la fille ado – parce que pour Teacup, ado c’est une caractérisation suffisante –, vont faire face à une menace invisible. Une force ou une créature rôde autour du bled, menaçant leur vie.
Dès les premiers épisodes, Teacup montre les signes d’un récit qui ne sait pas où il va. L’intrigue tente de jongler entre plusieurs registres , l’horreur d’un ennemi invisible, le thriller paranoïaque à la The Thing, et le drame psychologique familial. Malheureusement, au lieu de bâtir une histoire complexe et riche, ses propres ambitions la parasitent.

En fait, Teacup ne choisit jamais son camp. Elle veut être un drame rural, un film d’horreur lovecraftien, une critique du rêve américain avec sa fausse bienveillance envers celui qui est différent. Et ce faisant, elle n’est rien de tout ça et bondit d’un sujet à l’autre sans cohérence. Quand la série tente d’imposer un contexte cruel et un moment de tension (dans l’épisode 3 « Quiet for No Reason »), elle glisse sans crier gare vers une tentative de discours sur le complotisme, censée ancrer la série dans une lecture contemporaine, mais qui vire rapidement au ridicule.
Et que dire de la figure du “croquemitaine” au masque à gaz, introduit comme un antagoniste mystérieux et menaçant. L’idée d’une silhouette inquiétante, surgissant dans un contexte déjà tendu, aurait pu fonctionner si elle avait été exploitée avec finesse. Mais Teacup gâche cette piste en livrant très vite un twist sans surprise ni enjeu réel, transformant ce personnage en simple gadget narratif. Ce qui aurait dû nourrir la tension ne fait que souligner l’inconsistance globale du scénario.

Chaque épisode introduira de nouveaux personnages qui seront juste là pour augmenter le body count de la Némésis, et tentera de lancer tout un tas de nouvelles sous-intrigues sans les développer, accumulant des rebondissements forcés (cette famille parfaite ne l’est pas ? Incroyable) et des révélations sans impact (olala, ce méchant n’en était donc pas un). Très vite, on ne sait plus ce que la série essaie de raconter et on a l’impression que les scénaristes non plus.
Pire encore, Teacup donne l’impression d’improviser son histoire au fil des épisodes. Ce qui commence comme un huis clos oppressant avec la promesse d’une horreur paranoïaque bascule progressivement vers un récit flirtant avec une science-fiction post-apocalyptique, mais sans jamais poser les bases d’un univers cohérent. La fin de la saison 1, qui ouvre maladroitement sur une possible saison 2 façon Walking Dead, avec un groupe de survivants face à un monde envahi, sonne creux. On n’y croit pas un instant, faute d’avoir construit les enjeux et l’émotion nécessaires.

Songe d’une nuit de thé
Et si Teacup ne tient absolument pas la route, c’est surtout à cause de l’écriture de ses personnages. Malgré un casting de qualité (mention au jeune Caleb Dolden, impeccablement insupportable), la série parvient à rendre chaque protagoniste insipide, incohérent ou carrément agaçant. La très talentueuse Yvonne Strahovski se trouve enfermée dans un rôle cliché de mère protectrice traumatisée, sans la moindre évolution crédible. Scott Speedman, en père tourmenté, brandit allègrement la palme des dialogues les plus insipides et des décisions absurdes.
Au-delà de leur manque de profondeur, les personnages de Teacup partagent tous un défaut commun : ils agissent constamment de manière stupide. Chaque choix qu’ils font semble être le pire possible, non pas par fatalité ou erreur humaine, mais parce que le scénario les pousse artificiellement dans cette direction. Ouvrir une porte alors qu’ils savent qu’un danger rôde ? Se séparer dans une maison isolée au lieu de rester groupés ? Faire confiance à l’étranger le plus louche du quartier ? C’est un festival d’erreurs grotesques, au point où on se demande si ce n’est pas une démarche artistique à part entière.

Ce comportement irrationnel, censé générer du suspense, provoque au contraire l’effet inverse, puisqu’on cesse très rapidement de s’impliquer émotionnellement. Comment craindre pour des personnages qui semblent tout faire pour se mettre en danger ? Comment s’attacher à des héros qui enchaînent les décisions aberrantes sans jamais apprendre de leurs erreurs ? Les protagonistes ne sont que des pantins qu’on regarde s’agiter sans conviction, incapables de susciter empathie ou tension.
Le peu d’interactions humaines intéressantes est étouffé par des dialogues mécaniques, bourrés d’expositions maladroites (les personnages vous rappelleront les enjeux du scénario À CHAQUE ÉPISODE) ou de fausses confidences forcées. Les conflits familiaux, qui devaient être l’un des moteurs de l’histoire sur le papier, sont traités avec la subtilité d’un soap-opéra sous Lexomil. La relation entre James et Maggie, promesse d’une dynamique complexe, ressemble à une relation de préados immatures. Et toutes les interactions entre personnages sont du même acabit. Résultat : on n’a jamais l’impression d’être face à des personnes crédibles, mais plutôt face à un vaudeville mal écrit et mal joué.

La douleur tombée du ciel
Si l’écriture de Teacup est un désastre, sa mise en scène n’offre aucun secours. Aucun plan n’est marquant, aucune composition visuelle n’est inspirée (même l’apparition choc d’un cadavre qui devait nous traumatiser loupe son but). La série aligne les scènes d’intérieur sombres et les cadrages extérieurs génériques. Quant aux scènes de « contaminations » en gros plan, elles ne réussiront qu’à faire rire.
Difficile de ne pas penser que problème est amplifié par le format sériel lui-même. Là où un film d’horreur bénéficie d’une durée condensée pour maintenir une tension continue, une série doit gérer le suspense sur plusieurs heures, tout en laissant des moments de répit. Teacup échoue lamentablement sur ce terrain : les rares pics d’adrénaline sont noyés dans des épisodes mollassons, où l’intrigue piétine constamment.
L’absence de rythme est criante, certains épisodes empilant les séquences inutiles (l’épisode 5 I’m a Witness to the Sickness) et d’autres fonçant tête baissée de manière insensée (les épisodes finaux 7 et 8 This is Nowhere, qui semblent vouloir boucler tout ce bazar au plus vite), sans jamais trouver le bon tempo.

Cerise moisie sur le gâteau rance : les effets spéciaux renvoient aux grandes heures des séries fauchées de SyFy. La menace centrale est trop peu montrée ou mal intégrée aux scènes, et perd tout pouvoir de fascination ou de terreur. Et c’est bien là le pire du pire : à aucun moment Teacup ne parvient à faire peur. Au mieux, il vous fera sourire à ses dépens. Au pire, vous vous demanderez pourquoi vous avez perdu votre temps face à ce désastre.
En définitive, la série n’a ni l’inventivité visuelle, ni le sens du timing, ni l’audace formelle nécessaires pour fournir un récit horrifique digne de ce nom. Le résultat est un enchaînement de scènes plates et dialogues idiots, qui ne parvient ni à effrayer, ni à captiver, le tout étalé sur huit épisodes de 30 minutes. Quant au fait qu’elle est soi-disant inspirée de Stinger (paru sous le nom Scorpion en France), elle a autant de points communs avec son modèle que la version russe du Seigneur des Anneaux avec les livres de Tolkien. Est-ce que le résultat aurait été meilleur si Teacup avait été un film de 1h30 ? On ne le saura jamais, puisque la série a été annulée après une seule saison.
Les huit épisodes de Teacup sont disponibles sur Paramount+ en France.

C’est intriguant au début mais c’est vrai que sur la durée cette série s’essouffle. On sent que les moyens financiers étaient limités. On ne connaîtra pas la suite en plus car la série a été annulée. Très décevant effectivement au final
Dans un registre horreur / Paramount plus je trouve cela dommage que vous n’ayez jamais parlé de la série FROM, autrement plus recommandable que ce Teacup.