Johnny par Johnny : critique qui allume le feu sur Netflix

Matthias Mertz | 5 avril 2022
Matthias Mertz | 5 avril 2022

Entre séance de nécromancie et hommage intimiste, Johnny par Johnny par Jonathan Gallaud raconte la légende de l'interprète éponyme, Johnny Hallyday sur Netflix. Au sein de l'exercice sont convoqués de nombreux proches de ce dernier, qui l'accompagneront dans cette introspection de l'artiste, plus bavard que de réputation. La plongée dans la carrière de l'idole des jeunes mérite-t-elle qu'on sabre le champagne et qu'on allume le feu ?

Le retour du roi 

Peu de documentaires peuvent se justifier d'une structure en cinq épisodes de 35 minutes chacun. D'abord, parce qu'il leur incombe d'avoir un matériau de base suffisamment riche pour occuper le spectateur. Ensuite, parce que le récit doit être suffisamment bien rythmé pour garder en haleine son public, quitte à organiser sa narration, à faire des ellipses, ou des choix éditoriaux. Johnny par Johnny parvient à satisfaire ces deux impératifs.

D'abord grâce à la longévité mythique de l'interprète, sur scène depuis sa puberté jusqu'à sa mise en bière, mais aussi grâce au découpage efficace de sa carrière au sein du documentaire. Ainsi, les cinq épisodes parviennent chacun à capturer l'un de ses moments (les jeunes années jusqu'à devenir l'idole des jeunes, sa période has-been face aux Anglo-saxons, le retour en grâce avec Michel Berger, le cauchemar américain, et enfin la naissance du mythe) de façon cohérente. 

Au cours des pérégrinations de l'artiste, le documentaire n'est pas tendre avec ce dernier, remplissant l'une des exigences les plus fondamentales de l'exercice : parvenir à ne pas être une immense publicité. Toutes les zones d'ombre de l'idole des jeunes sont passées au crible, de ses problèmes avec le fisc jusqu'à son amour pour les très jeunes femmes, ou encore ses addictions à l'alcool et à la drogue.

 

 

Paradoxalement, c'est lorsqu'il n'épargne pas Johnny que le documentaire réussit à le rendre encore plus humain, mais aussi plus mythique. À montrer qu'il est avant tout ce lion blessé, ce clown triste derrière la bête de scène. Qu'il erre dans une carrière destructrice qui l'a forgé et où il emmène celles qu'il voit comme des sauveuses avant de les consumer.  

Il faut également noter que les deux premiers épisodes (sans doute les meilleurs) formulent la volonté de replacer Johnny dans le contexte de son époque. On y retrouve ce jeune fan d'Elvis Presley, pas inquiet à l'idée de raconter des rencontres fantasmées avec le pape du rock, avant d'importer son style avec mimétisme. On le plaint également, lorsque ce dernier, dépassé par l'apparition des Beatles et du rock anglo-saxon, devient has-been. Enfin, on tremble, devant la scénographie tirée de Mad Max qu'il déploie pour son retour en grâce.

Le documentaire ne jouit en outre d'aucune autre voix off que celle de Johnny dans ses nombreuses apparitions publiques ou entrevues, ou de ses proches (producteurs, anciennes compagnes ou camarades lyricistes). C'est là sans doute son meilleur aspect, donner la parole à l'artiste pour parler de lui, laisser Johnny être raconté par Johnny.

 

Johnny par Johnny : photo, Johnny HallydayMonstre sacré et enfant abandonné

 

Amnésie volontaire

Malheureusement, on regrettera certaines absences, parmi lesquelles ses enfants Laura et David, qui n'ont pas accepté de participer à l'élaboration du documentaire. Dès lors, les mentions de ces derniers se comptent sur les doigts d'une main. De la même façon, les proches de l'idole des jeunes se sont lamentés de l'absence de mention d'Eddy Mitchell ou encore de Jacques Dutronc, avec qui Johnny Hallyday formait le groupe Les Vieilles Canailles.

En outre, le documentaire évite soigneusement de s'attarder sur la question difficile de la filiation du chanteur. C'est dommage, compte tenu de l'imbroglio dont il s'agit, qui a été une porte d'entrée pour la plus jeune génération pour connaître le chanteur.

 

Johnny par Johnny : photo, Johnny HallydayLe charme de l'idole des jeunes ne l'a jamais quitté

 

Et si on comprend que le dispositif nécessite des choix éditoriaux (parmi lesquels l'ellipse entre 2000 à 2017), il est difficile de justifier une telle absence autrement que par une facilité. Ne pas parler de ce qu'on ne peut pas montrer.

Et il est dommage de se priver de mentions de ces personnages, surtout lorsque le récit préfère se concentrer sur la chronologie stricte, mais répétitive de la structure de la carrière de l'artiste, qui a oscillé entre des périodes d'apothéose et d'oubli. S'il avance à bon rythme, le récit souligne avec lourdeur les turbulences de la carrière de la star, nous laissant entrevoir ses charnières narratives. Lorsqu'il annonce un Johnny au sommet, on comprend bien vite qu'il va chuter, tandis que lorsqu'il présente l'homme au bout du rouleau, on comprend aisément qu'il annonce sa résurgence.

 

Johnny par Johnny : photo, Johnny HallydayJamais dans la modération, l'artiste n'a vécu que des hauts vertigineux, et des bas abyssaux

  

Enfin, on aurait sans doute aimé en voir plus. D'abord d'un point de vue musical, où la discographie riche de l'artiste (qui a changé de style à de nombreuses reprises durant ses près de 60 ans de carrière) sert de bande-son au documentaire de façon paresseuse (L'envie et Allumer le feu vont longtemps nous rester en tête).

Mais pas seulement, puisque la très grande partie des interventions de Johnny sont extraites d'entrevues à la radio ou de passage à la télévision, de quoi défricher efficacement la carrière de l'homme pour les novices, sans jamais apporter quelque chose de nouveau aux puristes.

Face à ce peu de nouveautés, Johnny par Johnny s'impose surtout comme un patchwork, un best-of de l'artiste, incapable de poser un regard nouveau sur un homme qui s'est pourtant constamment réinventé.

Johnny par Johnny est disponible en intégralité depuis le 29 mars 2022 sur Netflix

 

Johnny par Johnny : Affiche officielle

Résumé

Après un excellent départ, Johnny par Johnny sombre dans le convenu pour n'être qu'un patchwork d'interventions de l'artiste qui n'est même pas exhaustif, ni face à la destinée poignante de l'interprète ni quant à sa discographie, réduite à une bande-son trop paresseuse.

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commentaires
Kaelig
06/04/2022 à 22:17

Les jaloux, les aigris. Une belle gueule, une voix qui s'est bonifiée avec le temps. Roberto Alagna, célèbre ténor à l'échelon mondial parlait de la voix de Johnny comme voix de ténor unique, capable de tt chanter. Alors...chacun ses goûts, mais ne venez pas baver comme vous le faites

Flash
06/04/2022 à 10:29

@djeef35 ou comment se décrédibiliser en une phrase
Un novateur ? Ce mec n’a fait que pomper tout ce qui se faisait ailleurs. Et dire qu’il est meilleur que les anglo-saxons, il faut pas connaître grand chose musicalement pour écrire ça.

Guy
06/04/2022 à 09:32

Je suis un fan inconditionnel du chanteur!Le reste ne m'intéresse pas,et il est vrai pas toujours reluisant.Pour moi il ne mourra que le jour de ma mort !

Uhtred
06/04/2022 à 09:05

Oh, les jaloux aigris qui déversent leur fiel!!! Johnny c'est le plus grand, le meilleur, il remplissait les stades et il était, pardon il EST aimé par des millions de gens. Plus de 60 ans de carrière, et ça aurait pu durer s'il n'était parti avant. Et vos propos haineux ne changeront rien car ça ne finira jamais!!!

djeef35
05/04/2022 à 22:15

Comment croire encore que ce mec n'était que l'idole des beaufs quand on voit sa carrière et l'étendue de son public. Il a su rassembler les classes populaires tout comme les élites par son instinct de la scène. Les beaufs ne sont pas ceux auxquels on pense...
Ce même artiste s'il avait été anglo-saxon aurait surpassé tous les autres car sa créativité et son énergie étaient sans limites. Jamais il il n'a pris les choses pour des acquis, toujours il a remis son titre en jeu.

L'indien Zarbi.
05/04/2022 à 16:28

Star du rock...
Iggy Pop est une star du rock.
Ici juste un chanteur de variétés au succès francophone surestimé.
Pas plus.

Flash
05/04/2022 à 15:03

@JR, tout comme toi, j’ai toujours aimé ces deux là, contrairement à l’autre clown.
Infinity, ça m’intrigue. A voir.

JR
05/04/2022 à 14:31

@Flash pareil, je préfère Mr Eddie ou Dick (qui était un vrai rocker).

Je viens de finir Infiniti sur canal +, assez belle découverte.

Flash
05/04/2022 à 13:57

Ah « Jaunit » l’idole des beaufs !
J’ai toujours eu ce type en horreur, aussi bien le chanteur que le personnage.

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