L'après Dark Knight : Batman forever ?

Damien Virgitti | 23 juillet 2012
Damien Virgitti | 23 juillet 2012

Batman, c'est fini ! Christopher Nolan l'a déclaré. Sa trilogie est terminée et il a fait le tour du personnage.

En 8 ans et 3 films, le réalisateur a synthétisé une décennie d'évolution du héros dans sa version papier. Puisant dans Batman: Year One de Franck Miller (auteur de Sin city et 300) qui offre un regard réaliste et violent de l'icône des comics, Christopher Nolan a prolongé sa saga à l'aide du Killing joke d'Alan Moore (V pour Vendetta et Watchmen) pour mieux explorer la psyché ambiguë du personnage. Il l'achève ensuite (au sens propre comme au figuré) avec Knightfall qui confronte le héros à sa première défaite contre Bane au début des années 1990, alors que Superman trouve la mort dans le bien-nommé Death of Superman. Pourtant le personnage vit, encore aujourd'hui, des aventures trépidantes et il y a encore beaucoup à dire sur cette figure crépusculaire.

Ecran Large fait le tour des sagas qui ont marqué la vie du justicier et qui prouvent que, même 80 ans plus tard, ce héros est toujours aussi fascinant.

 

Batman : la relève

 

 

 

 

On le sait tous, Batman a fait des émules au sein des justiciers, à commencer par son plus fidèle pupille: Robin. Au-delà de l'interprétation superficielle de Chris O'Donnell dans les deux derniers opus de Joël Schumacher, Robin a connu une évolution des plus intéressantes dans les comics à chacune de ses interprétations. Recueilli par Batman après le meurtre de ses parents pendant un numéro de trapèze, le premier Robin, plus connu sous le nom de Dick Grayson, passe d'acolyte fidèle à fils rebelle. Il va très vite voler de ses propres ailes sous le nom de Nightwing. Une volonté d'indépendance évoquée en filigrane dans Batman et Robin. Le "Robin-Signal" que lui dédie Poison Ivy reprend d'ailleurs son futur logo en tant que Nightwing. Bruce Wayne a d'abord du mal à se remettre de cette séparation, voyant son autorité complètement bafouée. La deuxième sera encore plus brutale.

 

 

 

Au début des années 1980, DC lui met un second Robin dans les pattes, sous le nom de Jason Todd. Ce dernier peine à trouver son public. Tombé subitement entre les mains du Joker qui prend un malin plaisir à le torturer à coups de pied de biche, DC met ses lecteurs face à un cruel dilemme. A l'aide d'un numéro de téléphone, ils peuvent décider si le sidekick doit survivre ou non. La réponse ne se fait pas attendre et la semaine suivante, Jason Todd meurt sous les coups du Joker, donnant lieu à l'une des cases les plus emblématiques de l'album Death in the family. Batman, désespéré, porte le corps de son jeune élève au milieu des décombres. Un deuil qu'il portera encore longtemps, au-delà de la mort de ses parents, et qui resserrera ses liens avec le Prince du crime. En 2005, DC enfonce le clou et révèle que Jason Todd a en fait survécu aux flammes de l'enfer. Il devient un justicier ultra violent connu sous le nom de Red Hood. La vision de son élève passant du côté obscur tourmentera beaucoup le chevalier noir, remettant sérieusement ses méthodes en question.

 

 

Plus optimiste sera le cas de Batgirl. Là encore, il faut oublier l'interprétation d'Alicia Silverstone, à mille lieux de son homologue papier. Fille du commissaire Gordon, la jeune Barbara éprouve tellement d'admiration pour le justicier de Gotham qu'elle enfile elle-même la cape et le masque pour patrouiller dans les rues de la ville. Mais en 1988, dans l'album Killing joke, Alan Moore commet l'irréparable. Une scène fait tristement écho à Death in the family, mais de façon nettement plus ambigüe. Le Joker agresse Barbara Gordon sur le pas de sa porte. La jeune fille survit, mais devient paraplégique. Elle poursuit tout de même sa quête de justice depuis un ordinateur, sous le nom d'Oracle. La série Les anges de la nuit reprend le personnage sous les traits de la belle Dina Meyer (Starship Troopers). En dépit de son budget limité qui fait passer la série pour du Smallville avant l'heure, l'actrice offre une prestation convaincante. L'épisode où elle tente de remettre le costume est particulièrement émouvant. La Warner ne pourra pas se passer longtemps de ce personnage majeur du Bat-verse si elle tient à mettre sur pied sa Justice league. Le rôle de relais de la jeune fille est central entre les différents super-héros.

 

 

La Bat-family

 

 

 

Si Batman a assuré les ventes des comics DC jusqu'à maintenant, sa qualité n'a pas toujours été constante. Grant Morrison, auteur de comics écossais complètement déjantés, a su par contre marquer de façon durable l'univers du chevalier noir. En 2006, le scénariste jette un pavé dans la mare: et si Batman avait un fils? Cet enfant serait le fruit d'une romance entre Bruce Wayne et Talia Al Ghul, l'héritière de Ras Al Ghul à la tête de la Ligue des Ombres. Le résultat n'est pourtant pas à la hauteur des espérances. Elevé par sa mère pour devenir une machine à tuer, Damian Wayne (son nom, NDLR) est un véritable diable sur pattes que de nombreux lecteurs ont eu envie de gifler au fil des pages. Le personnage a au moins l‘intérêt de confronter Batman à son rôle de père et aux valeurs qu'il cherche à transmettre aux futures générations de héros. Un rôle qui le préparera doucement mais sûrement à la deuxième partie de l'arc narratif écrit par l'auteur. Le bien nommé: Batman R.I.P.

 

Batman R.I.P

 

 

 

Décrivant le chant du cygne du chevalier noir, l'auteur présente un Batman psychologiquement perdu après ses expériences d'isolement mental pour se prémunir d'influences néfastes, comme celles du Joker. Malmené par une terrible organisation appelée le Gant noir, Batman finit par mourir dans une saga qui épouse à la case près les errances du justicier. Le lecteur lui-même ne reconnaît plus la réalité de la fiction et se perd avec plaisir. C'est donc à Dick Grayson, ancien Nightwing, de remettre le masque de Batman, contraint de collaborer avec Damian en tant que Robin. Cette variation du duo dynamique offre un Batman plus léger et bondissant face à un Robin sociopathe, parfait reflet inversé des rapports entre les deux justiciers. La version d'un Batman sous les traits de Dick Grayson donne lieu à de superbes épisodes en BD, notamment la saga Sombre reflet où Dick se perd peu à peu dans les méandres d'une Gotham aliénante (une thématique que n'aurait pas renié Nolan). Elle confronte le commissaire Gordon à un fils psychopathe. Les nouvelles versions du Chevalier Noir ne manquent pas et pourraient se révéler tout aussi intéressantes sur grand écran.

 

Batman vs. la Justice league

 

 

Au-delà de ses aventures en solo, Batman a partagé, ces dernières années, de nombreux titres avec la Justice league, groupe d'Avengers version DC qui comporte des héros du calibre de Superman, Wonder woman, Flash et Green Lantern. Des individus aux pouvoirs surhumains face auxquels les gadgets de Batman font pâle figure. Le chevalier noir, mis de côté, passe vite pour le personnage austère de la bande, remettant souvent en cause l'omnipotence de certains de ses copains justiciers. Au point de se prémunir contre eux en cas de dérapage. Batman a, par exemple, toujours un morceau de kryptonite sur lui. De même, dans certains épisodes, les armes qu'il avait créées pour gérer son groupe se retournent contre eux. Le récent Ligue des justiciers: Echec,  dessin animé Justice league réalisé par une partie de l'équipe créative responsable de la série animée des années 2000, est un bon exemple. Un groupe de vilains s'empare des différentes armes que Batman a conçues contre ses amis pour les neutraliser. En 2005, désapprouvant une bonne partie des décisions de la ligue, Batman met au point un satellite géant pour les surveiller et crée une armée de robots, les Omacs, pour les contrer en cas de besoin. Là encore, cette arme leur donnera du fil à retordre dans de nombreux épisodes. Le chevalier noir joue un rôle crucial dans la dynamique de la Ligue et le contact avec d'autres justiciers va l'obliger à s'humaniser.

 

Batman beyond

 

 

 

Parmi les nombreuses variations de Batman que DC a développées le long de ses innombrables terres parallèles, une seule offre une évolution intéressante du justicier. Dans un futur hypothétique, Bruce Wayne, fatigué et aigri, a pris sa retraite dans sa Batcave froide et sinistre. Ce n'est qu'au contact du jeune Terry McGinnis, confronté à une tragédie proche de la sienne, que Bruce Wayne sera prêt à reprendre du service. Mais cette fois en tant que mentor d'un tout nouveau Batman beaucoup plus jeune. L'intérêt de ce Batman moderne réside dans la représentation d'un justicier bondissant, guidé par la voix d'un Bruce Wayne dont l'ombre semble immortelle. Il est confronté à une galerie de méchants complètement renouvelée. Une version du Dark knight honorée à la télévision dans le dessin animé Batman beyond, toujours porté par l'équipe en charge de la série de 1993. La preuve que le mythe de l'homme chauve-souris survit à toutes les époques.

 

The (freak) show must go on...

 

 

S'il y avait des reproches à faire à la trilogie de Nolan, ce serait de ne pas avoir su renouveler son lot de méchants. A l'exception de l'Epouvantail et de Ras al Ghul, les nouveaux Batman se sont à chaque fois appuyés sur des méchants qu'on avait déjà aperçus chez Burton, même modernisés. Il y en avait pourtant beaucoup d'autres à découvrir, avec une galerie de vilains toujours en expansion.

On pourrait en citer pléthore, à commencer par celle que tout le monde réclame depuis sa création dans le célèbre dessin animé de 1993. Il s'agit bien sûr d'Harley Quinn, la fidèle assistante du Joker. A la foix sexy et flippante dans son obsession pour le Joker, ce clown hystérique a su très vite égaler le prince du crime par ses coups de folie. Elle mériterait les honneurs du grand écran. Tout comme le Chapelier fou et son univers onirique. Tim Burton ne l'aurait certainement pas renié. Cet ancien scientifique à l'esprit vrillé par l'univers de Lewis Caroll est adepte du contrôle mental pour faire plier ses adversaires et les emmener dans son délire personnel. Le lecteur pénètre encore plus profondément dans sa psyché lorsque Batman passe sous ses coups, décelant le cauchemar perpétuel qui hante son esprit. Un autre méchant au potentiel cinématographique n'a toujours pas intéressé les studios: Gueule d'argile. Croisement de l'homme-sable de Spider-man 3 et du T-1000 de Terminator 2, ce métamorphe fait l'objet d'une allégorie sur les ravages d'une société de plus en plus dépersonnalisée, rappelant les grandes heures du modus operandi du Darkman de Sam Raimi. Enfin, difficile de ne pas passer sur le cas de Freezer. Oubliez tout de suite la vision hystérique d'un Arnold Schwarzenegger en chaussons ours blanc de Batman et Robin. Freezer est un personnage à la dimension mélancolique qui aurait mérité cent fois mieux. Prisonnier de la glace avec un cœur de pierre, ce personnage ne cesse de reconquérir une humanité via un amour perdu au cours de sa tragédie inaugurale. Un ennemi qui questionne de nombreuses fois la justice de Batman. Il y aurait donc de quoi alimenter de nombreux films consacrés à l'homme chauve-souris, surtout que certains, comme Catwoman et sa relation avec Batman, peuvent nécessiter plusieurs opus.

 

Le personnage est inépuisable et de nombreux éléments devraient inspirer le futur Justice league. Un film qui s'annonce comme la pierre angulaire d'un nouveau souffle cinématographique pour Warner, en imaginant qu'ils utilisent la mythologie DC à bon escient.

 

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