Nicolas Boukhrief - Portrait

David Da Silva | 3 avril 2010
David Da Silva | 3 avril 2010

 Ancien journaliste de la revue culte Starfix, scénariste pour différents cinéastes (comme Kassovitz), Nicolas Boukhrief est également un cinéaste précieux. A l’image du célèbre magazine où la rédaction (composée de Christophe Gans ou Doug Headline, également cinéastes désormais) défendait aussi bien Zulawski que John Carpenter, Boukhrief est un metteur en scène éclectique. Il passe du film de genre, comme Le Convoyeur, au film d’auteur, à l’image de Le plaisir (et ses petits tracas), sans problèmes. Son dernier film Gardiens de l’ordre, un polar avec Fred Testot et Cécile De France sort le 7 avril au cinéma. 

 

Boukhrief connait Christophe Gans très tôt, à l’âge de 11 ans, avec lequel il va fonder le mythique magazine Starfix, qui a forgé toute une génération de cinéphiles : « Au départ, c'était uniquement conçu pour nous offrir un moyen d'expression et faire partager notre passion, donc du coup, on est content que des gens l'aient partagée à ce point». Co-fondateur puis rédacteur en chef de Starfix, la finalité de Nicolas Boukrief n’est pas le journalisme et la plume,  mais plutôt de manier à son tour la caméra. Il débute dans le milieu en 1993 comme scénariste pour Jean-Jacques Zilbermann, avec la comédie Tout le monde n'a pas eu la chance d'avoir des parents communistes.


En 1995, il saute le pas avec la réalisation de son premier long-métrage, le très méconnu Va Mourire. Chronique de trois glandeurs trentenaires vivant de menus larcins et du RMI, mais aussi potes inséparables et complices en Côte d’Azur. Un film étrange, pas totalement abouti mais bénéficiant d’une grande sincérité de la part de son auteur : « Dans Va Mourire, il y a des trucs autobiographiques, rapport à des potes de l’époque, à des situations… En fait, j’ai tourné mon premier film dans le Sud parce que je crois qu’on ne parle bien que de ce qu’on connait. ». Il y a aussi une volonté évidente de la part de Bouhkrief le cinéphile de se référer à ses modèles comme Scorsese qui a tourné ses premiers films sur des expériences autobiographiques (comme Mean Streets).

 

 

Après avoir pris la direction de Canal+ Ecriture, aux côtés de Richard Grandpierre où il permet à des films comme Bernie ou Dobermann de voir le jour. Il écrit aussi pour Matthieu Kassovitz le très controversé (mais intéressant) Assassin(s) : « Le problème de ce film, c'est qu'il est parti en tournage alors que le scénario n'était pas fini, à cause des dates de Michel Serrault. Donc le film a continué à s'écrire en cours de route, le soir, le week-end, et pour un film de cette importance, avec cette ambition vis-à-vis du propos, c'était difficile. ». Mais à cette époque, l’ancien journaliste prépare déjà son deuxième film.

Le plaisir (et ses petits tracas) est un exercice de style permettant à Boukhrief d’expérimenter (comme le cinéma qu’il défendait à Starfix). Ce second film, beaucoup plus ambitieux que son premier long-métrage, est un échec public autant que critique. Pourtant doté d’un casting prometteur (Matthieu Kassovitz, Vincent Cassel, Julie Gayet...), cette comédie n’aura pas fait rire le public, ni réfléchir sur la question du sida : « Pourquoi le film n'a-t-il pas été compris? Par exemple, pour moi, c'était une comédie. Et je me suis rendu compte que j'avais un sens de l'humour très particulier, que les gens ne voyaient absolument pas le film comme une comédie ».

 

Conscient de ses erreurs, Boukhrief va se tourner vers le cinéma de genre avec Le Convoyeur, un polar très noir. Un homme est embauché dans par une société de transport de fonds qui connait une série de trois braquages meurtriers la même année. Dupontel livre une prestation formidable et le film est d’une redoutable efficacité : « En fait, ce film est plus proche de ce que j’aime que mes deux films précédents. Avant d’aborder le genre, je voulais être sûr de mon métier. ».


Le réalisateur, fier du petit succès de son polar, revient avec un nouveau film de genre, Cortex avec André Dussollier. Charles Boyer, commissaire à la retraite, commence à perdre la mémoire. Afin de ne pas devenir une charge pour ses proches, il décide d'entrer à la Résidence, un établissement spécialisé dans le traitement de la maladie d'Alzheimer. Il s'adapte bien à son nouvel environnement mais des patients meurent trop vite selon lui. Rattrapé par son instinct de flic, il est persuadé qu'on les a tués… Le cadre du film est original et l’idée d’associer la maladie à un polar est intéressante, mais on  ne peut pas s'empêcher de s'ennuyer un peu devant ce polar impeccable (trop peut-être) mais pas implacable, et ce malgré un remarquable Dussollier.

 

Son nouveau polar arrive sur nos écrans et on espère un film plus proche de la noirceur d’un Convoyeur que du rythme "léthargique" de Cortex. Et après Jean Dujardin dans Le Convoyeur, c’est aujourd’hui l’humoriste Fred Testot qui bénéficie d’un rôle à contre-emploi assez prometteur.

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