Les sources d'inspiration de James Cameron pour Avatar

Florent Kretz | 16 décembre 2009
Florent Kretz | 16 décembre 2009
Si Avatar est bel et bien la révolution annoncée, s'il s'agit en effet d'un grand film épique et s'il est certain que chacun en prendra plein les mirettes, il y a cependant une chose qui surprendra réellement le spectateur : le nouveau film de James Cameron est incroyablement classique. Un parti-pris pas dénué de sens et résonnant comme une tentative honorable : l'idée est assurément de revenir à l'essentiel pour permettre l'immersion la plus totale du spectateur non initié à la science-fiction. D'ailleurs, par là-même, le réalisateur parvient à relever un second défi. Celui de créer une passerelle réelle entre le cinéma des années 50, celui-là même qui a bercé son enfance, et les technologies du futur, celles du cinéma de demain. D'où l'élagage de certaines séquences ajoutant à la complexité de l'action mais n'influant pas tant que ça sur la profondeur de la trame. En résulte Avatar, joyau de cette fin d'année, tournant évident dans l'industrie cinématographique et qui se fait le plus universel possible. Et pour cela, Cameron pioche ici et là, dans le cinéma qu'il aime et dans sa propre filmographie, conscient de la dimension fédératrice de quelques sujets et d'une poignée d'œuvres légendaires.

 

 

 

Car c'est bien cette recherche de thèmes forts, pouvant amener à une communion populaire, qui anime le metteur en scène visionnaire : à l'instar des autochtones de Pandora, les Na'vi, qui ne font qu'un avec mère nature, Cameron en appelle au rassemblement et s'empare de l'inconscient collectif pour arriver à ses fins. Et si la fameuse phrase du Colonel Quaritch - « You're not in Kansas anymore! »- aura sonné pour certains comme une punch line burnée de plus, elle provient pourtant du mythique Magicien d'Oz. Une citation qui tient autant du dialogue culte que de la private joke: un petit clin d'œil du réalisateur à son ami Bill Paxton qui, lorsqu'il découvrira pour la toute première fois le Titanic lors d'une expédition sous-marine, s'étonnera en reprenant les paroles de Dorothy (visible dans Les Fantômes du Titanic). Mais James Cameron ne s'arrête pas là puisqu'il brasse à tour de bras quelques grandes références qu'il se réapproprie assez légitimement. Avatar s'intéresse à la colonisation d'un nouvel univers et son auteur est bien au rendez-vous pour en souligner les dérives: s'il évoque brièvement la mise en place d'un système éducatif pacifiste qui tourne mal (l'évangélisation décrite dans le Mission de Roland Joffé),  il aborde beaucoup plus sérieusement l'extermination systématique des races indigènes et la destruction des cultures. Difficile alors de ne pas penser à Danse avec les loups et ce même si Cameron réfute le parallèle qui puisse être fait entre son film et toutes les invasions meurtrières de l'histoire (que ce soit la conquête de l'Ouest ou quelques conflits plus récents en Moyen-Orient). Une association pourtant pas anodine puisque Costner, tout comme Cameron, contait l'exaltation face à un nouvel environnement doublée d'une idylle sur fond de colonialisme.

 

 

 

Une évidente revisite de la légende de Pocahontas, Avatar tenant autant de la féérie ambiante de la relecture des studios Disney que de la contemplation du Nouveau monde de Malick. D'autant plus que les démarches des deux hommes, malgré leur antagonisme certain, semblent être analogues: offrir à savourer au spectateur un microcosme amené à disparaitre mais auquel le film offre l'éternité. On retrouve du coup dans le dernier métrage du réalisateur de True Lies la même fascination, cette même passion limite new age pour ce nouvel univers. Un rapprochement qui semble enfin se concrétiser à l'image de cette attraction qu'entretient Cameron avec les thèmes guerriers. Là où celui-ci dévoilera sa passion pour la guerre du Vietnam (scénario de Rambo II la mission et des allusions dans chacun de ses films), Malick se penchera sur le sujet en suivant la bataille de Guadalcanal dans le Pacifique avec La ligne rouge. Mais lorsque le réalisateur de La ballade sauvage offre un pan mystique à l'ensemble de son film et à ses affrontements, Cameron, lui, y préfère des chevauchées viscérales et grandioses. Evoquant autant les postures conquérantes des plus belles illustrations de Frazetta que les décharges épiques décrites par Tolkien (c‘est d‘ailleurs après avoir vu Les deux tours qu‘il se décidera à tourner les aventures des Na‘vi), il serait difficile d'évincer les allusions au Lawrence d'Arabie de David Lean. C'est bien simple, tout dans Avatar renvoie au chef d'œuvre avec Peter O'Toole depuis ses envolées lyriques jusqu'à l'histoire même du projet (ambitions démesurées, tournages titanesques, formats gigantesques, longues durées...).

 

 

L'autre grande influence est assurément le manga: si dans un premier temps la ressemblance entre Avatar et l'œuvre de Hayao Miyazaki saute aux yeux (Nausicaä, Le château dans le ciel...), c'est chez Mamoru Oshii qu'il faut jeter un coup d'œil. Car tous deux (le nippon et l'américain) vouent le même culte à quelques lectures de jeunesse. A commencer par celles des textes de Philip K. Dick: lorsque Ghost in the shell sera hanté par le Blade Runner de Ridley Scott, on reconnaitra quelques traits d'humanisation du robot chez Cameron au travers de son diptyque Terminator. Une série qui influera autant sur l'industrie cinématographique que sur la propre filmographie du réalisateur qui y développera, dès 1984, quelques unes de ses thématiques de prédilection. A commencer par la présence de la femme forte, l'amazone, qui dans Avatar est enfin décrite comme telle: loin des  Sarah Connor et autres Ripley que les drames de la vie auront redéfinies, Neytiri est un personnage assumé et construit ainsi. Tout comme la battante Vasquez (Jenette Goldstein dans Aliens, le retour) et qui trouve ici son alter ego en la pilote Trudi campée par la virile Michelle Rodriguez. Une multitude de similarités qui offre à Avatar une apparence d'anti-Aliens. Comme si Cameron, c'était cette fois-ci placé du côté des bestioles: assez légitimement Sigourney Weaver revient, offrant une variation humaniste de la brave qu'elle incarnait par le passé. Plateformes minières, armures robotisées, commandos... Cameron reste malgré tout conscient de l'amalgame qui peut être fait et refuse le rôle de Quaritch à son ami Micheal Biehn (mémorable Kyle Reese dans Terminator) qui se voit remplacé par un  des recalés du casting d'Aliens, Stephen Lang.

 

 

Et si par Avatar, Cameron livrait son œuvre la plus personnelle? Sans doute. D'autant plus que Sigourney Weaver indiquera qu'elle se sera inspirée du réalisateur pour incarner le personnage du Dr Grace Augustine... D'où un amour évident pour la nature et tout ce qui l'entoure à l'image des héros de Abyss, hypnotisés par la beauté et les choses des grands fonds. Une faune inventée de toutes pièces mais imaginée dans ses détails et de manière très scientifique, Cameron étant d'une minutie déconcertante. Après la reconstitution du Titanic (à qu‘il emprunte la romance), il s'empare littéralement d'un monde enfoui dans les méandres de son imagination et lui redonne naissance grâce à quelques nouvelles technologies développées entre temps. Le réalisateur navigue donc dans son univers en appelant à tous ses désirs qu'ils aient déjà été exploités ou à peine crayonnés: génocide, fatalité, abnégation... James Cameron reprend l'une de ses doctrines favorites, l'applique à son héros Jack Sully (icône absolue représentant l'essentiel des protagonistes cameroniens) et se l'inflige à lui-même, certain qu'il est le seul maitre à bord et que lui seul peut insuffler la vie à ses créations. Car comme on le répète souvent dans Terminator: « The future is not set. There is no fate but what we make for ourselves »!

FLORENT KRETZ

        

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commentaires
LAWERENCE
09/05/2016 à 04:57

Pour creer les montagnes flottantes « Hallelujah », les decorateurs se sont inspires de « nombreux types de montagnes, mais principalement des formations karstiques situees en Chine »

crork service
02/09/2015 à 11:17

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newkakaku
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