La vie criminelle d'Archibald de La Cruz : la meilleure adaptation de Death Note est un film des années 50

Léo Martin | 18 février 2023
Léo Martin | 18 février 2023

Comédie noire et fantastique du cinéma mexicain, La vie criminelle d’Archibald de La Cruz de Luis Buñuel est un Death Note en avance et plus amoral encore.

Réalisé bien après le surréaliste Un chien andalou (1929) et bien avant l’onirique Charme discret de la bourgeoisie (1972), La vie criminelle d’Archibald de la Cruz est un bijou de la période mexicaine de Luis Buñuel. Un conte cruel, érotique et satirique qui rend hommage à la littérature sadienne ainsi qu’à toutes les obsessions (et fétichismes) de son cinéaste. À la fois drôle et transgressif, le film (sorti en 1955) est toujours aussi désarçonnant aujourd’hui... notamment grâce à son génial concept.

Archibald, homme solitaire, mais avenant, se retrouve en possession d’une étrange boîte à musique magique. Celle-ci octroierait la capacité surnaturelle à son propriétaire de trucider n’importe qui sans même avoir à passer à l’acte. Un pouvoir terrible qui ranime de vieux désirs enfouis chez Archibald, et le pousse dans le mécanisme sordide d’un jeu de massacre impitoyable. Des meurtres à distance pour lesquels il sait qu’il n’aura jamais aucune chance d’être puni.

Voilà une idée qui vous rappellera peut-être quelque chose ! Un certain manga, dont la parution a démarré en 2003, utilise un postulat de départ très similaire au film de Buñuel. Car oui : ce long-métrage surréaliste des années 50 est aussi un Death Note avant l’heure.

 

La vie criminelle d'Archibald de La Cruz : Photo Ernesto AlonsoArchibald et son jouet

 

Tueur par correspondance

La vie criminelle d’Archibald de La Cruz est une œuvre aux multiples inspirations – et sans doute à l’origine de beaucoup d’autres. On y retrouve la fantasmagorie romantique des Nouvelles fantastiques de Théophile Gautier, la morsure provocatrice et lubrique des textes de Sade ou même la désinvolture satirique de Maupassant. De par son mélange de styles et son ADN très littéraire, le film rappelle aussi l’excellentissime série La Quatrième Dimension, qui débarqua un peu plus tard, en 1959. 

La personnalité atypique et dérangeante de son protagoniste (qui mêle à ses pulsions sexuelles, des fétiches morbides) invoque aussi Le Voyeur (1960) de Michael Powell, puis les films italiens du Giallo. Pourtant, au milieu de cet océan de références et de comparaisons alléchantes, on a ici trouvé plus amusant (et pertinent) de relier La vie criminelle d’Archibald de La Cruz à une œuvre issue d’un médium plus moderne. C’est dans le Death Note de Tsugumi Ōba et Takeshi Obata, que l’on retrouve la similitude la plus frappante.

 

Death Note : photoLa vie criminelle de Light Yagami

 

Dans le manga Death Note, le jeune homme du nom de Light Yagami se sert d’un carnet pour tuer magiquement ses cibles. Il s’emploie à l’utiliser pour mener un carnage au nom de sa justice personnelle. Si l’œuvre d’Obata et Ōba se transforme davantage en récit policier qu’autre chose (trame passionnante, mais qui nous intéresse moins ici), il est très amusant de noter qu’aussi improbable que cela puisse paraître, elle pointe à de souvent dans la même direction que le film de Buñuel. Comme une relecture moderne et inconsciente du film surréaliste, Death Note semble se trouver dans sa continuité et offre à des spectateurs d’aujourd’hui un deuxième éclairage sur certains de ses thèmes. 

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commentaires
Bubu conejo
20/02/2023 à 23:12

Un véritable régal, très drôle qui plus est.