Blood Ties : Critique

Sandy Gillet | 19 mai 2013
Sandy Gillet | 19 mai 2013

Remake en langue anglaise et transposition dans le Brooklyn des années 70 des Liens du sang de Jacques Maillot, Blood Ties avait tout sur le papier pour faire un grand film. 

D'abord un cast généreux avec Clive Owen, Billy Crudup,  Mila Kunis, Zoe Saldana, le césarisé Matthias Schoenaerts et l'oscarisée Marion Cotillard, ensuite une histoire qui a déjà fait remarquablement ses preuves depuis le bouquin des frères Papet tiré de leur histoire commune de flic et de voyou, enfin une production d'envergure (25 millions et demi d'euros) avec derrière la caméra un Guillaume Canet qui sait mettre l'eau à la bouche avec des projets excitants et accessoirement figure de proue de sa génération. À l'arrivée c'est la déception qui prévaut. Non que l'on soit en face d'un gâchis. Canet, en bon chef d'orchestre, a su lier ensemble les atouts évidents du film. Mais que la symphonie finale manque de surprises, de peps, de transgressions, d'empathies et de collusion avec son public. Tout s'enchaîne mais à vide.

 

 

Et on aurait bien du mal, quelques heures après la vision du film, de mettre spécifiquement le doigt sur ce qui cloche vraiment. Les acteurs en roue libre ? Pourtant chacun campe son rôle comme attendu. Mais il manque à l'évidence l'étincelle collective qui aurait fait ici de Blood Ties autre chose qu'une galerie de personnages ultra déjà vus dans le cinéma et la série US. Un scénario édulcoré ? Il est tout de même co-écrit par James Gray dont on peut comprendre l'affect pour une telle histoire tant elle rappelle par beaucoup d'aspects celle de La nuit nous appartient, thématiques incluses. Mais il n'en demeure pas moins en retrait par rapport à celui des Liens du sang qui était beaucoup plus minéral et radical. Une mise en scène éléphantesque ? Canet filme tout cela tel un éléphant dans un magasin de porcelaine à coup de grands mouvements de caméras posées sur des grues ou à l'aide de champs contre champs des plus scolaires. Tout est clean, chiadé, magnifiquement éclairé, reconstitué et sans âme.

 

 

Le film lorgne de surcroît et sans complaisance sur le cinéma U.S. des 70's dont l'influence centrale ici est French Connection. Attention, point de « copycat » mais la désagréable sensation d'une relecture qui ne va jamais au-delà d'un hommage viscéral mais sincère. Certains s'en contenteront, d'autres auront du mal et la majorité découvrira. En voulant absolument matérialiser un idéal de cinéma où Canet y projette sa cinéphilie fantasmée, Blood Ties devient une sorte de représentation mutante et désincarnée de deux langages cinématographiques qui s'annulent au lieu de s'enrichir mutuellement. Une gageure en soi qui tient surtout à la propension du réalisateur français à soumettre drastiquement son matériau de base à sa volonté / vision pour le faire rentrer coûte que coûte dans les cases de son film plutôt que de lui donner une chance de voler de temps à autre de ses propres ailes. On gagnerait alors en simplicité et en « légèreté », deux qualités que ne possèdent aucun des films réalisés par le bel enfant du cinéma français.

Ps : sinon on parie que Blood Ties sortira en salles dans une version plus courte, les 2h24 vues à Cannes concourrant à cette impression de lourdeur générale. 

 

Résumé

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