Critique : Woody Allen : A Documentary

Sandy Gillet | 16 mai 2012
Sandy Gillet | 16 mai 2012

Cette année encore Cannes a donc accueilli Woody Allen en son sein à la différence toutefois qu'il ne s'agissait pas cette fois-ci de venir présenter son To Rome with love, dernier opus en date perpétuant pour le cinéaste son exploration méticuleuse façon globe-trotter de notre espace de Schengen, mais bien de se faire tirer le portrait par un confrère réalisateur habitué du genre. Robert B. Weide semble au demeurant la personne idéale pour cerner le personnage, l'artiste et son univers puisqu'il est un des hommes clés de la série Curb your enthusiasm crée par Larry David. Show dont on sait qu'il est une sorte de prolongement hommage en mouvement perpétuel de toutes les névroses que Woody Allen avait su ériger en brillants postulats cinématographiques lors de sa période faste (les décennies 70 et 80).

Un Larry David que l'on retrouve fort naturellement parmi les intervenants (ami du cinéaste et acteur principal dans Whatever Works) d'un doc assez bancal à double titre mais dont le grand mérite est qu'il donne grave envie de revoir tous les films du premier geek de l'histoire du cinéma, même ceux qui sont considérés comme « ratés ». Le déséquilibre vient d'abord d'une méticulosité toute anthropologiste à nous montrer la jeunesse de l'homme et son ascension fulgurante dans le milieu du « show-business » pour ne nous livrer ensuite que des bribes d'informations enrobées de considérations critiques assez peu intéressantes. Le spectateur peu familier avec l'univers du bonhomme et sa filmo en sera pour ses frais. L'autre carence est le côté biopic à décharge de l'ensemble peinant à rendre compte de la complexité d'un réalisateur qui aura défrayé la chronique dans les années 90 après avoir trompé sa muse Mia Farrow avec leur fille adoptive. Certes le sujet n'est pas passé sous silence (le contraire serait de toute façon impossible), certes on pourra aussi arguer que cet aspect « people trash » n'a que faire au sein d'un film comme celui-ci. Sauf que c'est un tout et un élément non négligeable dans la compréhension d'un artiste dont le paradoxe est de plaire immodérément aux femmes (son côté intello et fragile que l'on aime à vouloir protéger) tout en leur vouant une sorte d'amour haine qui découle de sa timidité maladive et de son immense propension à toujours douter de soi.

Une complexité extraordinaire que chacun de ses films dévoile d'une manière toujours parcellaire. Certains d'ailleurs avec plus de bonheur que d'autres pour devenir des chefs-d'œuvre instantanés (Manhattan, Annie Hall, La rose pourpre du Caire, Alice, Meurtre mystérieux à Manhattan...). On conviendra aussi que vouloir circonvenir un tel maelstrom de sensibilités contradictoires qui couche sur sa machine à écrire datant d'avant 1940 tous ses scénarii (le fameux copier coller exécuté littéralement avec des ciseaux et des agrafes) et bon mots (Woody Allen a débuté ainsi, en écrivant des gags pour les autres) n'est pas simple. On sera donc d'accord pour dire que le doc sur lui reste à faire. Mais c'est au final heureux car le contraire serait comme un enterrement de première classe et le juif new-yorkais binoclard a encore tant de choses à nous dire. Enfin on l'espère.  

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