Critique : Espace détente

Sandy Gillet | 2 février 2005
Sandy Gillet | 2 février 2005

Que l'on ne s'y trompe pas, Espace détente ne procède pas stricto sensu de Caméra Café, comme on voudrait nous le faire croire, mais bien d'une obsession commune des deux trublions de la télé, que sont Bruno Solo et Yvan Le Bolloc'h, à réaliser un film depuis toujours. Mais dire que le succès de cette série, qui a galvanisé pendant plusieurs années l'access prime time de M6, ait aidé dans cette démarche ne fait, par contre, aucun doute. De fait, elle est même devenue le passage obligé qui, s'il s'avère payant, leur permettra sûrement de voler enfin de leurs propres ailes.

Alors justement, qu'en est-il de ce faux passage sur grand écran d'une série dont le concept minimaliste était la pierre angulaire du succès ? Et bien, comme on peut s'en douter, extrêmement dilué ! Du café serré, parfois sucré mais toujours corrosif, on n'obtient malheureusement qu'un liquide, certes un peu noir, mais au goût très prononcé de flotte. C'est à se demander d'ailleurs si, sur le papier, le film aurait vu le jour sans le succès de la série tant les écueils propres à l'exercice n'ont, à quelques exceptions près, pas été évités.
À commencer par le sentiment désagréable d'assister à un sketch unique et dilaté à l'extrême où l'enchaînement des gags manque cruellement de rythmes et de souffle. C'est qu'à prolonger l'existence des personnages de la série au-delà de cet espace de détente autour de la machine à café demande un style d'écriture à la Weber que le tandem n'a visiblement pas encore, se contentant de procéder par petites touches extrêmement caricaturales, propres certes au genre même de la comédie, mais qui débouchent ici immanquablement sur des traits grossiers et quelque peu racoleurs.

Le paradoxe veut justement que ce soit un nouveau venu (Arnaud Roussel, un cadre quarantenaire aux dents longues et revanchard) qui remporte la mise prouvant par là que nos deux compères n'auront jamais été plus à l'aise que quand il s'agissait de ne pas développer le bestiaire de la série. S'en donnant à cœur joie et relayé à l'écran par un Thierry Frémont (Les Démons de Jésus, Livraison à domicile avec déjà Bruno Solo) époustouflant tant il en fait des caisses et des caisses, le film laisse entrevoir une certaine liberté de ton assez jubilatoire. On se prend alors à rêver d'un film sans laisse où l'histoire prétexte aurait permis cette dénonciation féroce du monde de l'entreprise ultra libéral initialement voulu par les deux auteurs.

Le fait est que les zygomatiques, s'ils ne travaillent pas à outrance, s'activent tout de même de temps à autre. Ce qui nous fait dire que si Espace détente semble paradoxalement trop engoncé dans ses origines télévisuelles, il laisse supposer que tout cela n'est qu'un enterrement à la va vite dans le but évident de tourner définitivement la page. On ne peut dès lors qu'ambitionner pour nos deux ex -comiques au ton décalé du PAF, de faire les meilleurs scores possibles avec cet Espace détente afin de voir naître un éventuel second film et d'apprécier enfin ce qu'ils ont véritablement dans le ventre. C'est in fine tout le mal que nous pouvons leur souhaiter.

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