Contrecoups : critique du huis clos ensoleillé de Netflix

Lucas Jacqui | 21 mars 2022 - MAJ : 25/03/2022 12:16
Lucas Jacqui | 21 mars 2022 - MAJ : 25/03/2022 12:16

Le cambriolage d'une villa vire à la séquestration du couple de propriétaires avec Jason SegelJesse Plemons et Lily Collins dans ce huis clos de Netflix. Savamment mis en scène et scénarisé, Contrecoups de Charlie McDowell est-il une réussite dans les pas d'Alfred Hitchock ou une petite déception en manque de suspense ?

à l'école du suspense

Pour son troisième film, Charlie McDowell revient accompagné du scénariste Justin Lader, présent sur ses deux précédents films The One I Love et The Discovery. Et pour parfaire l'écriture de ce film à suspense, le réalisateur a fait appel à une sommité du genre, Andrew Kevin Walker (Seven, 8 mm et travaillé sur The Game et Fight Club). Contrecoups part donc avec les bons chevaux pour être un long-métrage bien ficelé qui va tenir en haleine. Ainsi, McDowell retourne à une atmosphère dans la veine de The One I Love, une villa isolée, de la verdure, un soleil tapant, un lieu à l'inverse des codes du genre donc, en bonne application de l'enseignement du maître du suspense Alfred Hitchcock.

La réussite de la première scène atteste de la qualité générale du film. Tout en sobriété, le décor est posé dans de longs plans fixes ou panoramiques faisant de Jason Segel un intrus dans cette classieuse résidence. La musique grinçante ne fait qu'accentuer le danger planant de ce cambriolage. À la venue des propriétaires interprétés par Jesse Plemons et Lily Collins, tout bascule, engageant alors le film dans un huis clos au milieu des orangers.

 


 

Un huis clos qui permet de resserrer l'histoire sur les convictions et le passé des personnages, transformant la tension de cette prise d'otages en lutte psychologique qui exacerbe les relations entre chacun, perturbant les rôles et changeant les visages. Qui est finalement le ravisseur et la victime ? La réponse est évidemment plus complexe que prévu et les murs du huis clos finissent par changer de forme pour prendre ceux d'une liaison toxique ou du pouvoir de l'argent. Finalement, la rançon qu'attendent Jason Segel, Lily Collins et Jesse Plemons n'est qu'un McGuffin qui, telle une expérience sociale, nous laisse le temps d’observer qui va craquer en premier.

Car être en colocation avec des amis c'est découvrir les travers de chacun. Et étrangement, passer une nuit avec ses otages, c'est un peu pareil. Comme un effeuillage subtil, la découverte réservée des regrets, combats et désirs de ces reconfinés est une réussite. Les dialogues naturels ne nous étouffent pas de background, mais donnent suffisamment de clés pour voir en ce huis clos une nouvelle confrontation des classes dont chaque protagoniste se trouve à un extrême de la pyramide sociale. Leurs noms ne font qu'accentuer ce trait puisque l'on a le nobody, la femme et le CEO.

 

Contrecoups : photo, Jesse Plemons, Lily Collins, Jason SegelJason Segel joue une formidable armoire

 

LES NERFS À VIF

La mise en scène, rappelant les films noirs et ses plans moyens, a en plus la bonne idée de ne porter aucun jugement sur les protagonistes. Au contraire, elle laisse le cadre aux acteurs pour qu'ils l'habitent. Du reste, Contrecoups aurait pu être une pièce de théâtre avec ces quelques plans larges faisant transition entre deux décors où défilent en file indienne les colocataires involontaires comme s'ils allaient monter sur les planches, accentuant leurs différences de gabarits, de démarches et de styles.

Se posant comme une confrontation entre le cambrioleur et ses otages, le film oscille habilement entre plusieurs tons. Les ambiances changent, comme autant de cartons noirs qui viennent chapitrer l'histoire, passant d'une comédie noire des Frères Coen au drame social en allant jusqu'au thriller violent. Une aisance à basculer d'un registre à l'autre que l'on retrouvait déjà dans son premier film The One I Love qui s'amusait à mêler drame amoureux et enquête sur un mystère type La Quatrième Dimension.

Toutefois, cette variation de rythme est un jeu dangereux avec lequel le film se brûle un peu, notamment en prenant le risque de s'attarder sur les moments d'attente des personnages. Un ventre mou fait retomber le suspense, seulement maintenu par la jambe crispée et tremblante de Jesse Plemons, alors que l'on patiente que la prochaine péripétie du scénario se pointe.

 

Contrecoups : photo, Jesse Plemons, Lily Collins, Jason SegelContrecoups de soleil

 

Certes, Charlie McDowell a un sens du concis et sait ne pas trop s'éterniser (la longueur du film, 1h35, l'atteste). Le problème, c'est que cette efficacité technique joue en la défaveur de l'histoire. Alors que la mise en scène à poser des fusils de Tchekhov dans une économie de plans aussi maîtrisée que scolaire, le long-métrage se trahit lui-même en indiquant tous ses éléments de scénario, dont on voit arriver la conclusion trop rapidement.

Ainsi, Contrecoups manque d'une réelle surprise qui le démarquerait vraiment des autres thrillers et le ferait sortir du chemin balisé du genre. Reste heureusement l'écriture des personnages et l'interprétation parfaite de son casting de haute qualité qui donne toute la force à cette nouvelle production Netflix. 

S'il est difficile de le craindre et d'être surpris par son évolution (sa sympathie inhérente jouant contre lui dans le rôle du voleur dépassé), Jason Segel est excellent. De son côté, Jesse Plemons en otage millionnaire qui négocie à la hausse sa rançon, preuve d'un égocentrisme faisant excès d'assurance et d'arrogance, est brillant. Mais c'est bien Lily Collins qui bluffe le plus en femme à la retenue cachant une épouse prisonnière d'un mari écrasant de condescendance (et nous faisant presque oublier sa présence dans Emily in Paris). 

 

Contrecoups est disponible sur Netflix depuis le 18 mars 2022

 

Contrecoups : Affiche officielle

Résumé

Certes, Contrecoups est un peu attendu et manque d'une vraie grande idée pour se démarquer. Toutefois, avec sa mise en scène irréprochable et ses trois acteurs ne cessant de se voler la vedette, McDowell livre un huis clos stressant hyper plaisant.

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Lecteurs

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commentaires
Meuldore
05/04/2022 à 22:06

Un navet de plus dans le jardin.

X-or
02/04/2022 à 19:24

Pas terrible.
Musique envahissante.
Rythme mou du genou.
Situation de départ risible

Mr Patator
24/03/2022 à 14:10

Fusil de TchekHov

sylvinception
23/03/2022 à 16:07

Ne tirez pas sur le stagiaire!! :-)

GTB
22/03/2022 à 11:56

J'ai bien aimé! Je lui reprocherais d'appliquer la recette efficacement, certes, mais un peu trop sagement. J'avais l'impression d'avoir toujours un peu d'avance sur le film. Cela dit, l'ensemble est maîtrisé et le trio d'acteurs porte bien le film. Bon film. Il lui manque juste un peu de mordant.

Ded
22/03/2022 à 11:52

Dans le contexte de la phrase : (Il est) savamment mis en scène… où est la faute ?! Le présent "il met" ne s'applique pas, ni le passé simple : "il mit"...

Once again
22/03/2022 à 10:57

N'y aurait-il pas comme un problème de style ? Certaines phrases sont visiblement trop alambiquées pour leur rédacteur. Relisez vous par pitié. Merci.

Lucas Jacqui - Rédaction
22/03/2022 à 10:29

@Barnabé Cherèle

Habile coup d'oeil ! Merci

endormi dessus, c'était bien ?
22/03/2022 à 08:40

Vraiment ?

Barnabé Cherèle
22/03/2022 à 08:40

Savamment miS en scène ;-)

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