One Night in Miami... critique qui refait le monde sur Amazon

Simon Riaux | 22 janvier 2021 - MAJ : 09/03/2021 15:58
Simon Riaux | 22 janvier 2021 - MAJ : 09/03/2021 15:58

Quelques heures après une victoire décisive, Mohammed Ali retrouve Malcolm X, Jim Brown et Sam Cooke pour ce qui s'annonce une nuit de célébration. Mais autour de la star montante de la boxe, les trois amis vont explorer, quitte à se déchirer, le sens de leur statut social et de leur poids au sein de la société américaine. Pour son premier film de cinéma One Night in Miami..., disponible sur Amazon Prime Video depuis le 15 janvier 2020, Regina King s'attaque à un sujet attendu mais moins évident qu'il n'y paraît.

CLASSIEUX CLAY 

Avec la résurgence de tensions raciales et sociales majeures aux États-Unis, Hollywood s’est logiquement fait la caisse de résonnance des débats animant la population américaine. De films historiques en pures fictions, le cinéma s’empare de plus en plus fréquemment tant de figures historiques que de personnages capables de symboliser les problématiques de leurs temps. Mieux, des personnages hérités d’une histoire particulièrement violente, conflictuelle, ou tue (voire la récente éruption du massacre de Tulsa dans la pop culture contemporaine, après des décennies de silence).

À la frontière des différents sous-genres de cette mouvance, One Night in Miami... marque les débuts de l’actrice Regina King en tant que réalisatrice de cinéma. Une transition que l’artiste a amorcée ces dernières années, mettant en scène plusieurs épisodes de séries, avant que l’éclatant succès de la mini-série Watchmen la ramène sur le devant de la scène médiatique.

 

photo"A la santé des gestes barrière !"

 

Avec One Night in Miami..., elle adapte la pièce du dramaturge Kemp Powers qui retrace la soirée au cours de laquelle se sont rassemblés et confrontés Malcolm X, Mohammed Ali, Jim Brown et Sam Cooke. 

L’occasion pour ces quatre icônes de la culture américaine et hérauts de la communauté noire (parfois malgré eux) de confronter leurs points de vue et de questionner les aspirations des uns et des autres. Le procédé est académique, le message politique pré-digéré et la mise en scène souvent attendue. One Night in Miami... n’est pas tant là pour bousculer le cinéma politique américain qu’en proposer une incarnation polie, façonnée pour recevoir tous les badges de bonne conduite et draguer le fond de cuve des Oscars avec la délicatesse d’un chalutier britannique un lendemain de Saint-Sylvestre. 

 

photo, Kingsley Ben-AdirVictoire par KO ?

 

UNE COURONNE POUR REGINA ? 

Mais qu’on ne s’y trompe pas, pour programmatique que paraisse le long-métrage, il n’est pas pour autant dénué d’intelligence quand il doit dérouler son propos. Il ne l'est pas moins de cinéma quand il doit aborder la transcription visuelle d’un geste théâtral. Les choix de casting sont à ce titre éclairants.

Regina King a ainsi choisi pour interpréter Malcolm X l’acteur Kingsley Ben-Adir, comédien excellent, mais tout en discrétion et murmures contrits, à l’opposé des représentations traditionnelles de l'éminente figure. Et pour cause, le scénario se penche précisément sur ses doutes, et avec une finesse parfois inattendue sur son rapport à la politique, la foi, l’engagement. À l’inverse, tandis que sa statue du commandeur s’effrite et que le film discute du statut de la religion musulmane dans l’émancipation des noirs américains, les autres personnages peuvent se développer et prendre une belle ampleur.

 

photo, Kingsley Ben-Adir, Eli GoreeLa tête haute, le regard conquérant

 

C’est cette seconde partie du récit qui est, de loin, la plus réussie. Curieusement, King se montre beaucoup plus alerte et précise quand elle est face au défi de dynamiser un long dialogue théâtral que lorsqu'il s'agit d'y greffer des saynètes inédites, lesquelles alourdissent considérablement le premier acte du récit.

La cinéaste parvient alors à filmer l’évolution des discours, et des positions de chacun, se posant, sans inventivité révolutionnaire, mais avec un soin aigu du cadre, la question de la représentation du verbe. Dans ces beaux moments, King capture bien les grandes fractures qui traversent le militantisme et le communautarisme américain, et fait œuvre de vulgarisation avec un savoir-faire indéniable.

One Night in Miami... est disponible sur Amazon Prime depuis le 15 janvier 2021 en France

 

affiche officielle

Résumé

Si le film de Regina King trahit plus d'une fois ses origines théâtrales et ne révolutionne rien, la comédienne et cinéaste fait plus d'une fois preuve d'un savoir-faire et d'une intelligence qui le hisse au-dessus du tout venant en matière de cinéma sociétal américain.

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Lecteurs

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commentaires
Kolby
22/01/2021 à 13:05

@keeds
C'est ton avis de ne pas aimé, c'est ton choix, mais saches aussi que il enrichit encore plus ceux qui connaissent l'histoire de la lutte pour le droit civil. Ne te crois pas trop instruit pour dire des inepties pareils, c'est de la bassesse d'esprit.

@ letleilaxu quant à toi je pense qu'il faudra terminer le métrage avant d'attaquer les insomniaques.

Clay
22/01/2021 à 12:44

Avant toute chose , bonne année à tous camarades cinéphiles (en espérant une réouverture des salles)

Si vous êtes intéressés par Mohammed ALi et Malcom X , je vous suggère deux documents:

Le premier concernant le légendaire boxeur est une vidéo disponible sur Youtube.Il s'agit d'une interview accordée à la chaine de télévision irlandaise RTE dans le cadre de l'émission ''In conversation with Cathal O'Shannon'' datant du 17 juillet 1972. (après sa suspension de trois ans de ne pas boxer pour avoir refusé d’être la draft pour la Vietnam) Au cours de cet entretien , Ali évoque la condition des Noirs aux USA, sa passion pour le noble art, son rapport à la notoriété.
Ali s'y montre affable, pertinent et drôle comme souvent dans l'exercice télévisuel

Concernant Malcom X, je conseille à celles et ceux qui connaissent la langue de Shakespeare de lire ''The Autobiography of Malcom X as told to Alex Haley''. Projet étalé sur deux ans (1964-65) , le leader se confie au futur auteur de ''Roots'' dans un ouvrage passionnant, poignant, révoltant et terriblement humain.Il revient sur sa jeunesse pauvre en Arkansas, sa découverte du racisme et de l'inégalité de classe dès son enfance sur les bancs ce l'école, ses années de jeune voyou, dealer et cambrioleur à Detroit et Harlem, son passage en prison qui paradoxalement va le sauver et lui faire découvrir l'Islam, sa déception et sa séparation de Nation of Islam et son leader Elijah Muhammad, et son pèlerinage à La Mecque.
A travers ce témoignage, on découvre également l'homme privée, son amour pour sa femme et ses filles, son admiration contrariée pour Martin Luther King (''reluctant admiration'' comme le cite Haley) également capable de faire preuve d'humour par instant.

Livre disponible sur Amazon. Existe également en VF aux éditions Grasset

letleilaxu
22/01/2021 à 12:25

Je me suis endormis avent la fin. A conseiller pour les insmoniaques.

Keedz
22/01/2021 à 11:46

Alors j'ai pas du tout aimé ce film l'intention était bonne mais mon dieux que c'est long et bavard (2h ). Je pense que ce film est bien pour ceux qui n'y connaissent rien à l'histoire de la lutte pour les droits civils, contre le racisme et ses figures historiques pour les autres il ne sert rien

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