Halt and Catch Fire saison 3 : cette série fabuleuse qui ne cesse de surprendre et fasciner

Geoffrey Crété | 13 octobre 2016 - MAJ : 09/03/2021 15:58
Geoffrey Crété | 13 octobre 2016 - MAJ : 09/03/2021 15:58

Halt and Catch Fire, la série d'AMC avec Lee PaceMackenzie DavisScoot McNairy et Kerry Bishé, n'a pas déçu pas avec une troisième saison trépidante.

ATTENTION HEIN ON SPOILE COMME DES COCHONS.

Ça commence par une célébration : ça chante Sinatra sur scène, ça picole à côté des unités centrales. Mais en coulisses, c'est le chaos. Au sous-sol où la machine peine à s'élancer, derrière une porte où le sourire laisse place à angoisse profonde. Encore une fois, le pire est évité de peu. Mutiny brille, Mutiny jubile, Mutiny explose, presque littéralement lorsque Cameron lance des feux d'artifice que Gordon éteind aussi vite que possible. 

Qu'il y ait un léger tremblement de terre dès le premier épisode rappelle bien que ce monde où les personnages veulent vivre, où ils tentent de poser quelques pierres à l'édifice du futur, menace de s'écrouler à tout moment pour les ensevelir. L'intention des créateurs, Christopher Cantwell et Christopher C. Rogers, était de parler des rêveurs oubliés de l'Histoire, et Donna le répète dès le début de la saison 3.

Et s'ils disparaissaient sans que personne ne se souvienne d'eux ? Et si leurs rêves étaient des mirages qui ne pourraient résister à la mythique Silicon Valley ? Et si Joe, Cameron, Gordon et Donna montaient plus haut pour mieux se crasher ?

 

Saison 3

  

"ARE YOU SAFE ?"

La question de la sécurité plane dès le premier épisode, comme une épée de Damoclès au-dessus de San Fransisco avec les grands panneaux publicitaires de Joe, devenu une superstar grâce à l'antivirus volé à Gordon. La sécurité sur les chats privés, face à la concurrence, la trahison amicale et conjugale, ou même le sida.

Après l'ascension folle et furieuse de la saison 2, Mutiny avance sur des territoires inconnus dans la saison 3. La relation entre Cameron et Donna est mise à l'épreuve face aux succès, aux ambitions et aux rêves. Comme cette zone de pixels abstraite qui sert d'horizon dans leur programme, qu'elles regardent comme leurs avatars, elles ont encore tout à écrire. "Il faut que ce soit quelque chose de super", dit Donna, avec ce sentiment d'urgence qui palpite dans chaque épisode.

 

Photo Kerry Bishé, Mackenzie Davis

 

L'implosion attendue des leaders unis de Mutiny rappelle celle de Joe et Gordon, l'autre grande histoire d'amitié quasi amoureuse de Halt and Catch Fire. Cameron a beau avoir trouvé en Joe son âme soeur, Donna a beau être mariée à Gordon, la relation professionnelle et sentimentale entre les deux femmes, et les deux hommes avant elles, compte plus que le reste. Cette attirance presque maladive revient par vague, malgré les trahisons, les échecs, les rancoeurs.

La fusion du duo en Mutiny est hautement instable, tour à tour idyllique et destructrice. Le titre de la série, qui fait référence à une instruction informatique quasi mythique qui augmentait la capacité d'une machine au risque d'en embraser les circuits, prend encore une fois tout son sens. Après Joe et Gordon, la série a basculé sur les deux femmes, redistribuant brillamment les énergies et les cartes. Alors que les personnages connaissent divers succès professionnels, prouvant leur intelligence et leur inventivité, c'est l'aspect humain de leur quatuor qui semble les condamner chaque fois un peu plus. 

 

Saison 3

 

SHE LOST CTRL AGAIN

La lente montée infernale vers l'implosion redoutée de Mutiny est sans conteste le coeur de cette troisième saison. L'épisode 7, qui se cloture sur une déchirure brutale et officielle, est l'un des grands moments de la série. Dans ce pic terrassant, Mackenzie Davis se montre encore une fois sensationnelle, rappelant que parmi un casting fabuleux, elle a su briller de mille feux, composant un personnage fantastique et iconique.

En arrière-plan, la saison introduit deux protagonistes solides : Diane Gould et Ryan Ray. Elle est le miroir de Donna, et lui servira de phare pour la guider. Lui, parfaitement interprété par Manish Dayal et inspiré par l'histoire vraie d'Aaron Swartz (un brillant informaticien qui s'est suicidé à 26 ans en 2003), illustre la nature potentiellement autodestructrice de Cameron et Joe, et cette passion dévorante qu'ils tentent de contrôler - notamment en s'en éloignant.

Les forces se déplacent à nouveau dans Halt and Catch Fire suite à ce cataclysme. D'abord avec Cameron éjectée de Mutiny face à Donna, Joe qui repart en croisade et Gordon qui se relève pour l'affronter en l'invitant à danser une nouvelle fois. Ensuite, et plus spectaculaire : dans les deux derniers épisodes, diffusés en un bloc, la série se projette quatre ans dans le futur, et quitte les années 80 pour la décennie suivante.

 

Photo saison 3

 

LEVEL COMPLETED

L'idée d'une ellipse de ce genre n'est pas nouvelle, et a été vue dans des genres aussi différents que Lost et Desperate Housewives. Dans la série de Christopher Cantwell et Christopher C. Rogers, elle a deux fonctions très habiles. D'un côté, elle permet de zapper plusieurs épisodes (l'absence de Cameron installée au Japon, le divorce de Donna et Gordon) pour ne pas s'en encombrer, et rester sur une ligne dramatique solide, pure, avec des conflits encore plus grands avec le poids du temps. De l'autre, elle plonge les personnages à l'aube du nouveau millénaire, à l'ère du World Wide Web, qui sera au coeur de la quatrième et ultime saison

Lorsque Cameron et Gordon tuent le boss de Mario à force de persévérance et collaboration, ils réalisent que la partie est loin d'être terminée, et que le prochain niveau les attend. La série leur porte le même coup : le groupe a implosé, chacun a recyclé son énergie dans un autre système (Donna en business woman, Cameron avec Space Bike, Joe et Gordon dans leurs propres affaires), mais une force silencieuse les pousse à se retrouver. Comme L'Appel de la forêt qui attire le chien vers l'état sauvage, le quatuor est irrésistiblement poussé vers cet état fébrile de création-destruction.

Sans surprise, et pour le plus grand bonheur du spectateur, la saison 3 se termine ainsi avec un nouveau projet pour tenter, à nouveau, de forger et dompter le futur. Cette fois, c'est Donna qui est poussée hors du cercle, comme Joe qui a été en retrait cette saison. Comme lui, elle paye ses erreurs, ses trahisons, et comme lui, elle semble déterminée à ne pas couler avec ses fautes. Preuve, encore une fois, que le personnage est l'un des plus riches et étonnants de la série.

 

Photo Lee Pace

 

MY VELOURIA

Au-delà de la richesse dramatique, Halt and Catch Fire est une série envoûtante. Si elle bénéficie principalement de l'attrait désormais ordinaire de la nostalgie, la direction artistique est superbe, avec un soin discret mais certain apporté aux décors et à la photo.

Moins poseur que Mr. Robot, une autre histoire d'informaticiens qui a de son côté trouvé son public, la série a construit une vraie identité, avec une mise en scène sophistiquée et un montage adroit. Qu'elle soit composée par Paul Haslinger (connu des fans de Tangerine Dream) ou qu'elle fasse appel au répertoire de l'époque, la musique est devenue un élément capital de l'ambiance, sans jamais devenir un accessoire tape-à-l'oeil.

 

Photo Scoot McNairy

 

Surtout, Halt and Catch Fire n'a pas succombé à cette mode des épisodes d'une heure ou presque, qui abîme tant d'autres séries sous couvert de prestige. Des saisons de dix épisodes d'une quarantaine de minutes, précisément écrits et rythmés, en ont fait une série de premier ordre, d'une efficacité sobre mais redoutable.

Avec une saison 3 solide, nerveuse, passionnante, Halt and Catch Fire confirme donc sa trajectoire brillante. Et aura le luxe de se terminer en bonne et due forme avec une ultime saison programmée, qui permettra à Christopher Cantwell et Christopher C. Rogers de rendre justice à leurs héros hors-normes.

 

Saison 2

 

 

Tout savoir sur Halt and Catch Fire

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commentaires
patbugg's
22/10/2017 à 09:57

Franchement ! je me suis éclaté,Les acteurs peut connus, et c'est ce qui en fait son charme! Sont parfaits pour les rôles de cette série! J'ai retrouvé les années 80........ Commodore 64 etc....Les codeurs foufous, bon enfant!Avec tous ces moments galères, puis jouissifs......Enfin une série où on s'endort pas ! Grand merci à la production, aux réalisateurs, enfin tout le milieu cinéma!.Bravo!

gourou
21/07/2017 à 17:34

C'est une série qui me fait passer, par la méditation ! Merci !
Je l'adore !