Seul face à l'abeille : critique où Mr Bean fait le Bzz sur Netflix

Matthias Mertz | 27 juin 2022 - MAJ : 27/06/2022 16:18
Matthias Mertz | 27 juin 2022 - MAJ : 27/06/2022 16:18

Difficile pour Netflix de trouver une figure plus chargée en bonhommie que Rowan Atkinson, illustre Mr Bean ou Johnny English dans les séries et films éponymes. Le voici de retour avec toujours plus de comique gesticulant dans une série loufoque, Seul face à l'abeille, où, tout empoté qu'il est, il doit lutter contre une abeille pour maintenir une demeure bourgeoise intacte. Nous en sommes-nous mis plein la ruche avec cette réalisation de David Kerr, où William Davies officie au scénario (les deux hommes ayant, pour rappel, planché sur Johnny English) ?

Le retour du roi

Vous avez cliqué sur cette critique à la suite d'un élan d'adrénaline. Est-ce le Rowan Atkinson de Mr Bean ? Celui que vous regardiez en souriant béatement sur le canapé d'un petit appartement avec vos parents ? Est-il de retour pour plus de gesticulations candides et de regard benêts ? Oui, il possède toujours ce don comique qu'il met en exergue dans Seul face à l'abeille sans atteindre le trop-plein, la satiété ou l'ennui.

Le scénario de cette courte série (neuf épisodes avec une durée totale de moins de deux heures) est d'ailleurs réduit à son strict minimum afin de lui laisser le plus de temps et d'espace possible pour déballer son arsenal de gags. Rowan Atkinson interprète ainsi Trevor, un père de famille divorcé, au chômage et plutôt pathétique, qui, afin d'offrir un week-end rêvé à sa fille, décide d'officier comme housesitter (gardien de maison en français). Le quinquagénaire, très peu dégourdi, se retrouve à veiller sur une maison moderne et bourgeoise, bourrée d'art contemporain hors de prix, et dans laquelle une abeille va lui mener la vie dure.

Si le postulat loufoque d'une abeille en CGI (qui se révèle d'ailleurs être un bourdon) comme antagoniste à un benêt maladroit et grimaçant peut sembler tordant, et bien, ça l'est. Et il est très difficile d'échapper à la série sans avoir au moins soufflé du nez.

 

Seul face à l'abeille : photo, Rowan Atkinson"Bonjour, c'est le CPF, vous avez encore droit à une formation avec ..."

 

Entre le chien et son allergie (laquelle faisant office de laxatif), la fragilité d'un manuscrit centenaire exposé dans une bibliothèque fermée par commande vocale (dont le code est la date d'une bataille scandinave imprononçable), ou la multitude d'oeuvres d'art inestimables présentes dans la demeure, Seul face à l'abeille parvient pleinement à réaliser son ambition d'être un Destination finale du gag et de la destruction mobilière.

Cet immense terrain de jeu, dont on a seulement effleuré les recoins, permet à la mise en scène de s'amuser de son protagoniste, en le manipulant dans des situations et des cadres variés, de la salle de bain au jardin en passant par le garage, en contre-plongée lorsqu'il chante sous la douche ou dans des plans larges et fixes pour le voir tournebouler tout en beauté. Heureusement, ce bordel technologique évite l'écueil de n'être plus qu'une comédie potache, et fait ainsi l'économie de toute considération sur l'entrée de l'électronique dans nos foyers.

 

Seul face à l'abeille : photo, Rowan Atkinson"Je peux tout expliquer ..."

 

Le format de la série, étrange au premier abord, est l'une de ses plus grandes forcesSeul face à l'abeille semble avoir été à un moment ou un autre de son développement un film, d'une durée inférieure à deux heures. Finalement, cet hypothétique film aurait été découpé en neuf épisodes, dont la durée oscille de dix minutes jusqu'à près de dix-huit minutes (chacun étant centré sur une pièce ou une situation conflictuelle particulière entre Trevor et l'abeille).

Ce découpage permet à la série de ne jamais voir son rythme ralentir, et d'être un cartoon énergique et une véritable sucrerie à binge-watcher, les épisodes s'enchaînant à une vitesse folle. Il aurait été difficile d'absorber un film de près de deux heures (qui serait parfois redondant à cause de la nature similaire des situations comiques), et ce format rend le contenu beaucoup plus digeste.

 

Seul face à l'abeille : photoCe bourdon est le symptôme de la volonté de laisser Atkinson entièrement seul à l'écran

 

We've bean there before

Il est toutefois difficile de ne pas approcher la série avec un soupçon de méfiance. La plateforme Netflix, comme elle l'avait fait avec The Pentaverate de Mike Myers, n'essaye-t-elle pas de toucher la corde sensible de la nostalgie en mettant en scène Rowan Atkinson dans un récit dont on jurerait, en plissant les yeux, qu'il s'agit d'un nouvel épisode de Mr Bean ? La réponse est, évidemment oui. Et de facto, Seul face à l'abeille paraît une imitation, pour ne pas dire une contrefaçon.

Une contrefaçon d'une excellente facture, certes, qui parvient à recycler le duo formé par le réalisateur et le scénariste de Johnny English, et qui donne la part belle au comique de Rowan Atkinson, mais une contrefaçon qui n'aura rien de mémorable en comparaison de Mr Bean.

 

Seul face à l'abeille : photo, Rowan AtkinsonAller au charbon, littéralement

 

Ce désir d'être une suite presque directe au personnage unanimement apprécié de Mr Bean pousse d'ailleurs la série à être un one-man-show. Rowan Atkinson est le seul levier d'humour, à l'exception de Cupcake, le gentil toutou, ou du diabolique bourdon en CGI. On pourra ainsi regretter un trop faible usage du personnage de policier dubitatif de Tom Basden, ou du couple bourgeois névrosé formé par Jing Lusi et Julian Rhind-Tutt, qui n'apparaissent que lors de l'introduction, de la conclusion, et à l'occasion de rares coups de fil.

De quoi se demander : pourquoi le récit souhaite faire intervenir tant de personnages (au vu de sa courte longueur) pour ne pas les convoquer ultérieurement ? La famille de Trevor ne sert qu'à souligner immédiatement qu'il s'agit d'une bonne âme, malgré sa maladresse, de la même façon que le couple propriétaire ne sert qu'à mettre en évidence ses manières rustres, et à relativiser les dommages qu'il causera (sont-ils vraiment à un tableau de maître près ?).

 

photoTom Basden, une présence comique malheureusement pas utilisée

 

En mettant l'accent uniquement sur le personnage de Trevor et sur les mimiques de Rowan Atkinson, la série se prive d'un comique de situation qui aurait pu élever les enjeux au sein de péripéties d'autant plus loufoques. Une visite surprise de l'ex-femme de Trevor ou des propriétaires suspicieux de retour à l'improviste sont autant d'idées qui auraient pu enrichir la narration, mais aussi les gags.

C'est dommage, a fortiori, dans la mesure où Seul face à l'abeille s'élance dans une tentative du genre, au milieu de sa saison, qu'elle désamorce immédiatement, nous privant ainsi d'une séquence de home invasion qui s'annonçait pourtant rocambolesque, perturbant pour notre plus grand plaisir le postulat de ce duel acharné entre une abeille et un acteur qui ne nous donnera jamais le bourdon. 

Seul face à l'abeille est disponible en intégralité depuis le 24 juin 2022 sur Netflix

 

 

Seul face à l'abeille : Affiche US

Résumé

Seul face à l'abeille ne parvient pas à s'extraire de son identité de contrefaçon lisse de Mr Bean, mais la promesse d'un divertissement léger, énergique et laissant la part belle au comique de gesticulation de Rowan Atkinson est pleinement réalisée. Et c'est bien suffisant pour l'aimer.

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(2.4)

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commentaires
Sigi
28/06/2022 à 01:54

@Lino

I understood that reference

Olvers974
27/06/2022 à 22:51

C'est surtout bien pomper sur un épisode de Malcolm ... ^^

Pi
27/06/2022 à 20:35

J'en suis au second épisode et je trouve que ça s'essouffle déjà. L'avantage c'est que c'est un format court. Je vais continuer pour voir mais "I have a bad feeling about this..."

Lino
27/06/2022 à 20:08

Oh, mais un chien n'avait pas marché sur cette abeille ? :)

Lino
27/06/2022 à 20:07

Oh, mais un chien n'avait'il pas marché sur cette abeille ? :)

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