Star Wars : The Bad Batch saison 1 – critique un peu plus près des étoiles sur Disney+

Antoine Desrues | 14 août 2021 - MAJ : 03/01/2023 23:58
Antoine Desrues | 14 août 2021 - MAJ : 03/01/2023 23:58

Entre The Mandalorian et le retour en fanfare de The Clone Wars sur Disney+, Dave Filoni s'est définitivement imposé comme le gardien du temple de l'univers de George Lucas ; un élève studieux, parfois un peu trop scolaire, mais toujours enclin à faire évoluer la franchise et sa mythologie. Résultat, il n'est pas étonnant que la meilleure idée de la saison 7 de The Clone Wars, (l'introduction d'une troupe de clones génétiquement modifiés) soit le sujet d'un spin-off. Mais après des premiers épisodes enthousiasmants, que vaut la saison 1 de The Bad Batch dans son ensemble ?

Les copains d'abord

Avec son pilote de 70 minutes (chroniqué avec entrain dans nos colonnes), The Bad Batch a entériné la générosité de son approche et de ses enjeux. Lucasfilm Animation y a, non seulement, trouvé le moyen d'asseoir sa maestria technique durement acquise depuis les balbutiements des premières saisons de Clone Wars, mais aussi d'affirmer le respect avec lequel son récit devait être traité.

Si la transition entre la prélogie et la trilogie originale est devenue le cheval de bataille de Star Wars depuis des années (cf. Rogue OneSolo), Dave Filoni et ses équipes ont le mérite d'avoir posé par le passé de nombreux pions pour donner corps à ce hors-champ. À vrai dire, c'est dans cette facilité que résident les principales qualités des aventures de Hunter et de sa bande, autant que leurs limites.

Alors qu'on peut s'attendre à un récit centré sur les dilemmes moraux de clones pas comme les autres face à la naissance de l'Empire, le premier épisode de The Bad Batch utilise son temps nécessaire pour donner une réponse franche : l'escouade 99, jugée pour son anormalité, comprend rapidement que le nouveau régime en place n'a pas les meilleures intentions du monde. Il ne faut pas bien longtemps à notre équipe de choc pour changer de camp (à l'exception de l'un d'entre eux) et fuir en compagnie d'une jeune clone hautement recherché par les autorités de Kamino : Oméga.

 

photoLa horde (plus ou moins) sauvage

 

Résultat, entre crise identitaire et quête de survie, The Bad Batch se construit un cocktail solide, quitte à prendre très rapidement un rythme de croisière. L'unité d'élite, composée de soldats aux capacités immédiatement reconnaissables (le leader, le technicien, l'encyclopédie vivante et la brute épaisse) éveille un fantasme de jeu vidéo aussi évident qu'efficace, engendrant son lot de scènes d'action jouissives. Mais ce que la série pioche aussi dans le dixième art, c'est un goût immodéré pour la narration de quêtes secondaires. Vite démunie, la Bad Batch profite de ses talents pour devenir une escouade de chasseurs de primes, au point de subir quelques missions sans grandes conséquences, qui rappellent une écriture usitée depuis The Mandalorian.

En réalité, le soufflet tend à légèrement retomber dans son premier tiers, qui se transforme en attraction plus ou moins emballante dans le fan-service de Star Wars, où le spectateur est amené à pointer du doigt sa télé à chaque apparition de personnage reconnu de l'univers, de Fennec Shand à Cad Bane en passant par les sœurs Rafa et Trace Martez. Fier de la cohérence qu'il a apportée à la franchise comme Kevin Feige avec le Marvel Cinematic Universe, Dave Filoni pêche sans doute par excès de zèle, même s'il exploite au mieux ses précédentes créations pour donner à l'ensemble un cœur émotionnel.

 

photoMême le meilleur perso de Clone Wars est de retour

 

De pire empire

À l'instar des aventures de Mando, The Bad Batch se relève aisément de ces petites baisses de régime par la force de ses ambitions, qui n'hésitent pas à jouer de leurs acquis pour refléter le lent bouleversement qui secoue la galaxie. Là où de nombreux récits de Star Wars se focalisent sur la suprématie de l'Empire et la naissance de la rébellion, le spin-off de The Clone Wars s'attelle à une tâche bien plus complexe, en captant les subtilités d'un système totalitaire qui n'a même pas besoin de s'imposer à la population.

Quand on sait que George Lucas a grandement basé la structure de sa saga sur l'histoire des régimes fascistes du XXe siècle, Dave Filoni ne pouvait pas mieux prolonger l'héritage du cinéaste. The Bad Batch semble même réussir là où la prélogie n'avait pas le temps d'explorer toutes ses envies : l'Empire y est vu comme un pouvoir insidieux, qui s'infiltre progressivement dans un monde peuplé d'êtres esseulés par la guerre qui vient de se terminer.

 

photoRambo et son escouade de choc

 

Dès lors, si l'on pourra reprocher à la série de rendre ses protagonistes souvent plus passifs qu'actifs, elle a aussi l'intelligence d'en faire des héros perdus dans l'immensité de cet univers. Par ses aventures, la troupe de The Bad Batch se transforme en zoom passionnant sur des petites histoires traduisant la fatigue d'une génération qui n'a plus la foi de se battre.

À vrai dire, c'est là que le fan-service fait des merveilles, car Filoni et ses équipes n'ont qu'à exploiter des éléments déjà introduits dans Clone Wars pour en dépeindre la tragique évolution. En témoigne le meilleur épisode de la série (le onzième), qui prend le parti-pris audacieux de se priver quasi-intégralement de ses héros, pour se focaliser sur la politique de Ryloth, une planète centrale dans la série Clone Wars depuis sa première saison. Alors que ce territoire a été libéré du joug séparatiste par les clones et par des rebelles Twi'leks menés par Chim Syndulla, on retrouve ce dernier désormais en train de faire des concessions avec un Empire bien décidé à y installer des avant-postes militaires.

 

photoLe meilleur épisode

 

La dernière chance au dernier moment

De cette façon, la série ose explorer une dimension volontairement déceptive, voire étonnamment mature au vu de la gestion de Star Wars par Lucasfilm depuis le rachat de Disney. Quand bien même certains visages connus sont de la partie, The Bad Batch traite son univers avec une touchante mélancolie, allant à l'encontre de l'immuabilité nostalgique instaurée par la dernière trilogie.

On sent l'envie des équipes de Filoni de projeter leur regard sur un monde en perpétuel mouvement, alors que l'animation recrée des lieux chargés d'histoire pour mieux les détruire. À ce sujet, la technique toujours plus perfectionnée de Lucasfilm coupe souvent le souffle, tant ses textures détaillées et ses jeux de lumière photo-réalistes rendent hommage à la richesse de Star Wars.

 

photoLes desseins de l'Empire se dessinent

 

La série parvient même à redonner une puissance toute particulière aux plans larges typiques de la saga, fourmillant ici de détails qui suffisent à donner corps aux planètes visitées. Mais surtout, en s'attardant dans ses derniers épisodes sur le démantèlement de la fabrique des clones sur Kamino, la série se permet un effet de style étonnant : une suite de plans sur des décors vides, portant en eux les traces d'un passé qui s'apprête à être annihilé.

Ainsi, en pardonnant la présence de certains épisodes "fillers" confortables, The Bad Batch fait vibrer par sa forte dimension tragique, trouvant un point d'ancrage dans la rivalité entre l'escouade 99 et un de leurs anciens membres : Crosshair. Cet enjeu cristallise d'ailleurs le regard politique fort et assumé de la série, qui observe le fascisme pour son attrait, celui qui mène de nombreux civils à rejoindre fièrement les rangs de l'Empire.

 

photoOméga, l'âme de la série

 

Et si le personnage d'Oméga tombe parfois dans le travers de l'enfant qui se met inutilement en danger, il reflète aussi le contrepoint essentiel de The Bad Batch : l'espoir d'une génération future prête à prendre la relève et à écrire son propre destin face à ceux qui ont choisi de poser les armes. Grâce à elle, la série offre même à ses personnages principaux de jolis moments de vulnérabilité, transcendant au passage leur caractérisation grossière. Il serait d'ailleurs injuste de ne pas mentionner le travail de doublage hallucinant de Dee Bradley Baker, dont les variations de voix donnent une forte personnalité à tous les clones qu'il incarne.

En bref, l'ensemble aurait pu se contenter d'être un spin-off peu inspiré de The Clone Wars, mais la série se repose sur ses acquis pour mieux explorer de nouveaux horizons, plus sombres et désenchantés. Le récit, conscient qu'il investit des heures peu radieuses de la galaxie lointaine, très lointaine, n'hésite pas à leur donner une tonalité douce-amère, particulièrement palpable dans les deux derniers épisodes. Un postulat fort qu'on a très hâte de retrouver dans une saison 2, commandée par Disney+.

La saison 1 de The Bad Batch est disponible en intégralité sur Disney+ en France

 

Affiche officielle

Résumé

Comme aux meilleures heures de The Clone Wars, The Bad Batch est une série débordant de créativité et d'amour pour l'univers de Star Wars. Si Dave Filoni se raccroche un peu trop aux branches de ses précédentes créations, ces dernières lui permettent aussi de dépeindre efficacement un monde en pleine mutation politique, comme George Lucas en a toujours rêvé. Le padawan n'aurait-il pas dépassé le maître ?

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(3.8)

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commentaires
kadem
24/08/2021 à 12:02

Il faut aussi souligner le travail incroyable du compositeur Kevin Kinner, qui signe encore une fois une bo à la hauteur de l'évènement.

Tuk
16/08/2021 à 10:14

@ Yaeck
"en captant les subtilités d'un système totalitaire qui n'a même pas besoin de s'imposer à la population" -> belle mise en perspective avec les événements actuels. +1"
Tu as sortie la bonne phrase pour attiser ma curiosité ! ;p

Bob nims
16/08/2021 à 01:25

Très bonne série digne de clone wars vraiment Dave filoni doit réaliser un film star wars !

Yaeck
14/08/2021 à 22:40

Fini le visionnage aujourd'hui de cette première saison. C'est pas mauvais mais il y manque quelque chose pour en faire un chapitre 'Star Wars' indispensable. Et en effet les doubles épisodes sur Ryloth et Kamino touchent du doigt ce quelque chose...J'attends donc d'en voir plus en saison 2 sans non plus en baver d'impatience...
"en captant les subtilités d'un système totalitaire qui n'a même pas besoin de s'imposer à la population" -> belle mise en perspective avec les événements actuels. +1

Glowy
14/08/2021 à 16:39

Que c'est laid! Comment drainer tout un univers, jusqu'au bout, de sa substance....

Abadakor
14/08/2021 à 15:37

Je trouve la saison 1 correct mais sans plus, avec des intrigues deja vu et pas folle ( sauf certains episodes)
,Une Omega insupportable , un show bien plus tourné vers les enfants ( les Bad Batch qui nelimine presque personne mais les paralysent uniquement etc..)
A part ca, ca reste agréable a regarder !

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