Le Loup de Wall Street : Martin Scorsese dénonce les critiques relatives à la moralité du film

Axelle Vacher | 20 octobre 2023 - MAJ : 20/10/2023 09:07
Axelle Vacher | 20 octobre 2023 - MAJ : 20/10/2023 09:07

Martin Scorsese n'a pas bien saisi les critiques à l'encontre de la moralité de son film Le Loup de Wall Street, et particulièrement du personnage de Leonardo DiCaprio.

Inutile de râbacher combien Martin Scorsese a donné lieu à une filmographie riche, variée, et quasiment impeccable. Perpétuellement salué par la critique, le public et ses pairs (on rappelle que Francis Ford Coppola l'a récemment qualifié de plus grand cinéaste vivant, rien que ça), le réalisateur du tout magnifique Killers of the Flower Moon s'est forgé une réputation quasi unanime en quelque soixante ans de carrière.

À noter toutefois que cela ne signifie pas que Scorsese est exempt de toute réprobation. C'est ainsi qu'à la sortie du Loup de Wall Street, oeuvre que beaucoup considèrent comme le magnum opus commun du cinéaste et de son acteur de tête, un reproche en particulier aurait été avancé à l'encontre du film, et son réalisateur n'a pas bien saisit le pourquoi du comment.

 

 

conte moralisateur ou fable désenchantée ?

Ainsi, il aurait été avancé que Le Loup de Wall Street ne condamnait pas assez ni son protagoniste, ni ses agissements douteux figurés tout au long du film. Martin Scorsese se serait ainsi vu accusé de ne pas avoir pris suffisamment de recul face à son sujet, et d'avoir échoué à figurer un point de vue moralisateur destiné à fustiger le personnage de DiCaprio. Une décennie plus tard, le cinéaste a choisi de mettre les points sur les i lors d'un entretien accordé au micro de GQ :

"Je ne l'ai appris que l'autre jour ; un journaliste m'a demandé si j'étais au courant du débat autour du Loup de Wall Street. Alors je lui ai demandé de quoi il parlait. Il m'a dit qu'il y avait eu une projection du film à destination des critiques new-yorkais à la Paramount, et qu'apparemment, il y aurait eu deux camps : l'un adore le film, et le second est au contraire très remonté que je n'ai pas tenu de discour moral à l'encontre du personnage de Jordan Belfort."

 

Le Loup de Wall Street : photo, Leonardo DiCaprio, Jonah Hill"Je veux savoir si t'as bien compris que c'est mal. C'est maaaaaaaal."

 

"L'un des journalistes qui avait aimé le film aurait alors dit aux autres : "Est-ce que vous avez vraiment besoin que Martin Scorsese vous dise les choses pour que vous compreniez qu'elles sont mauvaises ?" Le personnage sait que ce qu'il est fait est mauvais, il n'a pas besoin de le dire. C'est incroyablement barbant, selon moi".

Que dire de plus ? Si le public a besoin d'un épilogue consacré à argumenter point par point en quoi les agissements d'un escroc et fraudeur sont plus que bancals, et en quoi les représenter n'est nullement synonyme d'en faire l'apologie... alors le cinéma n'est pas sorti de la misère. Au demeurant, Killers of the Flower Moon est toujours disponible en salles. Et au cas où ce ne serait pas assez clair, le meurtre des Osage, c'est mal, hein. 

Tout savoir sur Le Loup de Wall Street

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commentaires
alulu
20/10/2023 à 19:46

Comme tout le monde à la sienne de morale, il y aura toujours des personnes qui auront des réserves, sur un film, un livre.. Il n'y aura jamais de concorde, à la limite, c'est mieux ainsi. Il faut dire aussi que l'on hérite des travers de l'époque ou les censeurs, notamment à Hollywood, imposaient des personnages vertueux, plus propre sur eux. On baigne tous dans ce formatage, à un niveau différend en fonction de son propre background et les journalistes n'échappent pas à cette règle.

Nox
20/10/2023 à 16:41

Çà rappelle la sortie de Trainspotting où certains disaient que cela faisait l'apologie de la drogue ! Perso je ne sais pas vraiment à quel moment çà donne envie…

GTB
20/10/2023 à 15:11

Je propose un encadrement légal à cela. Genre un macaron "c'est pas bien" obligatoire apparaissant à l'écran à chaque action, dialogue ou pensée moralement sujet à débat.

Certes, ça risque d'être un poil invasif dans des films comme John Wick mais au moins le doute ne sera plus permis : le meurtre de masse, en vrai, c'est pas bien (au cas où certains en douteraient). Comme le dit l'expression ce qui va sans dire, va mieux en le disant. Cette idée devrait conduire tout art.

En attendant de réfléchir à une manière pour les auteurs de toujours expliciter ce qu'ils veulent dire directement à l'intérieur de l'oeuvre, sous contrôle d'un organisme qui vérifierait et validerait avant diffusion que tout est moralement ok et limpide.

C'est pas les voies qui manquent pour aider l'art à s’améliorer ^^.


20/10/2023 à 14:38

Un aspect crucial ici est que le personnage existe dans la vraie vie véritable. Petite expérience de pensée : choisissez une personne réelle qui â gâché des vies et que vous détestez. Verriez-vous d'un bon oeil un film relativement élogieux sur sa vie ? Prendriez-vous Di Caprio pour jouer le personnage ? Après lui avoir payé les droits d'adaptation, vous l'inviteriez à faire un cameo à la fin ?

Mathilde T
20/10/2023 à 14:26

Pour le coup Scorsese va bien se rattraper avec Killers of the Flower Moon ! La scène finale du Loup de Wall street montre quand même que les gens qui suivent les conseils payants de Belfort aveuglément avec les mêmes rêves sont filmés comme des ploucs crétins affamés. Mais c'est vrai que beaucoup n'ont pas l'intellect ou la morale pour le retenir face à des yachts. Scorsese fait partie des cinéastes aux récits ambigus comme De Palma ou Friedkin ; ils sont assez intelligents pour décrire ce qu'ils veulent et aux journalistes d'expliciter/interviewer un peu pour la frange lente du public ;)

K.
20/10/2023 à 14:00

C'est aussi mon problème avec ce film.

On montre quasi tout du long JB qui fait le guignolo avec tout son pognon et vit comme un roi sans jamais montrer les gens qui ont subi les conséquences de cet escroc et en sont sortis ruinés.
En clair le message du film, la morale de ce dernier est plutôt un encouragement à opérer de la même manière que JB car il n'y a que du positif qui est montré dans le film de son point de vue unique.

Et ceux qui disent que c'est au public de devoir faire un effort pour comprendre plus en profondeur les tenants et aboutissants et tout ce qui entoure les événements du film, je crois que vous n'êtes pas sur la bonne planète et que vous sur-estimez les capacités intellectuelles et/ou les efforts que sont prêts à faire la majorité des gens pour sinformer/reflechir correctement et outrepasser la forme pour rechercher le fond.

Xcice
20/10/2023 à 13:10

"J'ai effectivement trouvé que JB y était présenté sous un jour trop avenant"

Je comprends mais au final on revient toujours au spectateur: son éducation, son esprit critique, son emotionel, son intelligence, sa moralité. La vocation premiere du cinéma n'est pas d'éduquer ou de moraliser. C'est l'offre et la demande. Que le cinéma soit source d'influences ou de propagandes (volontaire ou non) soit. C'est la responsabilité du spectateur au final d'avoir le recul et l'education necessaire.

Sinon pourquoi classifier là présence de la cigarette au cinema mais pas la coke. Dans beaucoup de films de guerre, de genre, l'armée américaine, les USA sont présentés sous un jour avenant. par ex, les russes ou les arabes comme un danger.
John Wick, Nobody, Equalizer comme des vengeurs cools, stylisés. Y'a des gens que se verraient bien en Schwarzy en robot tueur dans Terminator 1, en Robocop de Verhoeven, John Dillinger dans Public Ennemies, John Travolta dans Pulp Fiction, en braqueur cools comme dans Ocean's 11, qui plébiscistent l'ambivalence des methodes dans Sicario etc etc..

A l'opposé par exemple certains hurlent que Ridley Scott puissent depeindre Napoleon comme un tyran type Hitler.

Le "problème" est humain et en amont sinon remplacer les films par des programmes consensuelles, aseptisés, des documentaires animaliers, de la propagande "educattif" à la ORTF.

C'est comme la liberté d'expression: on défend son application et ce qui est contraire à nos convictions, nos sensibilités soit on l'abolit. Pedant ce temps là on s'eduque, on se responsabilise et on essaye de devenir moins con :)

RobinDesBois
20/10/2023 à 12:53

Ce sont des vrais critiques ciné ? C'est pas possible, mais comment peut-on être aussi limité ? Ils n'aiment pas le cinéma ? Ils n'aiment pas les films de Scorsese ? Ils sont idiots ou ce sont simplement des hypocrites en puissance contaminés par la secte de l'ultra bien pensance qui n'est plus capable d'apprécier quoi que ce soit qui ne verse pas dans la moralisation explicite ? Il leur aurait fallu une séquence dessin animée incrustée au milieu du film avec un professeur qui sermonne bébé Jordan "c'est pas bien ce que tu fais, toi méchant toi vilain" ?

Qu'est-ce qu'ils pensent de Casino et des Affranchis ? Scorsese ferait l'apologie du crime organisé, du meurtre et du blanchiment d'argent ?


20/10/2023 à 12:11

3 différences importantes avec Scarface :

- Tony Montana est un personnage fictif
- Tony Montana tue des gens (conséquence directement montrée de ses actes et ligne rouge très claire pour tout un chacun)
- Tony Montana finit par se faire tuer (de façon totalement pathétique)

Pas d'accord avec les commentaires qui ferment le débat sous prétexte que les gens n'ont qu'à réfléchir. Pour moi, même si le TWoWS est un bon film, j'ai effectivement trouvé que JB y était présenté sous un jour trop avenant

sylvinception
20/10/2023 à 11:48

On se met à genou et on lui baise la main, merci.

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